Aux etats-unis d'afrique

d'Abdourahman Waberi
Roman - 230 pages
Editions JC Lattès - février 2006

Dans une fédération des Etats-Unis d'Afrique propspère et convoitée vit la jeune Maya. Arrachée à sa Normandie natale puis adoptée dès ses premiers jours par un grand médecin humanitaire africain, elle vit à Asmara et grandit dans cette Ethiopie privilégiée, poursuivant ses études artistiques dans une université de renom. Mais bientôt, sa soif de s'approprier son histoire la conduira en Europe, dans un chaos effrayant et une extrême pauvreté - ni eau ni électricité, même place Vendôme - alors que des millions de Caucasiens en détresse font le chemin inverse pour venir échouer aux portes de l'Afrique...

Avec des si on mettrait Paris en bouteille, Abdourahman Waberi met, lui, l'Afrique souveraine en roman.
Le récit paraît tout d'abord un peu décousu, donnant l'impression d'être surtout l'occasion pour l'auteur de placer ses idées d'un modèle africain capitaliste basé sur le modèle actuel occidental, d'abreuver ses personnages de PapeSy ou de NegusCafé, ou encore de les faire manger au MacDiop... Abdourahman Waberi en profite également pour donner un rayonnement mondial à de grands artistes africains parfois méconnus. Mais si l'on ne voit que cela, on se trompe grandement, Aux Etats-Unis d'Afrique n'a pas cette seule ambition du pamphlet qui fait sourire et flatte, c'est aussi un roman extrêmement bien écrit. Le narrateur s'adresse à la jeune Maya et tente de lui faire prendre conscience de ce déséquilibre mondial et de l'hégémonie africaine regrettable. Cette Maya est un espoir, un espoir de compassion, de tolérance, d'ouverture et de compréhension, l'espoir de faire naître des vocations chez les jeunes immigrés. Elle sculpte et revisite l'art statuaire oublié.

Extrait :
"La pluie est là. Premières boues. Les ouvriers caucasiens retournent les champs d'igname en cadence. Tous dans la gadoue. Un même pas et une même sueur. Les oiseaux des marais, dans l'estuaire du Nil, se comptent et se recomptent avant de migrer vers la pointe australe du continent, beaucoup plus ensoleillée en cette période de l'année. Un brouillard aussi épais que celui de Mombasa s'abat sur le plat pays mais épargne provisoirement les abords d'Asmara. Tu avales ton jus de papaya. Tu tends son bol de café à Docteur Papa tout en surveillant, depuis la baie vitrée, la victoire de la lumière sur l'ombre."

Cette mise en miroir est le moyen que A. Waberi a choisi pour faire prendre conscience de l'Autre et de la réciprocité nécessaire dans les rapports à l'Etranger. Et il dénonce le racisme et la puissance écrasante de l'argent qui pervertit les relations humaines et mondiales.
Interview d'Abdourahman Waberi - Afrik.com
Abdourahman Waberi chez Alain Mabanckou