Ca commence à sentir la fin du
festival. Certains badgés sont dores et déjà
repartis, pour éviter la cohue du week-end. Et les organismes
sont éprouvés par dix jours de projections, de files
d'attente en plein soleil, de nuits trop courtes...
Mais il reste encore des films à
voir...
On commence avec la projection des deux derniers films en
compétition.
Visage, le film de
Tsaï-Ming Liang commandité par le Musée du Louvres
présente des qualités plastiques évidentes, mais
n'a pas convaincu l'exigeant public cannois. Il faut dire que cet
empilement de séquences décalées, absurdes, et
de clins d'oeil cinéphiles (à Truffaut, notamment) est
inégal et manque cruellement de liant.
Une carte des sons de Tokyo,
nouveau film d'Isabel Coixet – la seule «débutante»
de la sélection officielle – est en revanche une agréable
surprise. Elégant et sensuel, le film est porté par ses
comédiens, Rinko Kikuchi et Sergi Lopez, et par un beau
travail – évidemment – sur la bande-son. Il manque
peut-être un petit rien d'audace dans la mise en scène,
mais autrement, c'est une oeuvre assez maîtrisée, qui
s'inscrit dans le sillage d'oeuvres comme In the mood for love
ou Lost in translation.
Mais la claque de la journée, en
compétition, c'était le film de Gaspard Noé, que
j'ai pu rattraper en séance du lendemain. Enter the void
(soudain le vide) est un exercice de style virtuose, une
expérience cinématographique intense et éprouvante,
qui ne peut pas laisser indifférent. Tout le film est vu en
caméra subjective, par les yeux d'un junkie entraîné
dans un bad trip ultime. Le dispositif est d'une fluidité
exemplaire, comme si le film était composé d'un seul et
unique plan-séquence, et permet au réalisateur
d'Irréversible de plonger de nouveau dans un
univers particulièrement glauque et sordide, fait de sexe et
de sang. C'est typiquement le genre de film que
les festivaliers cannois aiment à siffler, d'autant que le
rythme retombe un peu sur la fin – ça dure quand même
2h30... - mais c'est une des oeuvres les plus ambitieuses et
audacieuses à avoir été proposées cette
année, avec l'Antichrist de Lars Von Trier.
De l'audace, il y en a eu aussi à
Un certain regard, dont c'était aujourd'hui la clôture.
La preuve avec le film primé, Canine, l'une des
oeuvres les plus déjantées présentées
cette année, toutes sections confondues. Ce film grec aborde
en effet des sujets graves, comme l'inceste et la manipulation
psychologique avec une facilité déconcertante et un
humour noir rafraîchissant.
Autres films primés dans la
section : Policier, adjectif du roumain Corneliu
Porumboiu (prix du jury) et, ex-aequo, Le père de mes enfants
et Les chats persans (prix spécial du jury).
Pour terminer en beauté, je suis
allé rattraper le grand gagnant de la Quinzaine des
réalisateurs, J'ai tué ma mère.
Une oeuvre pleine d'humour et de tendresse, née de la plume brillante d'un
jeune prodige québecois, Xavier Dolan, qui règle ses
comptes avec sa génitrice tout en lui faisant une véritable
déclaration d'amour.
Ouf ! Ca y est, le marathon
cinématographique est fini! Il ne me reste plus que le film de
clôture à voir, puisque j'ai déjà vu tous
les films en compétitions, rediffusés demain. Je vais
pouvoir souffler un peu et m'atteler aux critiques en retard... (eh
oui, déjà...)