C’était un projet auquel je pensais depuis longtemps, sans doute à partir de 2003. Parfois les projets ne se réalisent pas immédiatement, parce qu’il faut les laisser un peu reposer, parce qu’on est pas sûr de leur intérêt et que ce n’est que l’épreuve d’un temps d’irréalisation qui permet de les sélectionner, parce qu’on a pas trouvé le contexte, les moyens, l’impulsion du passage à l’acte, tout simplement.
Ce fut un peu de tout cela avec Memory landscape. Et pourtant le projet continuait à travailler, il restait, persistait dans mon imaginaire. Lorsque Eve K. Tremblay me proposa de participer au Waterpod, ce fut ce projet qui me semblait aller de soi. En effet, il faisait entrer le caractère temporaire de l’expérience dans une temporalité plus longue, dépassant les limites de la spectacuralité. Il y avait donc une mémoire, mais une mémoire du futur, de ce qui aura lieu et qui est par définition l’impossible.
Le Waterpod ne sera qu’un moment et qu’une étape de ce projet. Il y a peut être un devenir dans Memory landscape, car je sais, d’une connaissance intuitive venant de l’acte, qu’il ne s’agit en aucun cas d’une simple expérience collaborative et psychogéographique comme il en fleurit tant. Il s’agit plutôt de la relation entre les anonymes - et le pluriel ici est essentiel - et le paysage, la manière dont une ville se construit par une sédimentation mémorielle qui est effacée par accumulation plus que par disparition, et dont il est donc possible de faire l’archéologie (Peter Handke, Les ailes du désir).
Memory landscape donnera sans doute lieu à des versions plus ouvertes et tra(ns)ductives s’appuyant sur les voix pour construire des univers, s’échappant de la simple référentialité. Il y aura sans doute des occasions pour ouvrir le système aux passantsa afin qu’ils puissent eux-mêmes quadriller un espace, y déposer des repères pour que d’autres laissent des voix.