Mardi dernier avec Vogelsong et Cyril, nous sommes allés à la rencontre de P.Larrouturou. Comme je l'avais annoncé dans la semaine. Voici donc mon compte rendu, vous allez le voir et l'entendre (mp3), il a des choses à raconter. Méthodique, il propose un processus pour entamer une sortie de crise: impôt européen sur les bénéfices, et réduction du temps de travail. Tout ça dans une négociation d'un nouveau pacte social. Mais pourquoi donc le PS ne l'écoute-t-il pas ?
Sur le PS, nous avons attaqué dès le début, mais rapidement ce sont les choses économiques, le "protectionnisme" , la Chine, la RTT et d'autres sujets important qui ont pris le dessus. Pierre a toujours des anecdotes à raconter, et vous allez le voir elles sont référencées et permettent parfois de ridiculiser certains. Vous le verrez notement sur la réduction du temps de travail qui a été pensée par la droite depuis les années 1970 et jusqu'à récemment.
Pour PL , l'après congrès est là, et nous devons rassembler la gauche et constater que collectivement nous ne sommes pas à la hauteur, d'où son appel à muscler le projet du PS pour les européennes. D'ailleurs les militants PS ont voté à 80% un texte qui prévoit des ajouts. On ne les a toujours pas trouvés: c'est un peu dommage. Des parlementaires et élus de toutes les motions l'ont rejoint pour prendre une initiative forte (...) pour gagner les européennes. On le voit la réponse du bunker de Solferino est le mépris: Martine Aubry n'a pas voulu nous recevoir même cinq minutes. Il est désormais présent avec quelques amis au conseil national et ne sera pas silencieux au prochain congrès. Il est invité partout dans des fédérations, il doit former des portes paroles pour répondre aux demandes et ne pas refuser des invitations. Que ce soit à Bruxelles ou aux quatre coins du pays. Un petit avertissement est glissé: après la campagne, il faudra qu'on s'explique sur les pratiques démocratiques.
Sur l'alliance avec le modem: aujourd'hui on n'a pas de ligne (ndlr: projet) ça fait zéro + zéro égal la tête à toto. Même un enfant de moyenne section le sait (...) On a cherché le mot emploi sur le site du Modem il n'apparait pas.
Et là pan, la pique acérée: Il dénonce ceux qui nous annoncent créer 200 000 emplois alors qu'il y a 4 000 000 de chômeurs. On va avoir un million de chômeurs dans l'année qui vient, une crise sociale! Il ne veut pas voir Sarkozy fanfaronner au soir des européennes. Mais si on se prend une tôle, il faudra nous dire pourquoi on n'a pas pris en compte notre initiative. Il explique même qu'un chef de cabinet solférinesque a trouvé l'idée bonne. Le problème se situe donc à la tête: Une bonne partie des dirigeants du PS n'arrive pas a se laisser bousculer par les problèmes de chômage ou de précarité.
PL donne une bonne leçon de communication que je fais mienne et que je renvoie facilement dans la tronche des pisses-froids et autres bobos: Il explique pourquoi l'UMP est encore à 28%: Notre perception de la chose politique n'est pas la même que pour celui ou celle qui est informée uniquement par TF1 et par ce qu'il a écouté à la radio le matin, il entend sarkozy qui veut se battre pour une Europe qui protège, Et nous on voit celui qui dénonce les banquiers voleurs alors qu'il a bouffé avec eux au Fouquet's. Le problème est simple, comment on agit concrètement, la politique par la preuve en quelques sorte. 70% des gens pensent que Sarkozy est nul, mais le PS n'a pas de projet alternatif concret. Tout s'explique. Forcément avec un plan de relance qui promet 200 000 emplois quand le chômage grimpe de 3000 par jours.
Un forum sur l'emploi et la précarité était organisé le week-end précédent.Il m'a confirmé que le PS n'était pas très présent, mais que tout le reste de la gauche l'était. Là, je met un gros warning à mes amis du PS et de DA : Montrez vous, bordel de merde!
Voglesong demande alors ce qui sort de ce type de forum: Renforcer les droits des chômeurs pour qu'ils démarrent immédiatement, il y'a quand même des pays comme le Danemark où le chômage est indemnisé à 90% pendant 4 ans. PL explique ce qui l'agite: Ce qui est dramatique en France, c'est le nombre de petits boulots.
Sur contrat social, il veut qu'on se mette autour d'une table, les partis, les syndicats, les associations. Ce n'est pas pour assouplir les conditions de licenciement (...) mais de construire un nouveau pacte social. Vaincre la précarité, comme des pays qui ont trois fois moins de petits boulots que nous. Il propose qu'on regarde les causes du chômage de masse et de la précarité et qu'on imagine des solutions. Et justement des solutions il en a: la réduction du temps de travail et une nouvelle donne fiscale. Il discute avec des gens de la LCR ou du MoDEM, preuve que les idées quand elles sont débattues peuvent intéresser des gens d'horizons divers.
Il est aussi un de rares socialistes à admettre et dénoncer les erreurs commises entre autres entre 1997 et 2002. Par exemple la fiscalité des stocks options où la France a été plus royaliste que le roi. C'était la gauche qui était au pouvoir. C'est la gauche qui a fait le plus de privatisations (..) il y a un vrai problème. Il dénonce Jospin et Moscovici sur le projet social européen. Hollande qui lance des idées alors qu'il n'a rien proposé quand il était premier secrétaire du PS.
Une fois ceci expliqué il va passer au concret, et sort ses courbes et des idées. Toujours dans la méthode. Il dénonce les idées reçues, vous comprendrez pourquoi alors je le trouve intéressant en voyant la liste de ce qu'il dégomme : travailler plus pour gagner plus, la main invisible, la croissance par la dette, j'en passe et des meilleurs. Mais vous voyez ce que je veux dire.
La croissance est de plus en plus faible et de plus en plus financière, est-ce qu'en revenant elle va créer des emplois ? la réponse est évidente : ce n'est pas sûr à 100% et on le voit déjà les années de "croissance". Les pays qui ont eu le plus de croissance sont les plus endettés. Pour lui la crise est écologique et sociale. L'ordre des mots n'a pas d'importance. Dans les deux millions d'emplois qu'il propose de créer par divers moyens on trouve l'écologie et la réduction du temps de travail. Là nous avons expliqué par ce sujet était devenu tabou à gauche, du moins à la tête du PS. Il nous explique que le problème est tout autre: "Je suis invité dans des fédérations de toutes tendances(..) et il n'y a personne qui réclame, des parlementaires de toutes les tendances expliquent qu'ils ont été favorables à la semaine de 4 jours et que ça a été une connerie de faire les 35 heures avec autant de flexibilité".
Juste après, il nous explique qu'on a un problème avec les gens de grandes valeurs qui ne savent pas revenir sur leur erreurs. Cite Mendès France qui a reconnu ça, Rocard l'a reconnu. Par contre Jospin n'a pas de gout pour l'auto-flagellation. Ce n'est pas un scoop, mais une telle liberté de parole mérite le respect. PL comprend que Titine ne veuille pas ré-ouvrir le débat sur la réduction du temps de travail, mais ça l'étonne alors que la droite pilonne sur ce sujet et ce en utilisant des données fausses. En partie sur le durée effective du temps de travail ou la productivité, ou le cout du travail. J'ai dénoncé toutes ces intox, bordel de merde c'est donc à la portée des énarques du PS.
C''est alors que PL va nous faire l'historique des idées de réduction du temps de travail depuis 1970.
En 1980 Raymond Barre commande le rapport Giraudet qui préconise de réduire le temps de travail de 10% pour lutter contre le chômage. Un certain Jacques Chirac soutiendra l'idée dans la Croix. En 1981 la gauche promet les 35 heures et s'arrête à 39. En 1993, le patron de Danone explique qu"'il faut passer à 32 heures , sans étapes intermédiaires. Cela obligera les entreprises à créer des emplois". En 1995, Chirac trouve que cette idée appliquée dans une usine qu'il visite mérite d'être appliquée ailleurs. Il ne donner pas suite. La même année le rapport Boissonnat propose entre autre de baisser le temps de travail de 20 à 25%. Depuis 1974, le PIB a plus que doublé, mais la productivité est encore plus douce (ndlr: son évolution, il dessine à ce moment là). Au vu de l'évolution des salaires, les gains de productivité sont allés dans la poche des actionnaires.
Pour lui c'est un problème de dignité humaine de laisser vivre des gens avec des petits salaires et des petits jobs alors que nous avons atteint des niveaux de productivité importants. Il faut donc partager le travail. Tous les patrons ne sont pas aussi cynique que Kessler, c'est le discours de Larrouturou qui en rencontre. Et il faut l'avouer ses explications sont assez étonnantes. A la réponse "vous avez un processus pour passer aux 32 heures ?". Oui, le livre.
Il embraye alors sur les grands élus qui lui confient leurs craintes de perdre européennes, régionales et présidentielles devant l'autisme du PS Parisien. Les collectivités bossent, les élus ont des convictions et sont ouverts sur le monde en gardant les convictions. Nous sommes la seconde destination des investissements. Donc il y a de quoi travailler: Il faut se mettre trois mois autour d'une table à 15 ou 20: Politiques, syndicats, Medef et autres représentant du patronat... Pour négocier et étudier les propositions d'un nouveau contrat social, sans doute soumis à Référendum. Pas forcement avec un consensus, mais sans doute avec 80% de points en commun. Il est optimiste.
En effet ça fait quelques années que le PS n'a pas fait de conventions collectives sérieuses (sur ces problèmes). Il compte rappeler à Titine sa promesse d'en organiser une à l'automne.
Le reste de la rencontre tourne autour de la Chine, du commerce mondial , du protectionnisme. Je vous conseille pour ces sujets de lire le compte rendu de Vogelsong ou d'écouter le fichier audio ( 1 h35 ). Il parle notement du moyen de rendre 100 euros aux plus faibles salaires...
Et rendez-vous nous été donné juste après les élections européennes.Tout est déjà prévu, nous organisons un petite débat entre Pierre Larrouturou et Corrine Lepage qui a signé son appel du 2 mai. Cela aura lieu le 15 juin en fin d'après midi dans les locaux de Vendredi. Et bien sûr, vidéo (peut-être), audio et compte-rendus seront au rendez-vous.
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