Sarkozy : Des réformes inachevées

Publié le 21 mai 2009 par Patjol


Nicolas Sarkozy a été élu parce qu'il promettait de réformer la France, de la faire avancer. Il y avait trois types de réformes : des réformes de flexibilité de l’économie pour la rendre plus dynamique ; des réformes de croissance à moyen terme et des réformes destinées à assainir les finances publiques.
Après deux ans de présidence de la République, tentons d'en tirer un bilan. Ce qu'il y a de nouveau, c'est qu'on réforme dans toutes les directions à la fois, ce qui permet à la fois d'aller plus vite et de continuer si une réforme cale. Le premier inconvénient, c'est le manque de lisibilité mais on en a déjà parlé ici. Ce qu'il y a de plus gênant, c'est que ces réformes sont souvent inachevées, pour ne pas dire bâclées, et que beaucoup d'entre elles coûtent plus cher que prévu.
- La réforme du contrat de travail : Le candidat Sarkozy avait parlé d'un contrat de travail unique pour remplacer les CDI et CDD. Ce point a échoué, les négociations ont juste abouti à des modalités de licenciement à l'amiable. C'est au bénéfice de l’employeur et de l’employé, mais au détriment des finances de l’assurance chômage.
-La réforme des régimes spéciaux de retraite, qui devait permettre d’économiser3 milliards d'euros et aplanir certaines inégalités, n'aboutira certainement pas à ces économies. Certains (Pierre Cahux et André Zylberberg) parlent même d'un surcoût, ce qui serait un comble !
- Le service minimum dans les transports : Un vrai service minimum (ceux qui assurent un service public indispensable n'auraiet pas eu le droit de l'interrompre totalement) aurait nécessité de toucher à la constitution, ce qui aurait été impossible pour une réforme aussi politique. Alors on a défini certaines modalités aux grèves, ce qui est très différent.
- Les heures supplémentaires : Cette réforme a bien été accomplie mais elle coûte cher et surtout elle était plus adaptée à la période de croissance qu'à la crise actuelle. En période de croissance elle est très utile pour apporter de la souplesse aux entreprises, dont le carnet de commande n'est malheureusement pas constant. Mais elle favorise ceux qui ont déjà un emploi face aux chômeurs ou RMIstes. En période de crise, cette réforme ne sert plus à grand-chose parce que les entreprises n'en ont malheureusement plus l'usage. L'avantage est qu'elle ne coûte plus grand-chose non plus, mais je préfèrerais qu'on en ait besoin.
- La grande distribution : Le gouvernement a cherché à favoriser le développement de ce secteur très pourvoyeur d'emplois non délocalisables. Là aussi on a assisté à une réforme a minima. La pression des lobbys économiques et politiques locaux a obligé à réduire les ambitions et la loi de modernisation de l’économie, qui voulait rompre avec la précédente législation, va continuer à protéger les secteurs non concurrentiels. Mais la messe n'est pas dite et le sujet pourrait redevenir d'actualité.
- Une de mes marottes, la réforme des collectivités locales, est l'exemple typique de la montagne qui accouche d'une souris. C'est une réforme de très grande ampleur, mais pour ce quinquennat-ci on n'aura qu'une réformette (voir Réforme des collectivités territoriales : Beaucoup de bruit pour rien).
- Le plan banlieues n'a pas eu les moyens de ses ambitions. Il suscitait beaucoup d'espoir (voir Le plan banlieues), et les besoins sont énormes. Mais les arbitrages budgétaires lui ont coupé ses ailes, et ce n'est pas maintenant qu'on trouvera les ressources nécessaires. C'est un sujet qui reviendra forcément un jour ou l'autre sur le devant de la scène, tant le besoin est fort. J'espère que ce ne sera pas de la même manière qu'en octobre 2005...
Au final, nous assistons à un indéniable réformisme. Mais pas à un réformisme de fond, un réformisme qui s'affiche beaucoup dans les médias (et que j'ai souvent relayé) sans toujours aller au fond des choses. Ca m'nquiète pour l'avenir de notre démocratie, j'ai peur qu'on assiste là à une tendance de fond qui consiste à privilégier l'affichage sur l'efficacité, et cette dérive me semble largement partagée dans notre classe politique actuelle.
En réalité, la seule grande force de Nicolas Sarkozy indépendamment de sa volonté et de son activisme réside dans l’incroyable faiblesse de l’opposition de gauche qui est non seulement profondément divisée mais dont à l’évidence personne ne pense qu’elle aurait fait mieux si elle avait été au pouvoir. C’est à la fois peu et beaucoup.