50 ans de Nouvelle Vague : tsunami ou clapot ?

Par Cineblogywood @Cineblogywood
Artistes : Le monde est sans pitié. On a 50 ans et tout le monde vous tombe dessus ! Même si vous incarnez l’insolence, la jeunesse, la révolte… Et il est toujours périlleux de tirer le portrait d’une quinqua autant célébrée… Alors, voilà. Je n’irai pas par quatre chemins. La Nouvelle vague, c’est FI-NI, les gars.
T’as de beaux restes, tu sais !
OK, il reste des films magnifiques – A bout de souffle, Les 400 coups, Le Beau Serge, Paris nous appartient
OK, les réalisateurs qui l’incarnent sont pour la plupart encore de sémillants cinéastes : si Truffaut est mort il y a maintenant 25 ans et Godard est carrément à l’ouest, Rohmer et Rivette font tourner leur petite entreprise, et Chabrol vieillit plutôt bien.
OK, pas une semaine sans qu’on s’en réclame – des Cahiers du cinéma à Christophe Honoré, en passant par le réalisateur taïwanais Tsai Min Liang, en compet cette année à Cannes, avec un film qui rassemble les survivants de la Nouvelle Vague (Léaud, Moreau, Truffaut via Fanny Ardant).…
OK, l’esprit libertaire et frondeur des années 68 en est l’un des plus beaux fruits. Remember la fronde de Cannes en mai 68 mené par Truffaut et Godard. Ou bien la Cinémathèque de Langlois qui, sans la défense acharnée des cinéastes de la Nouvelle Vague, n’aurait survécu.
OK, sans elle, pas d’Anna Karina, de Jeanne Moreau, de Bernadette Lafont, de Jean-Paul Belmondo, de Jean-Claude Brialy, de Jean-Pierre Léaud ou de Gérard Blain.
Tirez sur le pianiste
Mais enfin ! C’est d’abord un mouvement d’exclusion, qui a fusillé certaines carrières qu’heureusement on réévalue à présent : René Clément (Plein soleil), Henri-Georges Clouzot (Le Corbeau) ou Julien Duvivier (Voici le temps des assassins).
C’est ensuite une pure conjonction entre l’esprit d’une génération frondeuse et l’avènement de techniques qui ont permis aux cinéastes de sortir des studios, de tourner en prise directe et en décors naturels, de privilégier l’improvisation, de casser les codes du studio. Mais pas seulement : bourrés de références plus ou moins décelables, certains films ressemblent à des brouillons brillants de khâgneux en mal de reconnaissance. Aussi beau soit-il formellement, Pierrot le fou reste un film suffisant de sa suffisance.
Et puis, la Nouvelle Vague, c’est l’esprit de chapelle le plus étroit : pourquoi Mocky, Resnais, Malle, Lelouch, Cavalier n’ont-ils jamais été reconnus et intégrés en tant que cinéastes de la Nouvelle Vague ? Et que dire du sort réservé à Deville et de Broca ? Et PIALAT, putain !! Même techniques, même liberté, même légèreté, mais ils n’appartenaient sans doute pas au club de ces critiques convertis au cinéma !
Enfin, n’oublions pas les précurseurs : avant la Nouvelle vague, on avait eu Rome Ville ouverte, le néo-réalisme italien, Renoir, Cassavetes – et même Le petit fugitif, ressorti fort opportunément par Carlotta l’hiver dernier.
Bref, on a eu beau la vénérer, l’adorer ou la relifter, la quinqua ne peut offrir que ce qu’elle a : 50 ans, quelques beaux restes, certes, mais pas mal de breloques et de dépouilles.
Tout a changé en Bretagne...
Mais bon, force est de constater qu’elle s’est imposée, tel un tsunami mondial. Oshima au Japon, Bertolucci en Italie, Rocha au Brésil, le Dogme danois, et même les Carax-Beinex-Besson : qu’ils s’en soient inspirés comme modèle ou contre-modèle, aucun n’est parvenu à endiguer les effets libératoires d’une lame de fond qui est parvenue le temps de quelques films magiques à imposer l’anticonformisme en œuvre d’art. La preuve ? 50 ans après, on célèbre son avènement.
Comme le disait si bien Châteaubriand dans son Journal, tout a changé en Bretagne, hormi les vagues qui ne changent jamais
Et pour toi, lecteur de Cinéblogywood, que reste-t-il de la Nouvelle Vague ? Des vieux films ? La magnificence cinéphilique d’un geste de révolte ? Une énième resucée de l’éternel combat des Anciens et des Modernes ? Le débat est ouvert…
Travis Bickle