Porté par la lecture de deux ouvrages relatifs à Nantes (celui de Gracq : « la Forme d’une ville » et une biographie du fameux architecte Graslin), je propose une série d’articles sur des aspects de cette ville qui m’a, depuis mon arrivée dans le quartier Zola en 89 puis Graslin en 90, et après l’avoir quittée, toujours attiré.
Julien Gracq avec cette élégance du style qui le caractérise et en même temps la précision du géographe qu’il a été, souligne l’importance de la bipolarité qui règne dans l’air de Nantes et qui façonne la ville. D’un côté, la Loire de la vieille province, l’odeur de gardon du fleuve qui a traversé les vallées, charrié les mottes de berge, le goujon, la tanche, la carpe, enveloppé les silhouettes des châteaux Renaissance, la Loire jusqu’au Pont de Cheviré, la Loire dupliquée par l’Erdre, son gracieux affluent d’où partent les vedettes panoramiques et les rameurs du club d’aviron...
De l’autre côté, la Loire de l’estuaire, celle qui, à partir des anciens chantiers Dubigeon, ouvre sur l’Atlantique et l’horizon du grand large. Le piéton à Nantes gravit la rue Crébillon, tourne autour de la Place Royale, quitte le cour Cambronne, puis s’arrête tout en bas, sur le quai de la Fosse, par exemple devant le Maillé Brezé...
Alors il se sent un peu comme le narrateur au début de « Moby
Dick », près à prendre la mer et à s’engouffrer dans le grand courant qui le tire vers Saint-Nazaire et les monstres des grands fonds ! Surtout s’il sort à peine de la visite des machines de l’Ile... J’y reviens demain.