Et pourtant, il était tout joyeux, voir triomphant lorsqu'il fut nommé numéro deux de Ministère de la justice au poste de Secrétaire d’Etat aux programmes immobiliers de la Justice le 17 juin 2002.
A une question posée cette année là par la très sarkoziste Françoise Laborde, il déclarait : "C’est vraiment le débat de l’oeuf et de la poule. Croire que les juges condamnent en fonction d’une espèce de compteur qu’on leur communiquerait tous les jours, pour leur dire : tant de places à remplir, c’est bien mal connaître le fonctionnement de la justice. Il faut aujourd’hui construire des places de prison, parce qu’il est inhumain d’entasser trois, quatre, cinq personnes dans des cellules de neuf ou douze mètres carrés. Il y a ceux qui sont républicains, comme nous, qui sont les républicains de l’incantation - les "y’a qu’à", "faut que". On ne devrait pas avoir des conditions aussi lamentables en prison. Et puis il y a les républicains de l’action, ceux qui se disent qu’il faut en finir avec cette route et c’est ce que nous efforçons de faire avec D. Perben" - Source LDH Toulon
Prisons dont on attend toujours la construction puisqu'en 2004, l'information tombait : on apprenait qu'un homme d'affaire, Michel Delfau, versait à trois hommes politiques des Yvelines (Pierre Bédier, Gilles Forray et Jacques Masdeu-Arus des sommes en liquide en échange de l'attribution de marchés publics réguliers. Delfau avait ainsi bénéficié de tous les marchés de nettoyage des villes de Poissy et Mantes-la-Jolie à partir de l'élection de Jacques Masdeu-Arus et Pierre Bédier à leur tête, respectivement en 1983 et 1995. Durant la période 1998-2001, les sorties en espèces faites par Michel Delfau sur les comptes de ses sociétés prestataires de service ont été de l'ordre de 200 000 euros. Une somme remise ensuite aux élus, selon l'accusation.
En clair, il était mis en examen pour "corruption passive" et "recel d'abus de biens sociaux"
L'affaire faisait grand bruit compte tenu du poste. Et pourtant, Pierre Bédier se défendait bec et ongles tout en démissionnant au plus vite :
"Si j'avais été secrétaire d'Etat auprès de n'importe quel autre ministre, je n'aurais pas démissionné", a lancé l'ex-secrétaire d'Etat aux Programmes immobiliers de la Justice, quarante-huit heures après sa mise en examen par le juge Philippe Courroye. "J'ai quitté le gouvernement, a-t-il expliqué, parce que j'étais numéro 2 du ministère de la Justice. La caractéristique du ministre de la Justice, c'est qu'il est informé par les parquets, à travers la direction des affaires criminelles, de tous les dossiers et en particulier des plus sensibles".
Si Pierre Bédier criait au complot, il ne faut pas oublier que l'affaire lui a valu une condamnation à 18 mois d'emprisonnement avec sursis deux ans plus tard.
De notre côté, nous pensons que quel que soit le poste de Ministre ou de Secrétaire d'Etat, la démission immédiate s'impose en cas de mise en examen ou de procédure judiciaire. Notre conviction repose sur la "jurisprudence Bérégovoy/Balladur" selon laquelle tout politique soupçonné par la justice ne peut être ministre.
Ajoutons au passage que si Lionel Jospin l'avait appliquée à DSK, celle-ci a été mise à mal par la nomination au gouvernement d'André Santini, mis en examen depuis l'été 2006 dans une affaire de scandale financier autour d'une fondation d'art contemporain (fondation Hamon) Source Nouvel Obs
Pour ceux qui l'ignoreraient, qui est politiquement Pierre Bédier ?
Au RPR devenu (2003) UMP, secrétaire départemental adjoint (1990),
Secrétaire départemental adjoint (1990),
Secrétaire départemental (1993-95),
Président du Comité départemental (1995-98),
Délégué général (1995-97), Secrétaire national (1998-99),
Secrétaire général adjoint (2001-02), Président départemental des Yvelines (2003-05)
Source Blog de Pierre Bédier
Du 29/03/2004 au 17/09/2005 il était membre et vice-président du conseil général des Yvelines ainsi que Président du conseil général des Yvelines du 16/09/2005 au 25/05/2009.
Il était également titulaire d'un poste honorifique lui permettant de jouer les hommes influents dans les milieux économiques et diplomatiques pendant cinq ans. Puisqu'il avait obtenu la tête du groupe d’amitié France-Gabon, un poste privilégié avec vue sur le pétrole, en contact direct avec l’indétrônable président Omar Bongo - source Backchich. De même, il trouvait le temps d'être membre du groupe d’amitié France-Togo
Le profil type de l'apparatchik RPR (puis UMP) cumulard et avide de fonctions.
Adepte de la "démocratie musclée" c'est un autocrate parfait puisqu'à Mantes, il a : Edicté un règlement : les partis politiques n’ont pas droit de cité hors campagne électorale, et seules les associations signataires d’une charte avec la commune peuvent accéder aux locaux. Si le préambule de ladite charte affirme bien " la non-confusion des pouvoirs ", son article premier soumet l’association à " un contrat d’objectif ", et l’article 3 réduit son indépendance à " la conduite de ses tâches de gestion et d’animation ". Règlement unilatéral, la ville demeurant libre d’offrir les salles municipales à qui bon lui semble quand bon lui semble. Là où Décil est interdite de débat sur l’école le 10 octobre, Christine Boutin, la députée UDF, peut tenir conférence ce samedi même ... / ... Source l'Humanité
Monsieur Bédier qui a néanmoins une vue très particulière de la vie parlementaire puisque : Le 15 avril 2009, un classement établi par le journaliste Vincent Nouzille fait de Pierre Bédier le premier des députés les moins actifs de l'Assemblée nationale sur la période de juillet 2007 à avril 2009 (il a depuis démissionné en échange d'une mission sur le développement solidaire et l’immigration auprès du ministre Brice Hortefeux offerte par François Fillon)
On vous le dit : Du "tout terrain" politique cet homme là !
Que dit le jugement de la cour de cassation ?
La cour de cassation a confirmé la peine de 18 mois de prison avec sursis, 25.000 euros d'amende et trois ans de privation des droits civiques prononcée pour corruption en 2006 contre Pierre Bédier, membre du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin de 2002 à 2004. L'ex-secrétaire d'Etat aux Programmes immobiliers de la justice, chargé de la construction des prisons, avait été reconnu coupable d'avoir perçu de 1998 à 2003 des sommes d'argent en liquide d'un entrepreneur, Michel Delfau, en échange de marchés de nettoyage industriel à Mantes-la-Jolie (Yvelines), ville dont il a été maire de 1995 à 2002.
La privation de droits pour trois ans implique légalement une inéligibilité pour une durée double. Il devra donc quitter la présidence du Conseil général des Yvelines. Pierre Bédier vient de quitter son siège de député pour une mission sur le "développement solidaire" auprès du ministère de l'Immigration. Cette procédure permet d'éviter l'organisation d'une élection partielle dans sa circonscription, qui restera donc détenue par son suppléant UMP jusqu'en 2012.
Le tribunal correctionnel écrivait dans son jugement en 2006 que "Pierre Bédier (avait) gravement porté atteinte à l'autorité de l'Etat, à des fins purement personnelles et trahi la confiance que les citoyens avaient placée en lui pour le représenter". "Il a nui au fonctionnement des institutions républicaines en acceptant la mise en place d'un système de corruption", ajoutait le tribunal.
Pierre Bédier avait quitté le gouvernement Raffarin en janvier 2004 en raison de sa mise en examen dans l'affaire. Source France Soir Reuters
Que déclare t-il sur son blog, pour sa défense, à l'issue de cette condamnation ?
Je suis innocent. Malgré mes dénégations, malgré la culpabilité avérée de mes détracteurs, malgré une absence de preuves matérielles, la justice n’a pas voulu l’entendre. Notre système pénal et les modalités de l’instruction permettent encore des erreurs judiciaires ; j’en suis la victime aujourd’hui. La colère et l’indignation de ces magistrats qui m’ont manifesté leur soutien nécessairement discret, m’ont permis de mieux comprendre cela et de trouver la force de faire face.
Les soutiens nombreux, d’élus de droite et de gauche, de gens modestes ou plus aisés, anonymes ou connus, m’ont convaincu de poursuivre le combat pour imposer la vérité de mon innocence ; je saisirai dans les jours qui viennent la cour européenne des Droits de l’Homme. Puisque cet appel n’est pas suspensif, je prendrai, dans les temps proches, toutes les décisions nécessaires à la bonne marche de notre Département et de notre Mantois, dont sans fausse modestie j’ai été un honnête et efficace serviteur. A une autre place, qui m’est imposée, je le resterai, en attendant de laisser le peuple, le seul juge dans une démocratie, décider de nouveau. Source Blog de Pierre Bédier . Message subliminal à ses collègues qui auraient des ambitions ?
- Et pourtant, le site de l'UMP reste muet sur cette condamnation et même le très "réactif" Frédéric Lefebvre ne trouve rien à déclarer sur son blog, alors qu'il demandait la tête du patron de l'AFP qui ne voulait pas diffuser ses communiqués sur Ségolène Royal.
- Et pourtant, le conseil général des Yvelines est un des fiefs et "tiroirs caisse" de l'UMP.
La seule réaction a été celle de Christine Boutin, ministre du logement, qui s'est mise sur les rangs pour lui succéder. La première vice-présidente du conseil général s'est déclarée prête à prendre l'intérim, au grand dam de son prédécesseur UMP qui était jusqu'à présent parvenu à rester dans la course malgré les nombreux rebondissements judiciaires.
Mais Pierre Bédier n'a semble t-il pas dit son dernier mot : Pour faire barrage à Christine Boutin à la présidence du conseil général, il a imaginé un autre stratagème. En qualité de première vice-présidente du conseil général, Mme Boutin devrait théoriquement assurer l'intérim à la tête du département en attendant l'organisation de l'élection mais le même jour, le cabinet de Pierre Bédier a indiqué qu'il "n'y aurait pas d'intérim" puisqu'il démissionnerait le 25 mai et convoquait les conseillers généraux le lendemain pour l'élection du nouvel exécutif. Jusqu'au bout il espère pouvoir imposer un candidat à sa main. - Source Le Monde
En fin de compte, Pierre Bédier et sa garde rapprochée se battront "jusqu'à la mort " pour garder ce "fromage" et nous risquons d'assister dans les mois qui viennent à des bagarres épiques entre chiraquiens et sarkozistes qui apporteront, c'est certain une image hautement valorisante de la politique française et devrait mettre à mal les nerfs du "gentil" Xavier Bertrand.
Le candidat Sarkozy dans son programme électoral affirmait dans son point 2 : "Une démocratie irréprochable"
Belle démonstration !!!
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LDH Toulon
Libellés : démocratie, justice, politique, ump