J'ai déjà dit ici tout le mal que je pensais du voisin bricoleur quand on habite un immeuble et je pensais avoir fait le tour de la question jusqu'à ce que l'appartement du dessous soit à nouveau occupé. J'avais aperçu le nouvel arrivé et sa silhouette évoquait le voisin discret, voire timide peut-être, et d'avance je m'étais réjoui de ne pas voir débouler dans notre escalier une grande gueule décidée à tout régir selon ses propres lois ce qui aurait engendré des problèmes de voisinage certains. Autre bon point mis à son actif, il n'est présent qu'en semaine, le week-end il vit ailleurs avec j'ai cru comprendre, sa famille ; cet appartement n'étant qu'un pied-à-terre pour la semaine de travail. Je me frottais les mains, le calme de l'immeuble aller perdurer.
Les premiers jours il y eu quelques bruits de meubles que l'on traîne, quelques coups de marteau discrets mais trois fois rien pour quelqu'un qui emménage. La discrétion même. Chaque soir, au retour du boulot une légère agitation à l'étage du dessous, finalisation d'une installation que je sentais quasi achevée.
Sauf que « quasi achevée » ne signifie pas « définitivement achevée » ! J'ai aussi découvert qu'il existe différentes espèces de bricoleurs, il y a ceux qui font un vacarme infernal pendant un ou « x » jours, bossant dur pour en finir au plus vite ; nous en bavons tous durant la durée des travaux mais quand c'est fini, on n'en parle plus. Et puis il y a une autre espèce, celle que je découvre implantée sous mon appartement. Chaque soir, pendant très peu de temps, je pressens qu'il bricole un peu jusqu'à ce qu'il branche sa perceuse pendant deux ou trois minutes, laps de temps ridicule j'en conviens mais qui suffit à ébranler tout l'escalier, puis tout se tait et le calme revient, jusqu'au lendemain soir. Evidemment ça m'agace. Ca m'agace d'autant plus que je ne comprends pas quels genres de travaux peuvent nécessiter un coup de perceuse si court, mais tous les soirs ?
Suis-je en présence d'un nouvel Edmond Dantès cherchant à s'évader, d'un maniaque de la perceuse qui la fait tourner pour le plaisir ou d'un musicien tendance Pierre Henry ? Ne pas savoir me turlupine. A moins qu'il ne s'agisse d'un pervers sexuel ou d'un peine à jouir qui toute la journée ne rêve qu'à cet instant, rentrer chez lui, déballer son outil et le prendre à deux mains pour y fixer la mèche à l'amorce du trou et dès que les vibrations font branler l'escalier tout lâcher et calmé, ranger son matériel. Tout est possible en ce bas monde et je pourrais empiler les théories les plus saugrenues sans en savoir beaucoup plus en fin de compte.
Pour aujourd'hui j'en reste là, j'ai un bricoleur timide dans le voisinage qui pour ne pas nous gêner travaille au ralenti, creusant son trou à son rythme, lentement mais sûrement, savourant chaque vrombissement de sa machine. Après tout pourquoi pas ?