Cette exposition du travail de Janet Cardiff et de George Bures Miller a été au MACBA, puis à Darmstadt et est malheureusement terminée, mais elle m’a tant plu quand je l’ai vue fin Juillet que j’ai néanmoins souhaité en parler ici.
Outre le Motet pour 40 voix et le Paradise Institute, l’exposition présentait beaucoup d’autres installations, où le son joue toujours un rôle prédominant et qui recréent un univers bien particulier. Celle qui donne son titre à l’exposition, The Killing Machine, est environnée d’un bruit lancinant, syncopé et cacophonique. Au centre de la pièce, une cage est occupée par une fauteuil de dentiste recouvert de fourrure synthétique, sur lequel des bras articulés performent un étonnant ballet. Des ombres gigantesques se dessinent sur les murs. C’est un instrument de torture, de mort par garrotage ou électrocution, c’est une évocation de la Colonie Pénitentiaire de Kafka, c’est un spectacle de bruit et fureur qui donne le ton de cette exposition, beaucoup plus dérangeante que les deux pièces que j’avais vues précédemment ne le laissaient augurer.
On entre dans The Dark Pool en craignant de tout déranger : la pièce, où on n’admet que quelques visiteurs à la fois, est un capharnaüm poussiéreux de livres, papier, bibelots, objets divers, entassés sur des tables, des bureaux, ou à même le sol en piles vacillantes. On avance précautionneusement dans une faible lumière, et à chaque pas ou presque, on déclenche une réaction sonore, musique, émission radiophonique, dialogue, bruits divers. On reste sur ses gardes, à l’affut, comme dans une maison hantée, revisitant l’antre d’un parent décédé et faisant revivre les fantômes à chaque pas. Avec un mécanisme somme toute assez simple, les deux artistes recréent un univers magique et envoûtant. On peut fermer les yeux, mais pas les oreilles.
Cardiff et Miller sont des adeptes du “trompe l’oreille”, mais, au delà de la qualité de leurs installations sonores, ils savent créer une ambiance, influer sur l’état d’esprit du spectateur de manière assez sensationnelle, dans tous les sens du mot. Espérons voir bientôt leur travail en France. (vidéos visibles sur leur site).
Photos: Courtoisie Galerie Barbara Weiss, Berlin/ Luhring Augustine Gallery, New York.