C'était impressionnant. C'était nu.
Jeanjean était arrêté là-dedans, bien visible contre les projecteurs.
Il ne disait rien, content de lui, planté dans le coeur de cette fille des déluges, vibrant dans sa blancheur inépuisable... D'un grand geste lent et un peu théatral qui délia haut sa main, il embrassa tout cela : " Comme vous pouvez le voir, dit-il, il n'y a rien. "
Il était tout à fait sérieux quoiqu'il sourît, à peine pincé, et les yeux ivres erraient sur les parois, avidement, tendrement. Mado qui s'appuyait à la calcite, ramenant bien sur elle son duffle-coat, s'y blotissant, le regarda la bouche ouverte, ébahie. Il nous tourna le dos d'un seul coup et marcha vers le fond de la nef où s'ouvrait une autre galerie, un peu penché, affairé dans son perpétuel émoi ; il ajouta comme pour lui-même : " Absolument rien " Il était déja dans la galerie. Mado pouffa... tout à l'heure dans la voiture elle me dirait sans doute que Jeanjean était gonflé... "
Pierre Michon : extrait de La Grande Beune. Editions Verdier 1996
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