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Ce chef-d'oeuvre d'animation résulte d'une longue collaboration entre le réalisateur Paul Grimault et le poète Jacques Prévert, auxquels il faut rajouter le compositeur polonais Wojclech Kilar, auteur de la partition symphonique qui accompagne le film.
Dans le royaume bien nommé de Tachycardie, un personnage grotesque, égotiste et mégalomane règne en despote absolu. Ce n'est pas Sarko 1er, puisque le film date de 1967, mais le roi Henri V et III font VIII et VIII font XVI - un nom passablement ridicule qui lui va à merveille ! Il exerce son pouvoir de façon arbitraire, contraignant ses courtisans aux pires bassesses et aux viles flatteries, usant d'une cruauté qu'on devine proportionnelle à sa frustration, car il n'est certainement pas dupe des réels sentiments qu'il inspire à son entourage. Il n'hésite pas, par exemple, à se débarrasser des gêneurs en les précipitant dans de lointaines abysses grâce à un ingénieux système de trappes s'ouvrant sous leurs pieds !
Ce qui pourtant humanise ce triste sire, c'est le tendre attachement qu'il éprouve envers une jeune bergère. Celle-ci, pourtant, aime un simple ramoneur, dont elle est aimée. Dans leur fuite éperdue à travers le palais tarabiscoté qui abrite le tyran et son royaume tout entier, les amants feront la rencontre d'un oiseau énergique et haut en couleurs, adversaire résolu du roi, qui ne cessera de leur prodiguer son aide et ses conseils, et finira par renverser le monarque. Entretemps, ils auront escaladé des toits, dévalé des escaliers, exploré des recoins sombres et découvert un monde souterrain et lugubre, contrepoint de l'univers luxueux du palais royal... Tout un petit peuple survit en effet dans les soubassements du royaume, sans doute depuis plusieurs générations, coupés du monde extérieur, sans jamais voir le soleil. C'est dans ces catacombes que l'oiseau, exilé avec le ramoneur et un musicien aveugle dans la dangereuse compagnie d'une horde de lions, fomentera une révolte qui mettra fin à la tyrannie.
Deux histoires nous sont donc contées à travers ce film : celle de l'amour qui triomphe des obstacles, celle de la liberté qui s'oppose à la tyrannie et finit par la vaincre. L'esthétique est particulièrement soignée, Grimault refusant en effet le parti-pris de mièvrerie souvent à l'oeuvre dans les dessins animés du fait de l'influence de Disney. Ce film, qui évite l'écueil du manichéisme, est empreint de poésie, de tendresse et d'humour. Quant à la satire politique, elle est hélas toujours d'actualité, et notre époque aurait bien besoin d'esprits libres comme Grimault et Prévert !
Pour un dossier complet sur ce film, voir le site d'Objectif Cinéma.
Et, pour vous donner envie de regarder ce film, voici un court extrait :