Cannes jours 4 et 5 : entre bonnes surprises et déceptions...

Par Alban Ravassard
Bonjour à tous !
Voici un court compte-rendu de ces deux derniers jours de projection à Cannes ! Bonne lecture !
1) Un prophète de Jacques Audiard

On l'attendait beaucoup. Parfois avec un peu d'appréhension car le défi était grand. Résultat, le nouveau Jacques Audiard est un excellent cru qui frise le chef-d'oeuvre. Il retrace l'évolution en milieu carcéral d'un jeune maghrébin qui ne sait ni lire ni écrire. Entre portrait sans concession du milieu carcéral, comme de la société (les deux milieux étant, dans le film, bien plus perméables qu'on ne peut le croire et tout aussi impitoyable l'un que l'autre) et islamisation, Audiard porte des propos forts mais extrêmement justes, que viennent servir un scénario très bien ficelé et magistralement écrit qui puise son excellence dans la force de son sujet initial. Malgré tout le film souffre d'un léger essoufflement au dernier tiers mais reste captivant jusqu'au bout de ses 2h30. Ajoutez à cela un casting exceptionnel avec notamment, le jeune acteur principal, qui apparaît pour la première fois à l'écran et qui est un sérieux prétendant au prix d'interprétation masculine. En bien des points "Un prophète" évoque parfois le Scarface de De palma et c'est un compliment. Toujours est-il que cette fois, Audiard est un très sérieux concurrent pour la Palme d'or.
2) Mother de Bong Joon-ho

On l'attendait au tournant après la réussite de The Host et de celle de son segment de Tokyo! et pour son retour, Bong Joon-ho est en très grande forme. Il présente ainsi Mother dans la compétition un certain regard mais l'on en est presque frustrés tant le film aurait mérité une présentation en compétition officielle (il y aurait plus eu sa place que Thirst par ailleurs...). Ce film, qui retrace le combat d'une mère pour prouver l'innocence de son fils handicapé mental est à plus d'un point original et bouleversant. Il est surtout d'une efficacité remarquable. Il ne se passe pas un moment sans qu'une grande idée de mise en scène ou de narration ne soit présente à l'écran. A ce sujet, l'ouverture du film est absolument prodigieuse et en surprendra plus d'un. Mais même si le réalisateur utilise beaucoup d'effets de décalages (qu'il affectionne tant) pour créer de l'humour ou du suspense, le film n'en est pas moins très sérieux et  émotionnellement très puissant notamment grâce à la construction diabolique du scénario qui en surprendra plus d'un. Ajoutez-y quelques un des plus beaux plans vus ces derniers temps au cinéma et de sinterprètes exemplaires et vous obtenez un des premiers coup de coeurs unanimes du festival. Une réussite indéniable. Espérons que la prochaine fois, Bong Joon-ho sera reconnu à sa juste valeur en étant présenté en compétition.
3) Taking Woodstock de Ang Lee

Le nouveau Ang Lee est un film très sympathique qui conte l'histoire de la genèse du célèbre festival de Woodstock et de son créateur malgré lui. Passé la découverte et le joyeux foutoir hippie que nous présente le film, si l'on s'attache beaucoup aux rôles principaux qui sont incarnés par des acteurs brillants par contre beaucoup de grands acteurs sont cantonnés à des rôles secondaires insignifiants et peu développés. Le film reste somme toute assez anecdotique et l'on se demande bien ce qui a pu l'amener en compétition officielle tant il aurait pu être un parfait film de clôture... Vite vu et malheureusement vite oublié... même si l'on passe un bon moment.
4) Ne te retourne pas de Marina de Van


Rien à dire sur ce film complètement insignifiant et raté qui se repose sur son concept et son casting glamour pour envoûter le spectateur. Personnellement, je me suis endormi très vite tant le film est mauvais, mal écrit, mal dialogué et mal interprété. Reste le concept sympa et les effets spéciaux réussis mais au service d'une histoire bien faible et qui n'est qu'un prétexte à un twist final déjà-vu et franchement risible... A éviter.
5) Kinatay de Brillante Mendoza

Autre curiosité de la compétition officielle, ce film philipin oscille entre fiction à tendance policière et style documentaire dérangeant... Il en résulte un film très sombre, se passant majoritairement de nuit, à la musique omniprésente et qui dégage une sensation hypnotique. Malheureusement, on se demande constamment où le film veut en venir et ce dont il veut parler au final, ce que l'on ne devinera pas (à moins d'être fort ? Je suis peut-être stupide). Bref, Kinatay fait un peu figure d'OVNI et se classe dans la catégorie très spécifique des "films de festival", il en sortira difficilement je suppose. Toujours est-il qu'il dérange ou déroute, en tout cas ne laisse pas indifférent.
6) Vengeance de Johnnie To

On attendait beaucoup (trop?) du nouveau Johnnie To. La déception est de mise. Non pas que le film ne soit pas efficace, ni la mise en scène à un haut niveau de maîtrise, mais To ne livre au final qu'un bon divertissement... La faute à qui ? à quoi ? Déjà il faut dire que Johnny Halliday dans le rôle principal n'arrange rien... dès le début l'on n'y croit pas et on sent un jeu plutôt mauvais de la part du chanteur/comédien... la suite n'arrange rien. Malgré des trouvailles de mise en scène et un récit mené tambour battant, le scénario ne se déroule que comme un prétexte et n'est en rien arrangé par la piètre tenue du comédien... Bref, petit à petit, tout cela bascule dans un final grand guignolesque et assez ridicule qui finit de décrédibiliser le tout. Dommage car le début percutant laissait entrevoir de grandes possibilités... On fait confiance à Johnnie To pour s'en relever et on espère presque que Johnny comédien ne s'en relèvera pas...
A suivre : Looking for Eric de Ken Loach, Agora d'Alejandro Amenabar et Antichrist de Lars Von Trier !