Christine "Marie-Antoinette" Lagarde a dû le reconnaître: la France est en récession. Elle était sans doute la dernière à ne pas le savoir. Vendredi, l'INSEE a délivré les chiffres officiels de la croissance française : le PIB a baissé deux trimestres consécutifs de suite, -1,5% au dernier trimestre 2008, puis -1,2% au premier trimestre 2009. Pour l'année en cours, la chute est estimée à -3%. Mais l'information cruciale, et cachée par le gouvernement, est que cette récession a bel et bien débuté ... au second trimestre 2008: Le PIB a reculé de 0,4% au deuxième trimestre 2008 puis de 0,2% au troisième trimestre. Il y a un an déjà, nous écrivions que les signes d'une récession étaient là. Il y a neuf mois, nous dénoncions l'argument sarkozyen facile qui attribuait à la chute des marchés financiers de septembre dernier la responsabilité principale de nos tourments.
Fidèle à son habitude, François Fillon a rapidement expliqué que la France s'en sortait mieux que les autres... "Les chiffres parlent d'eux-mêmes : - 2,5% pour la zone euro et - 1,2 pour la France". Certains économistes estiment que le creux de la crise a été atteint, mais que la zone euro est plus durement frappée que les Etats Unis. Or, d'après une enquête de conjoncture mensuelle réalisée par le Wall-Street Journal auprès d'économistes américains, le redressement de l'économie américaine prendrait 3 ou 4 ans. Et en France ? Faudra-t-il attendre 2017 ? Comment la France, marquée par une dégradation de l'emploi, une consommation qui s'affaisse et des échanges extérieurs structurellement déficitaires, trouvera-t-elle le rebond nécessaire d'ici la fin de l'année ?
Côté finances publiques, le déficit public de la France (Etat, sécurité sociale et collectivités locales) a frisé les 3,4% du PIB en 2008, en dégradation de près de 15 milliards d'euros par rapport à 2007. La dette s'envole, à 1327 milliards d'euros, soit 68,1% du PIB. Les emplois marchands sont retombés sous la barre des 16 millions, leur niveau d'il y a un an. On dénombre quelques 138 000 d'emplois au seul premier trimestre.
Sur fonds de crise, le gouvernement veut attaquer les "niches sociales". Il s'intéresse de près aux exonérations, totales ou partielles, de charges sociales dont bénéficient la participation financière et l'actionnariat salarié (-4 milliards d'euros de manque à gagner pour la sécurité sociale), la protection sociale complémentaire en entreprise (-3,1 milliards d'euros), les aides directes consenties aux salariés (titres restaurant, chèques vacances, avantages des comités d'entreprise, etc, soit -1,7 milliards d'euros), et les indemnités de rupture (-500 millions d'euros). Au total, la Sécu "perdrait" ainsi quelques 9 milliards d'euros par an. En juin dernier, le gouvernement avait frappé les esprits en sortant le chiffre de 41 milliards d'euros d'assiette non soumises.
Rappelons que le coût des niches fiscales sont elles évaluées à 73 milliards d'euros par an.
François Fillon a expliqué vendredi que le gouvernement allait "réexaminer certaines niches sociales, "comme nous l'avons fait avec les niches fiscales." Faut-il dresser ce parallèle entre les dispositifs de soutien aux salariés et les éxonérations fiscales pour les foyers les plus fortunés du pays ? rappelons que jeudi dernier, le rapport Cotis, sur le partage de la valeur ajoutée, soulignait combien les salaires nets avaient peu progressé depuis 20 ans en France.
En juin dernier, un rapport parlementaire proposait de taxer ces fameuses niches sociales à hauteur de 5%, sous deux formes : une «contribution de solidarité» de 5% sur l'épargne salariale (intéressement, participation, abondement au PERCO) avec une franchise de 200 € par bénéficiaire, et une contribution également de 5%, mais sans franchise, sur les autres niches : chèques restaurant, CESU, indemnités de licenciement, parachutes dorés, etc. La mission jugeait «ce régime trop favorable en l'état actuel des comptes sociaux». Le rendement escompté de cette mesure serait de 650 millions d’euros, à peine plus que les sommes perdues à cause du bouclier fiscal en 2008... Cette "flat tax", injuste s'il en est, n'a pas été retenue pour le moment.
Ironie du sort, le Revenu de Solidarité Active bénéficie dès cette semaine d'une campagne de publicité radio et TV. Le gouvernement s'attend désormais à quelques 3 millions de bénéficiaires avant la fin de l'année. Cette campagne coûte 2,2 millions d'euros, soit quelques 440 années de SMIC.
A chacun ses priorités...&alt;=rss