Ce n’est pas un hasard si l’album sort le "jour des fous". L’équivalent du "poisson d’avril" chez nous. Miss Young semble avoir la tête sur les épaules. Mais son esprit est ailleurs. Il est préoccupé depuis des années. J’en veux pour témoins ses thèmes. Elle les ressasse inexorablement. Elle a en partie du sang Apache dans les veines. Une orpheline élevée par des personnes d’origine modeste. Des (bons) Chrétiens fondamentalistes. Ces derniers ont une mission pour le Seigneur. Ils doivent sauver l’âme souillée de leur petite protégée. Kristeen Young sort pour le moins ébranlée de ses jeunes années. Mais elle s’est tissée un manteau de béton armé. Une protection. Et elle en garde une honnêteté imparable. Une arme. Kristeen donne son point de vue sur la société. Kristeen parle de sa relation avec les gens. Kristeen nous livre sa vision des hommes. Kristeen fustige la sacro-sainte famille. Kristeen égratigne l’Establishment. Pas de rébellion de pacotille. Un rejet du conforme. Un dégoût du laisser-aller. Ca passe ou ça casse. Des phrases extraites peuvent nous aiguiller sur l’état d’esprit de la Miss : "Je t’ai tout donné, tu as pris le meilleur puis tu es parti, tu n’es rien d’autre qu’un homme, fils", "mes larmes sont plus nuancées et sincères que les tiennes… tu ne pourras pas gagner mon concours de dépression", "tu sais que je t’aime à en mourir… je sais ce que tu as en tête…donc arrête de penser pour une fois", "la musique, tu la veux calme, comme au temps de papa, le confort n’est jamais un but".
D’emblée roulements de batteries. Piano désaccordé. Voix de chat sauvage pris au piège. Plus proche du résultat scénique. On est loin de toute cacophonie. Les instruments et la voix ont été enregistrés avec précision. Chirurgicale. D’où l’incroyable présence sonore. D’où l’émotion sans concession. D’où l’impression d’immédiateté dans l’expression. Des indices d’un travail de production réfléchi ? Des effets sont disséminés ici et là. Toujours dans le souci d’enrichir l’intensité dramatique. Sans aucun maniérisme. Ou si peu. Le groupe a gardé son phrasé qui fait sa personnalité. Martelage. Syncopée. Dissonance. Lyrisme. Rock. Heavy. Un petit côté poisseux. Bar malfamé. Baby Jeff maîtrise son art. A la perfection. Toujours concis. Pas de solo. Inutile. Il maintient la pression. Il garde le cap. Kristeen ne chante pas. Elle joue de sa voix. De mieux en mieux. Il y a des sonorités à la Kate Bush. Involontaire semble-t-il. Kristeen a affirmé connaître l’anglaise depuis peu. Qu’importe. Leurs univers sont différents. Leur part d’ombre n’a pas la même noirceur. Kate Bush minaude. Envoûte. Kristeen Young clame. Exorcise. Ses cordes vocales vous lient les mains. Le ton intime l’attention. Une supplication déguisée ? De gré ou de force, vous écouterez.
Le schéma se prolonge sur scène. Avant un disque, Kristeen Young tourne. Après un disque, elle tourne. Plus qu’un moyen de vivre. Une vraie raison de vivre. De survivre. Le groupe sillonne les U.S.A. De club en club. Des premières parties aussi. Pour Morrissey. L’ami fidèle. Mais rien n’est prévu pour la France. Pas encore. L’espoir fait vivre. Fait survivre.
En bref : 14 chansons pour s’exprimer sans retenue. 14 plaintes contre la vie. 14 questionnements sans réponses. 14 constatations sans concession. 14 cris d’amour en somme. A écouter le volume à fond. A ne pas aborder qu’en surface.
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le site, le myspace