Comme l’huile et l’eau, Nicolas Sarkozy et la véritable action politique ont du mal à se mixer. Remarquée par nombre de journalistes étrangers, l’action politique de NS ressemble à s’y méprendre à de l’esbroufe, autrement dit, il brasse du vent, de l’air, des cacouètes.
Ce qui mérite amplement réflexion. Car comme je le mentionnais dans un autre post récemment, l’action publique n’est pas cette fille facile que semble nous présenter notre président sous ses plus beaux atours. L’action publique doit être mesurée, calculée, pesée, en un mot réfléchie. Autrement dit tout le contraire de la course en avant que semble avoir voulu entamer notre guide.
Pourtant les opinions des sondés sont toujours favorables, ce qui ne manque pas d’arracher aux observateurs jetant l’anathème sur NS, des sueurs froides et autres spasmes dorsaux. Pourquoi donc, des mesures qui, pêle mêle, favorisent les plus riches, coûtent chères à l’Etat, sont lancées à contre temps du cycle économique, sont en partie retoquées par le Conseil Constitutionnel et fabriquent des usines à gaz (heures sup) sont-elles plébiscitées?
Pour au moins une bonne raison, Nicolas Sarkozy est le meilleur communicant que la Vème République ait porté. Je ne veux pas dire qu’il irradie de charisme ou que sa beauté naturelle fait défaillir la gente féminine, loin s’en faut.
Non. s’il est le meilleur c’est qu’il a parfaitement appréhendé le fonctionnement du système. Le système médiatique, avec son format désormais bien arrêté fait de coupures pub, de sujets d’une minute trente, de zapping et de phrases chocs a formaté le processus intellectuel français. Tout est désormais marketing et la réflexion n’est laissée qu’à un groupe relativement réduit d’individus.
Dans cette frénésie d’information courte et synthétique qui à vu la naissance des journaux matinaux gratuits, et qui condense 24H d’actu planétaire en 20 minutes, Nicolas Sarkozy évolue comme un poisson dans l’eau. Et plus qu’aucun autre, il en maîtrise les quatre fondamentaux à la perfection:
1)Faire ce que l’on dit, gage de crédibilité
2)Occuper constamment l’espace, en accumulant les passages dans les médias, gage de visibilité
3)Faire simple, voir simplissime, gage de compréhension par tout le monde
4)Ne se mettre personne à dos en émettant des idées avec lesquelles on ne peut pas ne pas être d’accord, gage de personne m’emmerde.
En répétant ses gammes il assure un haut degré de performance et un degré jamais atteint de prestidigitation politique. Le but de tout magicien c’est de détourner l’attention. C’est à la fois aussi simple et compliqué que cela car tout le tour repose sur la capacité à capter l’attention, à la focaliser sur une petite chose qui peut sembler anodine.
Tout l’art de notre président, et il faut bien lui reconnaître ce talent, c’est d’épouser au plus près l’exaltation médiatique pour son pain quotidien d’info croustillante. Tel un poisson rouge géant, la presse oublie instantanément ce qui faisait le jour d’avant la une de ses colonnes ou l’ouverture de ses JT.
En donnant chaque jour ou presque ce qu’ils attendent aux enfiévrés des salle de rédaction de quoi remplir leurs besaces il prolonge la course en avant. Et qui dit prolonger la course dit aussi ne pas avoir le temps, sauf à vouloir le prendre, de regarder derrière soit.
Nicolas le candidat promettait les heures sup’ défiscalisées ? Sarkozy le président le fait, et le fait savoir. Avant même que l’on ne puisse s’interroger sur les multiples questionnements soulevés par cette initiative1 que déjà la prochaine promesse était en route.
En collant au format intellectuel désormais majoritaire, celui de la mémoire flash, c’est toute tentative de réflexion du plus grand nombre que l’on court-circuite. Et c’est très finement joué. Pas le temps de constater que les mesures annoncées ne sont pas aussi efficaces, aussi pertinentes qu’annoncées. Pas non plus le temps d’y réfléchir.Dans la conscience de la foule, le problème est réglé, puisque l’on passe au suivant.
Pas de retour, pas d’évaluation. Pourquoi évaluer alors que l’on à tant à faire et à réformer?
D’un point de vue politique-politic (politique politicienne) c’est le summum, le fin du fin. En choisissant de plus une formulation aussi courte que frappante, aussi fine que percutante (travailler plus pour gagner plus) on se ménage aussi, et c’est le 3ème fondamental, un garde fou.
Comme faisait Le Pen avec ses « 3 millions de chômeurs, 3 millions d’immigrés », on force constamment ses opposants à se fourvoyer dans les mauvaises ripostes.
Celles qui attaquent l’homme et non les idées, celles qui stigmatisent l’apparence au lieu de pourfendre les résultats.
Car si la formule choc n’a besoin que d’une fraction de seconde pour être exprimée, la réponse intelligente nécessite bien plus que le format médiatique classique ne peut en offrir. En choisissant le choc des mots simples, on force les « adversaires » à s’exprimer dans des médias ou à des horaires moins lus, moins écoutés.
Sauf à tomber dans les travers précités d’une attaque personnelle, qui permet la victimisation de celui que l’on cherche à atteindre, point de réponse.
Le problème que pose Nicolas Sarkozy au PS et à la gauche en général, ce n’est pas la débauche de ses talents (…) mais le format de combat.
A l’heure actuelle, le problème n’a pas trouvé de solution. L’instinct ne s’encombre pas de réflexion.
Et ça, Nicolas l’a bien compris.
- quid des temps partiels, de la substitution travail/heure sup en défaveur des chômeurs, du financement des heures sup’ dans la fonction publique hospitalière et territoriale, de la substitution entre heures de base et heures sup’ pour éluder l’impôt? … [Retour]