Syndrome de l'intestin irritable

Publié le 12 mai 2009 par Marieclaude

Le syndrome de l'intestin irritable (SII) est aussi nommé syndrome du côlon irritable. En France, on utilise également le terme « colopathie fonctionnelle ». Il s'agit d'un trouble digestif qui se caractérise par la modification de la vitesse de passage des aliments dans l'intestin et par des malaises ou des sensations douloureuses.

Lorsque les phases de contraction et de relâchement des muscles intestinaux sont plus rapides ou plus fortes que la normale, le côlon (gros intestin) n'a pas le temps d'absorber l'eau contenue dans les aliments. Cela provoque des épisodes de diarrhée. Lorsque les contractions sont plus lentes et plus faibles que la normale, le côlon absorbe trop de fluides, ce qui entraîne de la constipation. Les selles sont alors dures et sèches.

Généralement, on distingue trois sous-catégories du syndrome en fonction du type de symptômes principaux.

  • Syndrome avec douleur et diarrhée.
  • Syndrome avec douleur et constipation.
  • Syndrome avec douleur, diarrhée et constipation.

Le syndrome de l'intestin irritable est considéré comme un trouble fonctionnel plutôt que comme une maladie. Il s'agit d'un mauvais fonctionnement qui ne cause pas de lésions apparentes à l'intestin. Par exemple, contrairement à la colite ulcéreuse, il n'y a pas d'inflammation de la muqueuse intestinale. Quant au terme syndrome, il désigne un ensemble de symptômes.

Ce trouble se développe de façon graduelle chez les adolescents et les jeunes adultes. Dans la plupart des cas, le syndrome de l'intestin irritable est chronique. Cependant, les personnes touchées peuvent connaître des périodes de rémission plus ou moins longues. Leurs malaises peuvent apparaître chaque jour pendant une semaine ou un mois, puis disparaître, ou encore durer toute leur vie. Seulement une minorité de patients présentent des symptômes très incommodants.

On a constaté que d'autres troubles sont associés à ce syndrome, comme des menstruations douloureuses, le syndrome de fatigue chronique et la fibromyalgie.

Avis. Si les malaises sont incommodants ou inquiétants, consulter son médecin pour confirmer ou non le diagnostic de côlon irritable. En effet, d'autres problèmes de santé (intolérance alimentaire, endométriose ou maladie de Crohn, par exemple) peuvent donner des symptômes similaires.

Prévalence

Le syndrome de l'intestin irritable est un trouble fréquent : il est la cause de 30 % à 50 % des consultations des gastroentérologues. En revanche, il est difficile de préciser sa prévalence. D'une part, on soupçonne que la moitié des personnes atteintes ne consultent pas leur médecin à ce sujet. D'autre part, il existe deux grilles de diagnostic différentes (Manning et Rome III), ce qui influence le nombre de personnes considérées comme souffrant du syndrome de l'intestin irritable. On estime, cependant, que ce syndrome touche de 10 % à 20 % de la population des pays occidentaux; il s'agit surtout de femmes.

Au Canada, le syndrome de l'intestin irritable touche entre 10 % et 14 % de la population. Deux fois plus de femmes que d'hommes en souffrent.

Causes

Les causes de ce trouble sont encore inconnues et font l'objet de nombreuses recherches. Deux hypothèses de base sont proposées : soit les personnes atteintes souffrent de contractions anormales et douloureuses de l'intestin, soit elles sont plus sensibles que la normale aux mouvements du côlon et du rectum, habituellement imperceptibles.

Comme les femmes sont plus touchées que les hommes et que leurs malaises s'aggravent durant leurs menstruations, certains chercheurs pensent que les changements hormonaux jouent un rôle.

Il est aussi possible qu'il y ait un lien entre le syndrome de l'intestin irritable et des sévices sexuels ou physiques vécus durant l'enfance.

Selon certaines données, jusqu'à 25 % des cas de syndrome de l'intestin irritable surviennent après une infection gastro-intestinale1,2. L'hypothèse d'un déséquilibre de la flore intestinale est aussi explorée3.

Par ailleurs, certains chercheurs pensent qu'un taux anormal de sérotonine dans le tube digestif pourrait être la cause du syndrome. Cela pourrait expliquer pourquoi de nombreux patients touchés souffrent d'anxiété et de dépression. Il faut savoir que la sérotonine a un effet important sur l'humeur et sur les mouvements intestinaux4,5.

On ne croit pas que le syndrome de l'intestin irritable est causé par une sensibilité ou par une intolérance alimentaire. Les deux peuvent toutefois en aggraver les symptômes. Par ailleurs, on a déjà pensé que le stress était une cause de ce trouble, mais ce n'est pas le cas. Par contre, il en augmente généralement les symptômes (particulièrement la douleur).

Complications

À la différence des maladies intestinales plus sérieuses, telles que la colite ulcéreuse et la maladie de Crohn, le syndrome de l'intestin irritable ne cause pas d'inflammation, n'altère pas la structure de la muqueuse intestinale et n'augmente pas le risque de souffrir d'un cancer colorectal. Par contre, la douleur, la diarrhée et la constipation qu'il entraîne peuvent être très incommodantes.

Le syndrome de l'intestin irritable peut aussi gêner sérieusement les activités professionnelles et sociales de ceux qui en souffrent, appauvrir leur qualité de vie et entraîner de l'anxiété et de la dépression.

Les personnes dont le syndrome se caractérise surtout par des diarrhées peuvent également avoir une déficience en vitamines et en minéraux.

Symptômes

La gravité, le type et le nombre de symptômes varient beaucoup d'une personne à l'autre. Certains individus peuvent présenter plusieurs des symptômes suivants :

  • De la constipation ou de la diarrhée, parfois en alternance.
  • Des douleurs et des crampes au ventre, qui disparaissent souvent avec l'évacuation de gaz ou de selles.
  • Des ballonnements et des flatulences.
  • Une « activité intestinale » bruyante (borborygmes).
  • Un besoin parfois urgent d'aller à la selle.
  • Une sensation d'évacuation incomplète des selles.
  • Du mucus dans les selles.

Ces symptômes surviennent généralement après les repas.

D'autres symptômes, qui ne sont pas directement reliés aux intestins, sont parfois présents : par exemple, des maux de tête, des nausées, des brûlures d'estomac, une douleur pelvienne chronique, des maux de dos (bas du dos), des troubles du sommeil.

Note. Du sang dans les selles, de la fièvre, une douleur intense ou une diarrhée incontrôlable qui surviennent la nuit ne sont pas des symptômes du syndrome de l'intestin irritable. Ils peuvent être causés par une maladie plus grave, et une consultation médicale s'impose.

Personnes à risque

  • Les femmes sont de deux à trois fois plus touchées par le syndrome de l'intestin irritable que les hommes. On ne sait pas si c'est parce qu'elles sont plus à risque ou parce que les hommes consultent moins à ce sujet.
  • Les personnes âgées de moins de 35 ans sont le plus à risque. Le syndrome de l'intestin irritable apparaît souvent entre la fin de l'adolescence et l'âge de 25 ans.

Facteurs de risque

Comme les causes du syndrome de l'intestin irritable sont mal cernées, les facteurs de risques sont impossibles à préciser pour l'instant.

Peut-on prévenir?

Comme on connaît mal les causes du syndrome de l’intestin irritable, il n’existe pas de moyen de prévenir son apparition.

Mesures pour prévenir les récidives

Des changements alimentaires et une meilleure gestion du stress peuvent favoriser les périodes de rémission (voir la section traitements médicaux).

Traitements médicaux

Malgré les recherches, la médecine ne propose encore rien de convaincant pour traiter le syndrome de l’intestin irritable. Les auteurs d’une synthèse publiée en 2006 ont conclu que le SII devait être traité tant sur le plan psychologique que sur le plan physiologique, car il s’agirait d’un trouble touchant les interactions du cerveau et du système digestif6.

Le fait de modifier son alimentation et de bien gérer son stress peut réduire les symptômes dans les cas légers ou modérés. Dans les cas où les malaises sont très incommodants, le médecin peut prescrire des médicaments qui réduisent la douleur en agissant sur les mouvements et les contractions de l’intestin.

Alimentation

Journal alimentaire
Avant d’entreprendre un traitement, il est recommandé de noter pendant quelques semaines ce qu’on mange afin d’identifier les aliments qui déclenchent systématiquement les malaises. Ensuite, il est conseillé d’éliminer les aliments à problèmes de son menu. Les conseils d’un nutritionniste peuvent être d’un grand secours : ils permettent de continuer à manger de façon équilibrée malgré le retrait de certains aliments du menu quotidien.

Quelques conseils pour réduire les malaises

  • Augmenter la consommation de fibres solubles, car elles sont douces pour l’intestin : les céréales d’avoine, la farine d’avoine, l’orge et la crème d’orge, par exemple.
  • Réduire la consommation de fibres insolubles, car elles sont irritantes : le blé entier, le son de blé et les petits fruits, par exemple.
  • Réduire les matières grasses, car elles stimulent beaucoup les contractions de l’intestin.
  • Limiter les aliments qui peuvent causer des gaz : ceux qui contiennent du sorbitol (un édulcorant présent dans les gommes à mâcher sans sucre) ou ceux qui contiennent du fructose (comme les pommes avec leur peau, les figues et les dattes).
  • Limiter les produits laitiers seulement en cas d’intolérance au lactose.
  • Éviter le café, le thé, l’alcool et le chocolat.
  • Remplacer les épices par les fines herbes.
  • Consommer la salade et les légumes crus à la fin des repas.
  • Boire de l’eau régulièrement au cours de la journée.
  • Manger à des heures régulières, bien mastiquer et ne pas sauter de repas.

Pour en savoir plus, consultez notre fiche Diète spéciale Syndrome de l’intestin irritable.

Gestion du stress

La gestion du stress permet un meilleur cycle des phases de détente et de contraction de l’intestin. Elle permet aussi de diminuer les tensions musculaires et nerveuses. Apprendre à mieux vivre les situations stressantes est important, voire essentiel, dans le cas des personnes dont le stress est un facteur déclenchant. Cet apprentissage peut se faire dans le cadre d’une psychothérapie ou grâce au recours à diverses techniques antistress.

À la Clinique Mayo, on suggère les techniques suivantes :
- le biofeedback;
- le yoga;
- la massothérapie;
- la méditation;
- la respiration profonde.

En outre, faire de l’exercice physique régulièrement (30 minutes ou plus par jour) est une bonne manière d’évacuer le stress et de combattre la constipation.

Pour en savoir plus, on peut consulter notre dossier sur le stress.

Psychothérapie ou thérapie comportementale

Des études ont montré que la psychothérapie et la thérapie comportementale aident à réduire les symptômes du syndrome de l’intestin irritable1. La rencontre d’autres personnes souffrant des mêmes troubles que soi peut aussi aider. Les discussions de groupe et les conseils de spécialistes en médecine comportementale peuvent aider le malade à mieux comprendre son syndrome et à maîtriser peu à peu ses symptômes.

Groupes de soutien

Des organismes sans but lucratif se sont donné pour mission d’améliorer la qualité de vie et le bien-être des individus atteints du syndrome de l’intestin irritable. Ils diffusent des renseignements sur des sites Internet, ils donnent des conférences, ils organisent des rencontres de groupe, etc. Ils permettent aux personnes atteintes de SII de connaître les traitements offerts, de briser leur isolement et de partager leur expérience avec d’autres personnes souffrant de ce trouble. Voir la liste des groupes de soutien à la fin de cette fiche.

Médicaments

Il se peut que certaines personnes aient besoin d’une aide supplémentaire pour que leurs symptômes s’atténuent. Le médecin peut leur suggérer de recourir à des médicaments de synthèse assurant un soulagement immédiat.

  • En cas de constipation : des suppléments de fibres, aussi appelés laxatifs de lest ou de masse (par exemple, Metamucil® et Prodiem®), ou des émollients (qui ramollissent les selles) à base de docusate de sodium (Colace®) ou Soflax®) peuvent aider. S’ils n’ont pas d’effet, on peut employer des laxatifs osmotiques (lait de magnésie, lactulose, Colyte®, Fleet®). Les laxatifs stimulants (Ex-Lax, par exemple) doivent seulement être utilisés en dernier recours car, à long terme, ils peuvent nuire à la motilité de l’intestin.
    Note. Zelnorm®
    . Ce médicament, approuvé en 2002, a été retiré du marché au Canada en avril 20077. Au cours d’essais cliniques, sa consommation a été associée à un risque accru de troubles coronariens. Il était destiné aux femmes qui souffraient du syndrome de l’intestin irritable et dont le symptôme prédominant était la constipation.
  • En cas de diarrhée : Les suppléments de fibres améliorent souvent la consistance des selles en cas de diarrhée. Ils méritent d’être essayés avant d’avoir recours à un médicament antidiarrhéique. S’ils ne soulagent pas la diarrhée, on peut employer des antidiarrhéiques comme le lopéramide (Imodium®, par exemple).
  • En cas de douleur : des antispasmodiques (substances qui combattent les spasmes). Certains ont un effet direct sur la relaxation musculaire, comme le bromure de pinavérium (Dicetel®, par exemple) ou la triméqbutine (Modulon®, par exemple). D’autres agissent indirectement, comme la dicyclomine et l’hyoscyamine. Lorsque ces traitements ne soulagent pas le patient, de faibles doses d’antidépresseurs peuvent être utilisées, car elles peuvent réduire la sensibilité intestinale, particulièrement celle des personnes dont le symptôme principal est la diarrhée.

L’opinion de notre médecin

Vous souffrez du fait que votre côlon est irritable et pourtant on vous a dit que vos tests étaient tous normaux. Comment est-ce possible?

Vos malaises sont dus à un mauvais fonctionnement et à une hypersensibilité de votre intestin. Les tests qui existent ne permettent pas de « voir » ces anomalies; c’est pourquoi leurs résultats sont « normaux ». Mais cela n’empêche pas que vos malaises sont bien réels et qu’ils ne sont pas attribuables à votre « imagination »!

Puisque vos tests seront toujours normaux, il n’est pas nécessaire que vous en passiez d’autres que ceux déjà recommandés par votre médecin. Ce dont vous avez besoin, ce n’est pas de plus d’examens, mais d’un soulagement de vos malaises. C’est là qu’il faut concentrer les efforts.

Bien que plusieurs approches puissent calmer vos symptômes, on ne peut actuellement guérir du syndrome de l'intestin irritable. Il vous faudra donc apprendre à vivre avec lui! La bonne nouvelle, c’est qu’il n’est pas dangereux et qu’il n’entraîne pas d’autres maladies. Et, comme les malaises ont tendance à fluctuer, vous pouvez espérer connaître des périodes où vos symptômes seront moins intenses.

Dr Jean-Daniel Baillargeon, gastroentérologue

Bonne journée,

marie claude

ref: Passeport.sante.net