Soleil orange

Publié le 12 mai 2009 par Alain Hubler

Alors que le ministre de la santé Pascal Couchepin nous entonne le refrain du principe du « pollueur-payeur » appliqué à la santé avec son « ticket modérateur » à 30 balles (on se réjouit d’avance du ticket de rationnement), le médiatissime président du PDC, Christophe Darbellay, envisage dans le dédale de ses circonvolutions cérébrales une variante du soleil vert.

Pour Darbellay, Soleil vert n’est plus tout à fait qu’un film et, du coup, il en est venu à se questionner sur le coût de la mort : « Faut-il débourser 50′000 fr. pour traiter un cancer lorsqu’il n’y a plus d’espoir ou vaut-il mieux développer les soins palliatifs pour alléger les souffrances de la personne concernée ? ». Le démocrate-chrétien avouait le lendemain qu’il n’aimerait pas répondre à cette question si cela concernait un proche, mais cela ne l’empêche pas cependant de se poser la question pour les autres et surtout dans un contexte très précis : dans celui de la réduction des coûts de la santé.

Si chacun a le droit de se poser la question de la souffrance, de la vie à tout prix, de la fin, de la vie et de la mort du point de vue éthique, cela me paraît parfaitement scandaleux de se la poser dans une optique économique. En effet, s’il y a bien un domaine où il est difficile d’abuser – la théorie des « abus » est tellement à la mode – c’est dans mort.

Difficile d’abuser : on ne meurt qu’une fois.

Comme le relève très intelligemment le Dr Jean Martin, président de la Commission nationale d’éthique pour la médecine humaine : « Si le pronostic est très mauvais, c’est au patient et non pas aux médecins de prendre une décision concernant sa propre vie. Pour cela, on doit lui expliquer en toute transparence ce que la médecine peut pour lui ».

Voilà qui est clair et qui a le mérite de respecter l’humain et le corps médical qui n’ont ni l’un ni l’autre attendu le chasseur valaisan pour réfléchir à la fin de la vie.

Un autre aspect de l’interrogation à l’emporte-pièce de Darbellay est la cassure qu’il pourrait provoquer dans la solidarité envers les mourants : en supprimant le droit de choisir, en partie, sa propre mort sur une motivation économique, il instaure une mort à deux vitesses. Celle de celui qui pourra toujours se payer les soins les plus coûteux parce qu’il choisit de souffrir pour espérer et celle de celui qui prendra la direction des soins palliatifs parce qu’il n’a pas les moyens d’autre chose.

Allez ! On va dire que le conseiller national s’est planté en voulant faire du battage politique et qu’il reviendra à des positions un peu plus cohérentes avec celles que son parti défend en matière d’avortement. Des positions souvent discutables, mais parfois très acceptables comme celle de Ruth Metzler qui s’exprimait, en 2003, à propos de l’assurance maternité : « En particulier, nous nous devons de donner une réponse au phénomène profondément choquant des avortements liés à une précarité économique. »

À moins que cette avalanche d’idées destinées à maîtriser les coûts de la santé et touchant prioritairement les plus démunis ne soit qu’une étape de plus vers la décroissance de la solidarité que certains finiront bien un jour par justifier au nom du « développement durable ».

Pour conclure, Monsieur le président d’un parti bourgeois et conservateur, il est où le problème de la croissance des coûts de la santé ? Elle vient d’où cette aversion soudaine pour la croissance que, d’habitude, vous et vos acolytes glorifiez ?