Les Juifs de l’équipe de nuit restèrent à côté
Jusqu’à ce qu’ils entendent, « Juifs, aux wagons ! »
Et alors, frappés et insultés, ils entrèrent dans les wagons
pour sortir les morts.
Dedans, il faisait très chaud, et étouffant,
et au moins quatre de l’équipe travaillaient dans chaque wagon.
Comme toujours, des S.S. marchaient près de là avec leurs pistolets chargés
pour tirer sur ceux qui étaient trop faibles pour grimper les marches qui montaient dans les fourgons.
Et un de ceux de l’équipe de nuit
vit une petite fille de dix ans environ
qui venait d’un tas de corps morts
et qui se mit à marcher faiblement –
un S.S. l’abattit d’une balle dans la nuque ;
il vit un petit garçon,
à moitié nu,
assis tranquillement au milieu du chemin.
Le S.S., chef de son groupe –
les Juifs entre eux l’appelaient « grand-père »
parce qu’il était assez âgé –
essaya d’abattre le petit garçon d’une balle dans la nuque.
Le petit garçon tourna la tête
et il était sur le point de dire les deux premiers mots de la prière orthodoxe que disent les Juifs près de mourir
quand il fut tué,
et son corps jeté sur un des camions.
Un Juif de la même équipe
vit son frère parmi ceux qui arrivaient
et supplia le chef des S.S.
de laisser son frère venir au camp, et vivre
au lieu d’aller droit aux chambres à gaz.
Le commandant S.S. écouta avec indifférence
et puis dit,
« Tu peux partir avec lui si tu veux ».
Charles Reznikoff, Holocauste, traduction d’Auxeméry, Prétexte Éditeur, 2007, pp 62 et 63
attention le livre ne sera en librairie que le 12 octobre
lire la présentation du livre ici
Bio-bibliographie de Charles Reznikoff (1894-1976)
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