Quelques indicateurs montrent un nouvel appétit pour le risque.
Tout d'abord, la volatilité implicite des options a nettement baissé. Cet indicateur est le VIX, calculé par le CBOE sur les options sur l'indice SP500 à Chicago; son équivalent parisien est le VCAC, calculé par Euronext-LIFFE sur les options sur l'indice CAC 40. Il mesure la volatilité implicite des options à parité, ou proche de la parité, pour différentes échéances, c'est-à-dire le niveau de volatilité utilisé par le marché pour aboutir au prix coté des options, selon la formule standard d'évaluation de Black-Scholes. Classiquement, la volatilité implicite augmente très fortement dans les périodes de baisse brutale, et a tendance à diminuer quand le marché remonte. Au plus fort du krach en octobre, le VIX a atteint 88, pour redescendre vers 40-45 en début d'année. Il est maintenant revenu sous 35. Plus il est élevé, plus le coût des couvertures est cher. Rappelons cependant qu'au début 2007, le VIX s'établissait entre 10 et 15. La situation actuelle est donc loin d'être normalisée.
Deuxième indicateur, le prix des CDS, credit default swaps, sur les obligations d'entreprises. L'indice Itraxx crossover, qui mesure les CDS sur les obligations européennes de bonne qualité, s'est fortement détendu en avril, passant de 950 au plus haut à 750. Là aussi, cela nous montre que le coût de la protection contre le risque de défaut des obligations corporate a quitté les niveaux extrêmes qu'il avait atteint en début d'année, sans revenir pour autant, et de loin, aux niveaux qui prévalaient avant la crise.
Dernier point, la remontée des taux des emprunts d'Etat, le T-bond 10 ans US offrant maintenant un rendement de 3,30% alors qu'il avait frôlé 2% en décembre 2008, témoigne que le risque de déflation s'atténue, et que les marchés commencent tranquillement à prendre en compte les tensions inflationnistes qui ne manqueront pas de se produire au sortir de la récession.
Pour reprendre l'expression de Ben Bernanke, les bourgeons de la reprise font leur apparition. Plus précisément, le rythme de la récession diminue : c'est pour le moment le degré 2 de l'activité économique, le moment 2, qui montre des signes d'amélioration : ce n'est pas encore la reprise, même si les marchés y croient, certainement à raison.
Si l'on regarde les profits opérationnels anticipés sur les 12 mois à venir pour les entreprises du SP500, tels qu'ils sont compilés par Edward Yardeni, on voit en effet que la tendance est toujours à la baisse, avec une pente cependant plus réduite. En l'espace de 18 mois, le niveau de résultat anticipé du SP500 est quand même passé de 130 au point haut d'octobre 2007, à presque 60 maintenant. En terme de valorisation, cela veut dire que depuis 2 mois, le PER du marché US est remonté de 9,5 à 14, soit presque le niveau qui prévalait avant la crise.
L'optimisme du marché ces dernières semaines s'est manifesté par sa tendance à réagir positivement aux bonnes nouvelles, et à rester indifférent aux mauvaises, ce qui est un signe très clair d'un retournement de la psychologie des opérateurs. Les comparaisons avec la période identique de 2003 sont fréquentes : en 2003 le marché avait remonté fortement, après le déclenchement de la guerre d'Irak, sans faire de retracement significatif. La différence en 2009 est que les anticipations de résultat des entreprises sont toujours baissières, et que la récession est bien installée.
Il y a 2 ans à la même époque, j'écrivais un post qui expliquait que le risque avait disparu, en fait qu'il n'était plus valorisé par le marché. Aujourd'hui, on a quitté les niveaux extrêmes du début de l'année, mais le risque coûte encore cher. Cela a du sens : écoutons ce que nous disent les marchés sur le prix du risque. Il convient de se garder du retour de l'optimisme béat, surtout après 8 semaines de hausse ininterrompue des indices boursiers.