Je descends un petit escalier pour atteindre le sous-sol.Les marches sont en faux marbre et sur les murs un papier peint atténu la lumière du jour. Il y a là l’ancienne chambre de la soeur restée intacte. Elle vient un week-end sur trois. Elle dit bonjour. Elle voit ses amis, dit très peu de choses et continue sa vie. Sur la gauche, un petit réduit dans lequel la mère range des ustensiles et des produits nettoyants. Sur la droite, une porte souvent entreouverte donnant sur une pièce plus grande que la précédente. On entre. On y jette un regard. L’espace est plongé la plupart du temps dans une luminosité grise provenant de petites fenêtres occultées. L’atmosphère est humide et sent le renfermé. Sans doute, la poussière s’est-elle accumulée lorsque ce lieu fut inhabité ces cinq dernières années. Il y a un poster représentant Manhattan la nuit, une table en faux bois, un énorme fauteuil vert pomme et un lit. Les objets semblent avoir été entreprosés là plutôt que disposés pour aménager une chambre.
Le corps semble inerte. Une légère respiration pourtant s’élève du ventre. Le soulevement est lourd, irrégulier, comme s’il venait d’un autre lieu, d’un autre corps. Les yeux sont ouverts, humides. C’est une enfant a la peau blanche, lisse, ces yeux ont été creusé par ces derniers mois. Elle est épuisée. Des rides minuscules apparaissent. Elle ne bouge pas, mais elle ne se repose pas non plus, elle est immobilisée plutôt qu’immobile. On ne sait pas ce qu’elle pense. On ne veut pas l’imaginer. On la voit simplement ici pour la dernière fois, seule et malheureuse, arrachée à un espace qui n’était pas le sien et ramenée à cet espace familial qu’elle avait quitté voici plusieurs années. Elle ne veut plus de sa vie.