Les électeurs français déserteraient le scrutin européen du 7 juin 2009. Les chroniqueurs plus ou moins influents sortent casseroles et cymbales. Juchés sur leurs certitudes, ils amorcent un tintamarre pour pousser le citoyen jusqu’à l’isoloir. Peu avare de péroraisons pontifiantes, les “sachants” informent que le vote est un droit, mais surtout un devoir. Les nouveaux gardiens du temple s’emparent d’une mission sacrée, la démocratie en dépend. L’objectif est que l’urne soit pleine jusqu’au débord s’il faut. Il y a bien longtemps que le train Européen est lancé sans qu’il puisse ni s’arrête, ni même changer de rail. Une pantalonnade pour “baltringues” qui n’a que trop durée.
Cela fait trente années que les zélateurs bruxellois vendent des symboles lénifiants et infligent par la bande la concurrence et la dérégulation aux populations européennes. C’est sous prétexte de paix, d’un hymne grandiloquent et de fausses valeurs confraternelles, que la technocratie européenne a organisé la désindustrialisation des états membres, a encouragé le dumping fiscal et social. La CECA (Communauté européenne du charbon et de l’acier) de 1951 est l’acte fondateur de la coopération continentale. Cinquante ans plus tard, les “métallos ” de Gandrange peuvent juger sur pièces, sur les mesures de “L’ode à la joie”, des prouesses de leur secteur industriel.
D.Cohn-Bendit, europhile peu convaincant, développe la relativité démocratique de l’Europe aux futurs (non) électeurs lors d’un débat à la Maison de la Chimie le 30 avril 2009. L’ancien libertaire, aujourd’hui libéral, défend l’idée d’une démocratie européenne équilibrée prenant en compte toutes les spécificités internes à chacun des membres. En réalité, un moins-disant représentatif comme consensus. Tout en gouaille, il veut convaincre que la machine technocrate est la “moins mauvaise possible”. Aussi, il oublie scrupuleusement de mentionner les très influents lobbys libéraux enkystés à Bruxelles. Ce système technocratique fantasme une démocratie. De fait, elle n’existe pas. Les cabris illuminés comme B.Guetta ou J.Quatremer euphémisent en évoquant une démocratie “lointaine”.
Le marketing électoral organise une vaste farce truffée de communication et promesses dont la finalité est de ramasser une majorité minimum pour imposer, écoutilles fermées, un programme (aussi inepte et destructeur qu’il puisse être) ; “Démocratiquement”. Le président français pérore “l’important dans la démocratie c’est d’être regardez Berlusconi il a été réélu trois fois”. En France, les députés et sénateurs réunis en congrès ont infligé le traité de Lisbonne aux Français. Le président plastronne en sauveur de l’Europe en refourguant ce fadasse ersatz de TCE. Dans les démocraties occidentales modernes, que ce soit sur des lois nationales (HADOPI, OGM…) ou sur des traités internationaux (TCE, refus Danois et Irlandais…), soit on réitère le vote jusqu’à l’obtention du résultat souhaité, soit on confie la validation à une “représentativité” plus serviable.
Les catéchistes du scrutin bien planqués derrière leurs certitudes (et souvent leurs statuts) peuvent tranquillement exhorter les bonifaces à se déplacer “pour-remplir-leur-devoir-de-citoyens”. À ceux qui objecteraient, les cyniques comme A.Minc vocifèrent contre l’antiparlementarisme et le populisme. D’autres, plus misérables encore et pas à une contradiction près, invoquent le sang versé pour l’obtention de ce droit. Alors, il faut voter, pour le PS, l’UMP voire le MODEM. Vote témoignage dont les conséquences n’ont aucune incidence visible et positive sur la vie quotidienne de ceux qui ramassent les miettes. Vote qui n’a d’intérêt que dans l’importance du taux de participation. Ce fondement de la démocratie est transformé en thermomètre plébiscitaire. L’alternative est alléchante, donc : ne pas voter c’est faillir à ses devoirs et laisser les autres décider ; voter c’est donner son assentiment à des réformes déjà programmées. C’est dans ce contexte que les précepteurs de vérités intangibles inculquent leurs morales “démocratiques” au troupeau égaré de renâcleurs. Le peuple ira ou n’ira pas, et c’est son droit, son choix. Les recalés de la mondialisation heureuse n’ont pas besoin de la pathétique danse du ventre des moralisateurs “concernés” qui se fourvoient si régulièrement, si largement.
Vogelsong – 6 mai 2009 – Paris