Il reste moins d’un mois avant le scrutin des élections européennes et la chape de plomb qui entoure la campagne ne parait pas vouloir se lever.
Pour le citoyen de base qui regarde la télévision, écoute la radio et lit la presse nationale seuls deux « leaders » trustent et crèvent les écrans et les Unes : Nicolas Sarkozy et François Bayrou ; pour le premier c’est logique puisque c’est le chef de l’état et que nous sommes en période de crise, même s’il recoiffe sa casquette de patron de l’UMP (c’est de bonne guerre et ses prédécesseurs on fait de même) ; pour le second, le Poulidor de la politique, cela l’est moins, sauf si on le considère comme un faire valoir, un peu comme l’a été Ségolène Royal il y a deux ans…
Alors, pourquoi ce grand silence, cette volonté non déclarée de pourrir la campagne en ne la laissant pas suivre son libre cours ?
On ne peut, raisonnablement, y voir un complot entre les deux anciens grands partis, UMP et PS, avec la complicité des médias, même si la théorie récurrente du complot est séduisante …
Non, il faut peut être plutôt y voir l’effet pernicieux de ce fameux réflexe pavlovien qui fait croire qu’en voilant le débat on espère qu’il n’a pas lieu d’être ; on espère en persuader les électeurs et s’en persuader soi même..
Que va-t-il se passer ?
Si la campagne ne démarre pas, son résultat va aller au-delà des attentes de deux qui la mettent sous le boisseau :
Faute d’un accès réel aux programmes des différentes listes, aux différentes sensibilités qui sont comme autant d’attentes des français; faute d’un véritable débat qui permette aux électeurs de s’informer sur la réalité du fonctionnement de l’Europe, sur ses disfonctionnement, sur les options possible pour l’améliorer et la mettre en phase avec nos souhaits et nos inquiétudes, on va s’acheminer vers un vote qui d’européen va devenir national :
Pour ou contre Nicolas Sarkozy ; pour ou contre sa gestion de la crise, pour ou contre la paupérisation de la société française, et même pour ou contre le chômage, pour ou contre tout et pour ou contre son inverse, avec le risque ultime d’un évènement important, relevant bien souvent du fait divers et qui influera, au dernier moment, de façon décisif sur le vote et … l’abstention.
Pire qu’un jeu de poker, c’est à une véritable partie de roulette russe que se livre nos dirigeants politiques!
Ceux du parti au pouvoir risquent un vote sanction sans commune mesure avec les réels résultats de la politique du gouvernement et se mettent en situation de se prendre la balle entre les deux yeux…
Ceux de l’opposition, en l’occurrence le PS, risquent un vote de défiance du à leur manque de lisibilité et s’exposent à prendre leur propre balle derrière la tête..
Celui, placé en embuscade, tel le Modem, n’ayant pas de balle dans son barillet, ne risque pas la mort subite, mais la décrédibilisation publique, par l’absurde de sa politique du coucou…
Ces « grands partis » ne sont pas idiots, bien sur, et s’ils misent sur cette stratégie du « banco », c’est parce que leurs énarques stratèges jouent sur l’abstention et sur le grands nombre de listes, certains d’être les seuls à atteindre cette fatidique barre des 10%, seuil pour être élu à Strasbourg et se moquent, comme de leur première chemise, d’envoyer au parlement européen des députés élus par seulement 10% de 40%, voire 30% des suffrages exprimés, c'est-à-dire en réalité 3à 4% de l’électorat. Ce déni du plus élémentaire civisme républicain risque de leur couter cher !
Cher en crédibilité et peut être aussi cher dans l’urne !
Alors qui gagnera ces élections européennes ?
Peut être l’ultra gauche dont le but statutaire, et c’est un comble, est la destruction de toutes nos institutions et de notre société…
Peut être, la multitude des autres listes de droite et de gauche, mais leur grand nombre ne leur permet pas d’espérer une représentation à Strasbourg.
Peut être le MPF mais son souverainisme s’accorde mal avec ses alliances au sein du mouvement Libertas qui brouillent son message ; ses électeurs voyant mal ce que vient faire là dedans (la souveraineté de la France), l’Italie et l’Irlande pour ne parler que des plus fréquentables.
Probablement Debout La République qui apparait de plus en plus comme un sursaut républicain rassembleur, mais sa jeunesse politique et l’omerta médiatique entravent lourdement sa communication, même s'il y a quelques exceptions locales
Qui gagnera les élections européennes si la campagne ne démarre pas réellement, si le débat n’a pas lieu ?
Certainement l’abstentionnisme.
Certainement pas les Français et encore moins l’Europe !