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Internet, panacée de la politique ?

Publié le 10 mai 2009 par Chezfab
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Ce billet naît d'une remarque faite par un ami. En effet, il m'affirme que "tout se passe sur internet aujourd'hui, celui qui gagne les élections a gagné avant le net et il faut se concentrer là dessus, c'est le plus important !" (comme je sais qu'il lit ces lignes, il se reconnaîtra !

Et bien, pour moi, cette affirmation est non seulement fausse, mais en plus elle découle d'une forme de mort de la politique.

Internet est un outil, comme les panneaux d'affichage

Il serait peut être temps de se rendre compte que ce que nous appelons les réseaux sociaux ne sont que des bars virtuels, l'alcool en moins. A aucun moment ils ne sont des produits de création directe de contenu politique (dans d'autres domaine, c'est différent). Il n'est pas encore apparu d'espace réellement fondateur totalement virtuel.

Là où l'assemblée de personne arrive parfois à faire émerger un texte ou un programme, c'est impossible via internet. D'abord par le fait que nul ne s'arrête jamais derrière son écran. La protection offerte par celui ci est propice à l'excès, souvent de confiance en soi, qui entraîne donc une frivolité des débats, rapidement.

En prime, la temporalité est bouleversée. Personne ne cherche à comprendre le temps de l'autre. Dans une réunion, nous arrivons à nous dompter par le fait que le temps est compté. Nous devenons, souvent, plus synthétiques et directs du coup. Cela est un gage d'efficacité finalement.

Même si les listes de discussion sont un bon moyen d'échanger, elle ne doivent pas rester le seul, par exemple.

Au final, aujourd'hui, internet est plus un tableau d'affichage d'opinion qu'un lieu de convergence (ce blog en est une preuve d'ailleurs).

Internet, c'est l'accès à tous !

Voilà une affirmation bien fausse. L'internet c'est avant tout l'accès à une classe moyenne et aisée qui a du temps. C'est aussi de fait l'exclusion de tous ceux qui ne se servent pas de cet outil pour divers raisons (âge, manque de moyens, pas envie, etc...). De fait, internet est excluant plus qu'autre chose du point de vue de l'accès à l'information politique.

Du coup, en pensant "toucher tout le monde", les fous d'internet comme outil ultime en oublient qu'ils finissent par réduir le champ politique à un cercle non représentatif du peuple. Et du coup tendent sans réellement le vouloir à aller plus vers la ploutocratie que la démocratie.

Là où ils ne voient que progrès, ils oublient la fabuleuse machine à exclure du débat que peut devenir internet. Et oublient donc que la politique s'adresse à tous.

Obama a gagné parce qu'il a su gagner internet

Cette vision est très faussée. Encore une fois, de par une forme d'admiration de ce qui vient des USA (et qui aurait donc vingt ans d'avance), nous transférons la victoire d'Obama sur le net, laissant croire que les réseaux sociaux virtuels ont été la seule raison du succès.

C'est oublier un peu vite qu'au contraire Obama s'est appuyé sur du relationnel humain. Internet n'était qu'un vecteur, rien de plus. Ce sont bien les milliers de réunions d'appartement, de journées de porte à porte, de meeting et autres qui ont portés leurs fruits.

Internet n'était pas la raison de la victoire mais l'un des outils de celle ci. Mais le message a été démultiplié en premier lieu par les partisans d'Obama, par de l'humain et pas seulement du virtuel. C'est bien cela qui fit la différence avec ses adversaires qui eux sont restés sur du traditionnel (internet,télévision et meeting de masse).

Nous ne pouvons pas assimiler la victoire d'Obama avec une victoire du monde virtuel. Elle est au contraire une victoire du "réseau social" humain et réel. Du contact et de la mise en lien de personnes entre elles.

En France, cela ne prend pas vraiment

Nous pouvons le noter, en France le social numérique ne prend pas vraiment. Enfin si, dans une "caste" (dont je suis) qui a les moyens et le temps, mais il n'irrigue pas, loin de là, la population complète.

Désir d'avenir, le site de Ségolène Royal en fut un bel exemple. Il n'a pas réuni tant de monde que cela. Il en va de même avec le pacte de Nicolas Hulot (moins de 750 000 signatures) et la campagne actuelle, misée en grande partie sur le net, d'Europe Ecologie (moins de 11 000 signatures à l'heure qu'il est, un mois avant l'élection européenne).

Ces exemples sont une démonstration vivante que la politique (ou l'action citoyenne) ne peut être virtualisée totalement. Mais surtout le risque est qu'en la virtualisant de trop, elle s'estompe et disparaisse.

Et notons aussi que, souvent, ces tentatives sont plus de l'ordre de "tous derrière un leader" que de la construction globale.

Revenir aux fondamentaux

Comme tout nouveau médium, internet a donné lieu à une forme d'engouement énorme. D'un coup une sorte de Graal aurait été découvert, le monde allait se trouver transformer (ce qui est vrai dans une certaine mesure) et donc la politique aussi.

C'est faire peu de cas du fait que la politique c'est avant tout des idées et que de fait elles se doivent avant tout d'être comprises, pour être portées.

Là où internet est un outil fascinant, c'est dans sa capacité à toucher un grand nombre de personnes, en peu de coût et de temps. Mais là où le bas blesse, c'est que dans le même temps il en exclut plus qu'il n'en fédère (car même au sein de ceux qui ont internet, combien lisent autre chose que ce qu'ils auraient lu ailleurs ?).

Le politique doit donc retrouver du sens, revenir au tissage de liens humains. Nous ne devons pas nous reposer sur des lauriers numérique en pensant que cela suffit.

Il nous faut reprendre au départ (tout en ajoutant l'outil internet) : tractage, porte à porte, réunion d'appartement, etc... Et surtout, capacité à porter ses convictions personnelles !

Se limiter à du contact virtuel, c'est laisser la politique loin du peuple, mais proche des ploutocrates qui n'attendent que cela.


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