C’était difficile, j’en conviens, d’identifier l’ouvrage d’Amrita Pritam, cette Indienne née en 1919, disparue en 2005, qui a vécu la partition entre l’Inde et le Pakistan et l’a racontée à travers la fable de ce petit roman intitulé “Le squelette”.
Paru dans la collection “ Grains de riz” , -une si jolie collection des éditions KailasH, au toucher rêche comme un grain non poli- “Pinjar, le squelette”, est l’histoire de Pouro “dont le nom dit la plénitude”. Jeune Hindoue du Panjab occidental, enlevée en 1930, à la veille de son mariage par un musulman cherchant à venger ses ancêtres d’une lointaine humiliation, Pouro poursuit un chemin inattendu jusqu’au déchirement de la partition de l’Inde en 1947.
Dans un contexte historique imposant une forme de récit qui n’a rien à envier à la plus pure tradition picaresque faite de rebondissements, de violences et de souffrances accumulés, le texte irradie cependant d’une immense douceur rendue par l’écriture sobre, retenue, poétique d’Amrita Pritam.
Saisissant contraste entre les combats inter-culturels et politiques de l’époque répercutés dans les actes de la vie familiale et la pérennité des gestes entretenant la vie: la cueillette des épinards, les petits pois écossés, l’évocation de l’eau, du lait! Paradoxe des sentiments où l’amour et la haine ne se distinguent plus, où le ressentiment et la tendresse s’anihilent.
Un magnifique portrait de femme mais aussi, un non moins magnifique portrait d’homme, tout en nuance, celui de Rashida. C’est lui qui a enlevé Pouro. Lui qui en est tombé amoureux et qu’elle est obligée d’épouser. Lui, qui enfin, transgresse tous les clivages et tabous de son environnement…Curieux roman, loin des clichés et de tout manichéisme. Minuscule, mais très grand livre!