9 mai 2009, journée de l'Europe. Petit hommage...
Il y a un an jour pour jour, j'assistais à deux événements majeurs à Strasbourg :
- la sortie du livre de Daniel Riot, L'Europe cette Emmerdeuse, qui donnait lieu en ce jour à un débat à la librairie Kléber.
- le blog Relatio de Daniel Riot devient un vrai web-magazine européen : Relatio- Europe, inauguré à la mairie de Strasbourg par Jacques Delors
Ce fut une belle journée, on parla d'Europe pendant des heures, et même mieux, on fêta l'Europe, sans s'en tenir à des termes techniques auxquels la majorité reste hermétique... j'avais écrit un petit billet-souvenir : ici
Aujourd'hui, en ce jour anniversaire de la sortie du livre et de la naissance du site internet, Daniel Riot n'est plus là pour fêter l'Europe. Mais ses écrits restent, l'occasion pour moi de reproduire un extrait de l'Europe cette emmerdeuse, p34 :
A la question de Sandrine Kauffer "L'Europe pour vous ne se réduit pas à l'Union Européenne et la mécanique communautaire vous intéresse comme moyen, non comme fin" ;
Daniel Riot répond : "Absolument. Je regrette d'ailleurs que l'on réduise l'Europe à l'Union. L'Europe? C'est l'espace du Conseil de l'Europe, c'est l'euro-Méditérranée, c'est l'Eurosphère. Et l'actualité européenne n'est pas celle des institutions et des organisations.
C'est celle de la vie intérieure des pays qui composent l'Europe, des réseaux scientifiques, culturels, artistiques, sociaux, pédagogiques, juridiques, associatifs, humanitaires qui tissent cette toile qui ne sera jamais achevée, des villes et des régions, des théâtres, des ateliers d'artistes et des orchestres, des bibliothèques, des musées, des femmes, des hommes et des enfants...
Romano Prodi a dit un jour : "Après l'Europe constituée, il faudra constituer l'Européen." Erreur. C'est l'Européen qui doit avoir dès auourd'hui - qui aurait dû déjà avoir - les moyens de se forger, de faire émerger, en lui, une identité européenne. Philippe Sollers dit vouloir inscrire sur sa tombe : "Philippe Sollers, écrivain, Européen d'origine française." C'est cela se sentir Européen, et cette affirmation n'est ni en contradiction ni en concurrence avec la nationalité ou l'enracinement dans un terroir. Européen parce que Français, en ce qui me concerne. Et Français parce qu'Alsacien d'origine franc-comtoise".
Quelques pages plus loin :
"[...] la confrontation des expériences, le "limage des cervelles", la comparaison des idées favorisant l'émergence des solutions les plus adpatées aux problèmes à résoudre. C'est l'harmonisation par le haut. Ce qui est vrai au niveau des Etats l'est aussi à l'échelon régional et local. L'emmerdeuse a une série de vertus dont on prend très vite conscience quand on prend la peine de travailler, de légiférer, de réfléchir en tenant compte de la dimension européenne.
[...] la démarche européenne exige un certain courage mental. Il faut sortir de soi-même, de ses référents, de ses habitudes - de sa langue - pour rencontrer les autres, apprendre au contact des autres, élargir son champ de vision. Si l'Europe apparaît comme une emmerdeuse, c'est parce qu'elle se pose, concrètement, dans un de ces carrefours où se nouent et se dénouent les relations complexes entre l'identité et l'altérité. L'unification européenne, c'est davantage qu'une entreprise : c'est un voyage... à l'intérieur de soi-même ."
Parler d'Europe pour faire aimer l'Europe, parce qu'elle concerne notre quotidien, c'est la vocation de cette journée du 9 mai, et ce fut la vocation de l'engagement de toute une vie de Daniel Riot.