Roman -340 pages
Une lecture vraiment agréable, surprenante, grave parfois, avec ce style fluide et les dialogues noyés dans le récit. Magnifique, terrifiant peut-être si on le lit sous un autre angle, sous celui de la nécessité de l'oubli. Editions Actes Sud - janvier 2007
Editions Actes Sud Babel - juin 2008
1988. A 25 ans, Marie vient de décrocher un emploi dans une société de production. Cela se fête et lors de cette soirée elle rencontre un charmant Pablo. Oui mais là nous sommes en 2000, Marie a 32 ans et elle se réveille dans une maison qu'elle ne connaît pas, aux côtés d'un mari (n'est-pas ce Pablo rencontré la veille ?) et d'enfants qui apparemment sont les siens. Elle n'a aucun souvenir de ces 12 dernières années et cache son amnésie à sa famille... Alors il lui faut réapprendre à s'adapter à un quotidien inconnu, en tentant de découvrir son propre passé par les indices que laisse çà et là l'entourage...
Le parti pris est assez fou ! Quand l'histoire débute, il y a de quoi être sceptique sur l'avancée du roman qui est ainsi bâti sur une base assez irréaliste. Et bien, force est de constater que Frédérique Deghelt nous embarque complètement dans cette vie d'amnésique, avec cette progression à tâtons, cette (re)-découverte des gens, des endroits, des situations. Les activités que Marie avait hier, elle ne sait plus les pratiquer. Les différends qu'elle pouvait avoir avec certaines personnes, elle doit les jouer et les comprendre...
"Nous sommes déjà mariés, souviens-toi. Mais oui, je veux bien t'épouser à nouveau. Bonne journée, ma fiancée.
Je raccroche. Alors c'est vrai, nous sommes déjà mariés ! Madame... Comment m'a-t-on appelée déjà ce matin ? Un nom horrible. Il faut décidément que je m'attaque aux albums photo. Et à propos, où est mon alliance ? Rien... Cette accumulation de sourires, de vacances, d'anniversaires, d'expressions ne m'évoque rien. J'ai beau attendre à chaque page un choc, une ombre, un fil à tirer pour que vienne le reste, c'est l'album de photos d'une étrangère que je feuillette avidement. Un double de moi-même sourit, boude, s'appuie sur des épaules inconnues, porte des bébés, pose aux côtés de certains copains de toujours (quelques-uns ont vieilli), fait coucou aux côtés de... [...]
Tous ces albums sont en résumé l'histoire de la vie d'une folle. Et la folle, c'est moi. Aucune photo de mariage ne fait son apparition dans cette vie colorée. Il n'y en a pas non plus dans l'appartement. Je constate donc avec plaisir que même douze ans après, j'ai toujours horreur des salles à manger ou chambres où, immanquablement, sur une des tables, trône l'évidence arrêtée d'un couple souriant dans la blancheur immaculée de son union. L'horreur conjugale encadrée ! Le téléphone sonne à nouveau."
Cet oubli, cette amnésie involontaire, c'est tout de même le cerveau de Marie qui l'a provoqué. Quel évènement a-t-il pu déclencher cet oubli soudain ?
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