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Pour connaître Nina Berberova

Publié le 08 mai 2009 par Irigoyen
Pour connaître Nina Berberova

Pour connaître Nina Berberova

Si tous les chemins mènent à Rome, de nombreux chemins littéraires mènent à Hubert Nyssen. Que saurions-nous en effet de Nina Berberova si celui-ci n'avait pas, à la suite d'une rencontre avec cette femme – voir chronique précédente –, décidé d'éditer ses livres ? La traduction et la publication de L’accompagnatrice par Actes Sud fit en effet découvrir Nina Berberova en France. Tous ses livres sont d’ailleurs publiés chez l’éditeur arlésien.

Rappelons que Nina Berberova est née en 1901 à Saint-Pétersbourg, une ville où elle est enterrée – cimetière Notre-Dame de Tikhvine -. C’est en 1923 qu’elle vient en France et débute une œuvre romanesque. Elle se rend ensuite aux Etats-Unis - elle pend la nationalité américaine – où elle écrit, toujours sans le moindre succès, jusqu’à ce qu’elle rencontre donc Hubert Nyssen, l’homme qui lui apporte la gloire.

Pour ceux d'entre vous qui ne connaîtraient pas Nina Berberova, je vous recommande vivement le  DVD du documentaire réalisé par Jean-José Marchand et Dominique Rabourdin, édité en 1989 chez 10 francs, et que je me suis procuré à la médiathèque André Malraux – cet espace abrite décidément des trésors ! -.

L’intérêt du documentaire ne tient pas vraiment dans l’originalité du tournage et du montage – il s’agit d’un DVD de 104 minutes, en deux parties, composé essentiellement d’une interview en longueur de Nina Berberova et de quelques images d’archives – mais plutôt dans le fait que cette femme nous conduit dans le monde de l’émigration russe.

Je me souviens qu’Hubert Nyssen m’avait dit, à propos de Nina Berberova qu’elle avait la voix d’une Elvire Popesco. Et c’est d’emblée ce qui frappe ici quand elle commence à évoquer sa mère russe, son père arménien, sa naissance « dans la même rue que Vladimir Nabokov » – dont la presse nous annonce d’ailleurs la prochaine publication d’un inédit, conservé par le fils de l’auteur -.

« Je ne suis pas un roc, je suis un fleuve » dit un moment Nina Berberova. La phrase assoit d’emblée le personnage qui, à ce moment précis, fait figure de statue du Commandeur.

Le documentaire est ponctué d’extraits lus par Marie-Armelle Deguy. Moments délicieux qui permettent de tenir en haleine le téléspectateur et lui donnent envie d’en savoir un peu plus sur cet étrange petit bout de femme mêlant fragilité et fermeté.

Berberova parle donc. De sa gouvernante, de son père qui travaillait pour le ministère des finances du Tsar, de sa courte carrière cinématographique, de sa liaison avec Vladimir Khodassevitch, le Baudelaire russe…

Pour connaître Nina Berberova

… comme le surnommait alors Gorki.

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On apprend que le couple put se rendre à Berlin, muni d’un fameux « passeport rouge » que Lénine, par décret, avait autorisé à délivrer aux Russes souhaitant aller à l’étranger pour des raisons de santé ou éducatives, sésame accordé pour trois ans seulement.

Nous « suivons » le couple qui s’établit dans la capitale allemande avant de quitter les lieux à cause de la crise économique, « parce que le Mark ne vaut alors plus rien ».

La deuxième partie, intitulée « L’allègement du destin » est encore plus passionnante car elle évoque la période de l’émigration allant de 1925 à 1939. Où l’on apprend que les exilés russes, qui avaient leurs propres journaux, n’étaient pas un bloc monolithique. Nina Berberova évoque en particulier Zamiatine qui fut insulté par les intellectuels français alors aveuglés par leur amour pour la « grande révolution soviétique ».

Le documentaire évoque aussi les années américaines. Berberova, qui fut refusée par les éditions Belfond, enseigna à l’université de Yale puis de Princeton.

Une vie extrêmement riche donc et reconstituée dans un rythme lent mais ô combien nécessaire pour donner envie au téléspectateur de se procurer l’intégralité des œuvres de Nina Berberova ! Pas étonnant qu’elle ait tant frappé Hubert Nyssen à qui il faut rendre ici un nouvel hommage.

Décidément !


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