Marketeurs malgré nous

Publié le 16 septembre 2007 par Alice Blondel
Vous vous souvenez la dernière fois que j’ai râlé parce que j’avais été utilisée « à l’insu de mon plein gré » ? C’était pour avoir participé au viral de la pub Peugeot … On jouait sur l’envie de chacun d’entre nous de donner son avis sur toutes choses, et surtout les actions de nos marques préférées, mais à ce stade on en était à la diffusion du message à un plus grand nombre de personnes possibles via les internautes et bloggers.
Et puis j’ai vu passer – et entendu beaucoup à la radio – la campagne du Crédit Mutuel, qui nous demandait à tous nos envies pour créer ses prochains produits et services ! Cette campagne habilement nommée « Si j’étais banquier » m’avait fait « tilter ». D’abord parce que j’ai été formée par une mère consumériste à me méfier des banques et de « leur marketing si habile à embobiner leurs clients ». Ensuite parce que je me suis dit que pour une fois c’était une démarche « customer oriented » et que ça voulait dire qu’ils voulaient réellement écouter leurs clients (ou qu’au moins ils faisaient semblant) . Ca pouvait peut-être générer des innovations intéressantes et en tout cas ça mobilisait à l’avance l’intérêt des clients potentiels sur ce qu’allait leur proposer le Crédit Mutuel par la suite. Donc Ecoute Client, « brand awareness » et tout et tout …la recette n’était pas mal du tout. Et on parlait carrément de concevoir le produit, pas seulement d’en parler !
Et bien je viens de découvrir , grâce à Marketing Magazine n° 115 de septembre et les toujours géniales pages de Brice Auckenhalter, que cette démarche-là s’appelle du CACO (Conception Assistée par Collaborateurs ou Consommateurs) . Comme le dit Brice himself : «Le CACO invite collaborateurs et clients à inventer des offres dont ils seront les ambassadeurs. Bienvenue à la génération Ikea ou nous jouons au Design, au Marketing, à la Pub , et faisons le travail « à l’insu de notre plein gré » «
Et effectivement il donne quelques exemples, dont la campagne lancée par Doritos pour « créer le buzz » autour de son nouveau produit et surtout lui trouver un nom ! En lançant les premiers paquets de Doritos X13D sur E-bay , avec un paquet noir et un nom de code , en invitant les consommateurs à jouer en devinant le goût (cheeseburger !!! (sick ! pardon sic) ) pour devenir des « Doritos tasters » et gagner un an de chips gratuites, puis en les invitant à proposer des noms pour le nouveau produit, ils ont vraiment joué sur tous les tableaux !
Au-delà de l’info de Marketing Mag, il s’avère que cet événement a fait beaucoup parler, dans les chaumières marketing et les autres ! Certains ont commenté l’opération, d’autres le goût du produit même (de « C’est dégueulasse » à « c’est pas mauvais ») et certains ont même appelé au secours pour en trouver !!!Si ça ne s’appelle créer la demande, je change de métier !
Finalement Knorr qui avait appelé ses consommatrices à proposer leurs recettes ne faisait pas autre chose. Et la RATP s’y met aussi.
Donc finalement la CACO, c’est à la fois de l’Ecoute Client et de l’opportunisme, et un effet de buzz formidable quand la mayonnaise prend. Alors est-ce la solution pour les entreprises en mal d’inspiration et d’innovation, est-ce enfin le signe que l’on va vraiment écouter le client ? Je doute de la réponse dans les deux cas :
D’abord parce qu’il n’est pas sûr que l’innovation, notamment la vraie, celle de « rupture véritable », vienne des consommateurs, comme le dit Thierry Maillet dans le même Marketing Mag.
Ensuite parce qu’à demander trop systématiquement au consommateur / client de participer et de proposer ses idées, on va créer une attente énorme et risquer si on ne fait rien, ou pas assez, d’engendrer des déceptions à la hauteur des espoirs suscités… !
Alors attention, hein, on veut bien bosser pour vous, mais pas pour des clopinettes !!