Européennes, vote et essence de démocratie

Publié le 07 mai 2009 par H16

Etrange. Alors que l'actualité peine à faire monter l'Europe et les prochaines élections européennes dans l'esprit des Français en général des bloggueurs en particulier, la question démocratique semble pourtant imprégner ces mêmes Français pour qui la chose politique est, avec la bonne chère et les histoires de fesse, le principal sujet de discussion...

Ainsi, en l'espace de quelques jours aurons-nous pu voir fleurir ici et là des billets poussant à la réflexion politique, autrement qu'en se contentant des habituelles estocades que nous offre l'actualité. Et avec l'approche des élections européennes, on peut se demander si la réflexion sur la démocratie lancée par L'Hérétique n'est pas la conséquence logique de l'intérêt quasi-nul de ces consultations citoyennes du 7 juin.
Eh oui : les débats politiques dans les médias traditionnels décollent péniblement des contingences purement nationales. Tels de vigoureux petits cyclistes sur les pavés glissants d'un Paris-Roubaix de l'actualité micro-nationale, les journaux français pédalent comme des fous pour tenter d'intéresser vaguement le lecteur à la question européenne qui, par exemple dans Le Monde de ce jour, n'arrive guère qu'à la cinquième place, et encore, pour mieux disséquer les petites turpitudes des coulisses politiciennes du pays plutôt que d'analyser les enjeux réels d'un Scrutin Nommé Sommeil.
Il faut dire qu'en pratique, avec les ahurissantes simagrées sur HADOPI ou les consternantes bêtises du rapport du Commissaire croupion de la diversité festive et haldesque, le journaliste n'a pas vraiment le temps de se lancer dans de fines considérations sur les nuances pastelles des différents programmes des collectivistes de droites et des collectivistes de gauche.
Et pendant ce temps, une petite partie de la blogosphère frémit de quelques intéressantes réflexions avec des morceaux de fruit dedans. A la suite de l'article de l'Hérétique, on a ainsi eu droit aux remarques éclairantes de Toréador, ainsi que ma propre analyse du classement proposé. Remarques et analyse qui ont déclenché une réponse de la part du déclencheur des hostilités avec ses propres remarque et une contre-analyse qui montre surtout qu'à ce jeu de miroir, chaque nouvelle réflexion indique autant sur ce qui est reflété que sur l'angle choisi par le miroir ; on retrouve un peu de ce qu'on y a mis, et pas mal de ce que l'autre veut y trouver.

C'est çui qui dit qui est ?
L'exercice n'en reste pas moins formateur : il oblige à prendre du recul et à mieux former ses propres pensées pour tenir compte des éventuelles remarques qui pourront être faites par la suite ; tant d'auteurs le savent bien : la clarté d'un propos sur des questions complexe est une absolue nécessité qu'il est pourtant bien difficile d'atteindre.
Et pendant ce temps, toujours sur ce même débat portant de moins en moins sur le classement et de plus en plus sur la démocratie en elle-même, des développements supplémentaires nous sont proposés sur Unhuman où, fort justement, la question de la pertinence d'un classement des démocraties, compte-tenu de la nature très polymorphe du concept, est posée en quelques arguments bien sentis. Je dois avouer être séduit par les éléments apportés par Unhuman.
Parallèlement à cette réflexion, c'est l'impact et l'importance du vote qui sont étudiés entre Rubin Sfadj et Seb de Ça Réagit où ce dernier n'hésite pas à prôner l'obligation du vote dans une étonnante contradiction (assumée) avec son inclinaison libérale.
Pas de doute ; la blogosphère propose en certains endroits des débats que nous ne retrouvons plus dans les journaux, soit que ces derniers n'ont plus la volonté, le temps ou la place de nous les offrir, soit que les débatteurs ont fui ces organes qui peinent autant à les faire venir qu'à déclencher un intérêt pour les élections européennes.
Ces débats offrent évidemment un contraste saisissant lorsqu'on tombe ensuite sur ce genre de moments de bravoure dont la profondeur d'analyse et la vaste culture politique laissent un vague sentiment d'hilarité et de désolation : Churchill avait raison quand il incitait à entretenir cinq minutes de discussion avec un électeur (très) moyen pour avoir un magnifique argument contre la démocratie.
Après tout, c'est la force de la démocratie que d'avoir su arguer de la liberté d'expression pour justifier de son existence...