A la Fondation Henri Cartier-Bresson, jusqu’au 23 Décembre.
Un article sur Helen Levitt, la comparant à Cartier-Bresson, parle à leur propos d’accident poétique. Helen Levitt n’est pas une photographe professionnelle, mais elle arpentait les rues de New York à la recherche de scènes de vie. Elle photographie avec une infinie tendresse les enfants des rues, blancs ou noirs, pauvres le plus souvent, ceux pour qui la vie est dans la rue. Ils jouent, rient, se battent; l’appareil photo est invisible, ils ne posent pas, ils sont tout à leur affaire, rien ne peut les distraire. Tout est plein de mouvement, de cris, de rire. Regardant cette photo de deux enfants dansant un flamenco hésitant, on peut presque entendre la musique et les claquements de doigts.
Elle qui fut à l’école de Walker Evans et de James Agee allait à la rencontre des hommes, et surtout des enfants dans cette ville sans arbres, pleines de terrains vagues et de graffiti. Et la chance lui souriait. Cette photo du miroir brisé, paraît si simple, si ordinaire. Mais on ne la saisit pas au premier abord : cet enfant à vélo dans le cadre, est-ce une image reflétée ? une photo ? Puis on voit les enfants au premier plan ramasser les morceaux de verre. Le cadre désormais vide est tenu avec élégance par deux bambins gracieux; il encadre comme au théâtre l’enfant au tricycle, qui va peut-être sauter, crever l’écran déjà vide, passer de notre côté, entrer dans le réel. Pas vraiment d’anecdote, ni de discours social (à la différence de beaucoup de ses contemporains). Derrière eux, la ville, les passants; seule une femme semble fixer la photographe, les autres ne l’ont pas vue. La rue est une scène, Helen Levitt en vole des bribes, des instants anodins et pleins de beauté.
Helen Levitt est aujourd’hui âgée de 94 ans, elle vit toujours à New York. A partir de 1960, elle photographie en couleur, et l’exposition y consacre une place importante. J’ai préféré ces images en noir et blanc, des années 30s.
Photos : New York (c) Helen Levitt/courtesy Laurence Miller Gallery, courtoisie de la Fondation HCB.