Photo de Meteor2017, wikimedia commons, sous licence.
Au commencement, c’est une longue attente.
La même année après année, accompagnée d’une inquiétude grandissante selon l’écoulement anormal des jours.
Reviendra ou ne reviendra pas ?
Les yeux scrutent chaque parcelle de ciel et tentent de percer les nuages pour être les premiers à apercevoir la nuée bruyante.
En retard de quelques jours, décidément.
Mauvais signe, assurément.
Enfin, la première silhouette noire zèbre les airs, bientôt rejointe par d’autres petits bolides sombres.
Le corps tendu à l’extrême, les ailes en forme de faux dessinent un arc de cercle parfait.
De quel Compagnon es-tu le chef d’œuvre ?
Un architecte adorateur de la pureté ?
Un armurier pacifiste ?
Un créateur aux ailes rognées qui a décidé de te doter d’une armature si parfaite que l’air n’a aucune prise sur toi et que tu en joues si parfaitement que tu l’as domestiqué à ton avantage ?
Des cris sauvages, allongés et stridents accompagnent les courses sauvages des escadrilles trompe-la mort. Les vols en rase-motte, à la limite du décrochage, emplissent les petits corps de joie.
« De retour ! De retour ! Entendez-nous ! »
Une escalade droit dans le ciel jusqu’à ne plus être discernable, un piqué vertigineux, le spectacle est total ! Les machines de précision sont à la parade, ivres d’en mettre plein la vue, exaltées d’exhiber la perfection de leur adaptation à une vie qui ne touche que rarement la terre ferme.
Les martinets noirs, qu’on surnomme aussi les arbalétriers, sont là !
Quelques mots sur le martinet noir (Apus apus, famille des apolidés) :
Un poids plume de 42 gr, une longueur moyenne de 16 cm, le martinet noir est pourtant bien moins fragile qu’il n’y parait.
Le petit bolide peut vivre entre 10 et 20 ans et atteindre une vitesse de 140 km/h bien que sa vitesse normale soit de 40 km/h.
Migrateur au très long cours, il parcourt une grande partie de la planète, prenant ses quartiers d’hiver en Afrique, sous la ligne de l’équateur. Pendant ce long voyage, il est capable de parcourir jusqu’à 750 km en une journée !
Cet oiseau touche très rarement le sol, ses petites pattes ne lui permettent pas de se déplacer aisément mais elles constituent de bons crampons pour s’accrocher sur les façades.
Il dort en volant, se plaçant en sécurité dans les courants d’air ascendant.
Le martinet est un grand fidèle, il vit en colonie stable et regagne le même endroit année après année. Ceux qui nichent chez vous reviendront, sauf si les conditions deviennent trop mauvaises pour assurer la survie des adultes et de la nouvelle génération.
Amateur d’insectes, il est un bon indicateur de la biodiversité et de la santé des milieux.
NB : les 2 photos sont celles d'un jeune martinet qui a loupé son envol, trop faible, et est tombé sur ma terrasse.
Il a été confié à un centre de sauvetage qui s'est chargé de le remettre "sur pattes".
Il est parti, quelques temps plus tard, vers le sud pour la grande migration.