Avec l’acharnement que mettent certains à employer une rhétorique douteuse sur la “part sacrée de l’être humain” pour critiquer l’HFEA et sa décision d’autoriser la création d’embryons hybrides, on aurait pu passer à côté d’une nouvelle vraiment intéressante, qui fait le haut du site web de Nature ce soir, et qu’on pourrait résumer comme suit: Monsieur & Madame Saumon sont fiers de vous annoncer la naissance de leur petit. Rien d’exceptionnel? Si, puisque le petit en question est… une truite!
Ca, c’est quand même autre chose que de mettre un noyau humain dans un cytoplasme animal, non? Et pour la jouer provocation, Science, ou l’article original (Okutsu, T et al., “Production of Trout Offspring from Triploid Salmon Parents” – Science 317-1517 (2007) ) a été publié, a résumé l’exploit par un cinglant Trout, Your Mama was a salmon, qui a donné son nom au présent billet.
Au dela du côté très sound de la chose, le résultat est intéressant. L’équipe du Tokyo University of Marine Science and Technology a réussi à faire naître un poisson d’une espèce différente de celle de ses parents. Ce n’est pas leur coup d’essai: ils avaient par le passé réussi à faire produire du sperme de truite à des mâles saumon.
Remettons les choses dans leur contexte: les saumons utilisés ici ne sont pas des saumons atlantique (Salmo salar), mais des saumons masou (Oncorhynchus masou), du même genre donc que la truite (que les lecteurs assidus de ce blog auront retenu: Oncorhynchus mykiss). Les saumons sont devenus, non plus seulement les pères, mais aussi les mères de la future truite.
Sans trop entrer dans les détails (il est tard, je n’ai plus de café, et je viens de passer une heure à parler du papier “historique” de Worm au téléphone), la technique mérite qu’on s’y arrête. L’équipe a introduit des spermatogonies de truite dans un embryon de saumon, de manière lui faire produire des oeufs ou du sperme de truite.
Certes, on n’a pas exactement un “vrai” saumon, mais le résultat est le même: un couple d’animaux d’une espèce donnée est utilisé comme “stock” pour le matériel génétique d’une autre espèce. L’avantage en terme de conservation est assez évident, donc. Il “suffit” de conserver du matériel génétique pour pouvoir obtenir, plus tard, un nouvel individu de l’espèce choisie.
Billet un peu rapide sur un résultat qui aurait mérité plus de profondeur, mais le temps me manque… Si vous voulez de la lecture, je ne saurais que trop vous conseiller ce très bel article de Wei et coll., paru dans PLoS One, sur les “liaisons dangereuses” entre des plantes, leurs parasites, et des parasitoïdes. Vraiment bluffant.