Après une très longue tournée à l'occasion de son album "L'autre bout du monde", Emily Loizeau est revenue il y a de cela quelques semaines avec "Pays sauvage", disque plus brut et animal, qui écorne sérieusement l'image de chanteuse française qui lui avait été affublée, sans doute un peu trop rapidement.
Après une interview tout à fait intéressante avec la chanteuse en fin d'après-midi (en ligne sur Muzzart dans quelques temps), il était temps de découvrir sur scène ce qu'avait à offrir Emily Loizeau, elle qui annonçait avoir un certain attrait pour la théâtralisation.
En première partie, une inconnue ou presque...Kyrie Kristmanson qu'elle s'appelle. Elle est canadienne, pas québécoise mais parle un français presque parfait. Toute intimidée, mais en fait pleine d'assurance (et d'autodérision, ce qui la rend très sympathique), je ne sais pas trop quoi penser de sa musique. Loin d'être désagréable, elle n'est pas facilement etiquettable, hésitant souvent entre l'aspect "nature" d'une Mariée Sioux et les vocalises acrobatiques de Kate Bush. Parfois, c'est quand même un peu raté, mais il y a de vrais bons morceaux, dont le très beau titre qui évoque les fantômes qui constituent la "mémoire" du Canada. Bref, cette jeune femme a un truc, pas forcément irrésistible, mais qui mérite d'être revu.
Le MySpace de Kyrie Kristmanson
La scène était déjà adaptée pour l'entrée d'Emily Loizeau, puisqu'il y a une petite estrade qui permet à la chanteuse de surplomber la scène. mais pas seulement...parce que, dès le début, c'est une Emily Loizeau déchaînée que l'on voit sur scène ! En pleine forme, ele se dépense en trépignant, en sautant sur place pour suivre avec ses sauts la batterie. Et cela vire vite au tribal, ou pas loin ! Les aspirations de chanson française sont gommées, car c'est "Pays sauvage" qui est intégralement joué. Plus blues, plus brut de décoffrage, l'aspect expressif de la musique d'Emily Loizeau ressort à merveille : "Fais battre ton tambour" est ainsi une mélodie qui a traîné dans le bayou plus de temps qu'il n'aurait fallu, "Tell Me That You Don't Cry" est un vrai titre à la Tom Waits, quand "Le coeur du géant" ou "Sister" prouvent, si besoin était, qu'Emily Loizeau est une artiste à la culture musicale immense, autant à l'aise en français qu'en anglais, dans le folk, le blues ou la chanson (puisqu'à la toute fin, elle jouera "l'autre bout du monde", et que la chanson s'insérera naturellement). Pleine d'humour, elle est à l'aise comme peu avec un public, il est vrai conquis.
Mais le plus épatant, c'est sans doute son groupe. Ils sont quatre pour l'accompagner (plus une flûtiste sur 2 titres), et font preuve d'un talent incroyable, alliant cohésion, sens de l'improvisation et une imagination jamais prise en défaut, s'échangeant les instruments, jouant des percussions sur tout ce que qui leur tombe sous la main. "La femme à barbe" est ainsi un pur moment de ravissement, entre musique pour troubadour et blues de foire, et où les musiciens s'en donnent à coeur joie. Et puis ils ont une telle complicité avec Emily Loizeau, que c'en est épatant, et le plaisir du groupe est palpable. Le public ne s'y trompe pas, avec une standing ovation hallucinante à la fin, qui pousse les musiciens à revenir une fois, puis une deuxième fois, pour une reprise sans micro (!) de "Sweet Dreams" d'Eurythmics. Bref, ce fut une prestation remarquable, pleine d'entrain, de talent et de joie, longue en plus (2h) : bref, que du plaisir, du plaisir, et encore du plaisir !
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Le MySpace d'Emily Loizeau, la chronique de "Pays sauvage" sur POPnews