Deux employés de la Chambre des députés italienne et cinq candidats malheureux à des postes d’assistants parlementaires ont formé différents recours devant les organes juridictionnels spécifiques à cette assemblée (la « Commission juridictionnelle pour le personnel de la Chambre des députés » et, en appel, la « Section juridictionnelle du Bureau de la Chambre des députés »), puis devant la Cour de cassation.
Confrontée à l’allégation de violation de l’article 6 (droit au procès équitable) en ce que ces organes ne seraient pas des tribunaux au sens de cet article, la Cour européenne des droits de l’homme admet tout d’abord que ces derniers entrent bien dans le champ de la Convention pour ensuite condamner, non sans prudence, l’Italie sur ce fondement.
Savino et autres c. Italie (Cour EDH, 2e Sect. 28 avril 2009, req. nos 17214/05 , 20329/05, 42113/04)
Actualités droits-libertés du 30 avril 2009 par Nicolas Hervieu
En effet, l’article 6 est jugé applicable à ces organes car les requérants fonctionnaires ou aspirant fonctionnaires n’ont pas été expressément privés de l’accès à un tribunal (notamment car « aux yeux de la Cour, [ces organes] exercent sans nul doute une fonction juridictionnelle » - § 74) et que l’exclusion ne reposait pas « sur des motifs objectifs liés à l’intérêt de l’Etat » (« la Cour estime qu’on ne saurait affirmer que l’exercice de la puissance publique est en jeu dans les présentes affaires ou qu’un lien spécial de confiance entre l’Etat et les requérants justifie leur exclusion des droits garantis par la Convention » - § 78).Passant à l’examen au fond, la Cour condamne l’Italie pour violation de l’article 6 en relevant que l’organe juridictionnel d’appel « est entièrement composée de membres du Bureau, c’est-à-dire de l’organe de la Chambre des députés compétent pour régler les principales questions administratives de la Chambre » (§ 104), dont celles liées aux contestations des requérants, situation qui peut « suffire à inspirer des doutes quant à l’impartialité de la juridiction ainsi formée » (§ 105).
Si la Cour n’hésite pas ici à soumette des organes parlementaires aux exigences de la Convention, il est néanmoins possible de noter sa posture de prudence face à une telle situation.
De façon remarquable, elle a ainsi jugé utile d’indiquer que « ne se trouv[ait] pas en jeu » l’autonomie « de la Chambre des députés italienne et d’autres organes constitutionnels étatiques » (§ 91) et qu’ « il n’est pas question d’imposer aux Etats un modèle constitutionnel donné réglant d’une manière ou d’une autre les rapports et l’interaction entre les différents pouvoirs étatiques » (§ 92).
Savino et autres c. Italie (Cour EDH, 2e Sect. 28 avril 2009, req. nos 17214/05 , 20329/05, 42113/04)
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