Une affaire de charme

Par Anne Onyme

Edith Wharton
J'ai lu
157 pages

Résumé:

L'épouse d'un professeur respecté d'une ville universitaire et puritaine entrevoit le grand amour avec un jeune Anglais de passage... Une femme du monde confond le jour de sa permanente avec celui du départ en bateau de son amant... Un homme demande à un ami peintre de faire le portrait de la femme dont il est amoureux... Tout l'art d'Edith Wharton est présent dans ces sept nouvelles.

Mon commentaire:

J'aime beaucoup Edith Wharton. J'ai lu d'elle des romans et des novellas, mais jamais de nouvelles. Il faut croire que Wharton excellait dans tous les genres littéraires car ces nouvelles sont toutes de bonne qualité et très intéressantes à lire. Le recueil en contient sept, qui mettent toujours une femme au centre de l'histoire. Qu'elle soit personnage principal ou secondaire, tout vient et provient de son rôle à elle. Beaucoup de nouvelles parlent du couple ou de la séduction et quelques autres sont remplies de touches d'humour ici et là. La première nouvelle fait un peu office d'exception puisqu'elle raconte le quotidien d'une femme bien seule. Voici quelques mots sur chacune des histoires de ce recueil:

La vue de Mrs Manstey
Probablement l'histoire la plus triste, celle d'une vieille dame qui a pour toute compagne, qu'une grande fenêtre qui lui offre une vue magnifique sur un coin de jardin et une parcelle de ciel... Touchant. Aimant la nature, je me suis beaucoup retrouvée chez elle...

La plénitude de la vie
Une femme décède et rencontre l'Esprit. Elle fait le point sur sa vie et fait un choix très spécial. C'est une petite histoire sur la vie et une morale sur les choix qu'on fait.

Le tableau mouvant
Une nouvelle très très étrange sur un homme qui fait peindre le portrait de sa femme. Ce tableau le suivra tout au long de sa vie... Je ne peux en dire plus de crainte de vendre le dénouement qui est assez bizarre et surprenant.

Le prétexte
Mrs Ramson tombe amoureuse d'un jeune anglais qui séjourne chez elle et son mari. Sa rigide morale la tourmente tout le temps que dure cette "relation". Cependant, bien après les événements, elle apprend certains faits qui la laissent ébahie. Certaines scènes sont assez cocasses.

Le diagnostic
Une histoire de couple et d'un diagnostic médical qui va tout gâcher... Assez amusant aussi, si on aime l'ironie.

La permanente
Une femme confond le jour de sa permanente avec le départ de son amant. Le revirement de situation est assez intéressant!

Une affaire de charme
La nouvelle qui termine le recueil et lui donne en même temps son titre est bien amusante car elle met en scène un mari aux prises avec la famille de son épouse. Une belle-famille dont les membres semblent croître à la vitesse de l'éclair et prendre toute la place (et l'argent) disponible!

Edith Wharton est toujours égale à elle-même avec ces nouvelles. Elle nous offre le quotidien de gens de la bourgeoisie américaine, aux prises avec leurs petits problèmes de coeur, d'argent, de tourments qui nous paraissent à nous bien légers. Elle égratigne au passage ce qu'elle connaissait elle-même de ce monde et nous offre l'occasion de rire un peu de ses personnages. J'aime beaucoup son écriture. Une auteure dont je poursuis la découverte avec grand plaisir.

Un extrait:

"Elle était certaine qu'aucune de ses aïeules n'avait bouclé ses mèches ni favorisé une rougeur. Une rougeur, vraiment? Avaient-elles eu une seule occasion de rougir dans leurs vies figées? Et elle-même, grands dieux, qu'avait-elle donc? Elle s'assit dans le dur rocking-chair d'acajou, près de sa table d'ouvrage, et tâcha de se ressaisir. Dès l'enfance on lui avait appris à "se ressaisir" - mais il ne lui était jamais encore arrivé de sentir ses petites émotions et ses petites aspirations aussi largement dispersées, ni perdues de la sorte dans une étendue vague et inexplorée. Jusqu'alors, elles étaient restées soigneusement classées en catégories aisément accessibles sur les hauts rayonnages parfaitement rangés de sa conscience morale. Et maintenant... maintenant, pour la première fois, elles avaient besoin d'être remises en place..." p.56