François Bayrou, obsédé présidentiel

Comme un boxeur. Malgré les désaffections trahisons et coups bas qui se sont succédés depuis 2007, François Bayrou maintien le cap et reste les deux pieds sur le ring. Le béarnais ne cache pas ses ambitions. S’affirmer comme le principal sparring partner de Nicolas Sarkozy pour mieux le battre aux poings en 2012.

Cet homme là a un côté sparadrap. Celui qui colle aux doigts et dont on n’arrive pas à se défaire. François Bayrou n’a pas 36 créneaux juste un. Celui de l’anti-sarkozysme. Une stratégie du coucou qui vise à écarter du nid de principal opposant une parti socialiste encore ronronnant.

A défaut d’être un grand orateur, François Bayrou, à l’ancienne, est un homme de lettres. Avec son dernier livre Abus de pouvoir, il se fait procureur et dresse un réquisitoire sans concession contre Nicolas Sarkozy à quelques jours du deuxième anniversaire de son élection à la présidence de la République.

Le pamphlet n’apprend rien que ne l’on ne sache déjà des multiples travers du locataire de l’Elysée. A ce titre, il prend le risque de diaboliser un adversaire habitué à se sortir avec succès de ce genre de procés. Difficile de ne pas faire le lien avec Le Coup d’État permanent , livre écrit quarante ans plus tôt par François Mitterrand contre le général de Gaulle. On préfère généralement l’original à la copie. L’ouvrage de François Bayrou tient à ce titre de la série B qui tente de reprendre le scénario d’un film à succès. Même intrigue mais, acteurs de seconde zone.

L’élu du Sud-Ouest balaye la critique en répliquant que François Mitterrand évoquait uniquement une question institutionnelle et que pour lui, aujourd’hui, la question est beaucoup plus large notamment dans le fait que le pouvoir actuel prend le contrôle de tout et qu’il conduit à un abandon du modèle républicain. 

Le loup, toujours le loup. François Bayrou évoque des « réseaux » qui se mettent en place comme si c’était une nouveauté alors qu’ils furent l’apanage d’un certain gaullisme.

François Bayrou a pour lui d’incarner une certaine nostalgie de la France d’avant. De ces notables de province aux mœurs et à la réussite financière discrète. De ces ruraux tranquilles qui préfèrent laisser glisser le temps que de courir après, qui affectionnent la terre, les tracteurs et les chevaux plutôt que la jet set, les vacances de milliardaires et les starlettes.

La ressemblance avec François Mitterrand est peut être là. Dans la croyance en cette France éternelle. Dans cette force tranquille qu’il dégage. Celle d’un tracteur qui avance à son rythme, qui laboure la terre et que rien ne semble en capacité d’arrêter. François Bayrou sème dans l’espoir de récolter, de rallier à son panache blanc tous les déçus et les opposants. Décidément un modèle ce Mitterrand. Même dans la trajectoire politique, de la droite vers le pouvoir en passant par la gauche.

Pris dans la nasse, la tribu gauloise des socialistes ne semble même plus avoir son mot à dire sauf à déclarer comme Martine Aubry que François Bayrou est un homme de droite. Selon un sondage Libération-Viavoice jusqu’à 65 % des sympathisants (et 56 % des électeurs de gauche) affirment souhaiter que PS et Modem gouvernent ensemble. Les opposant socialistes à toute idée d’alliance se bornent à avancer, que le programme de François Bayrou reste un grand mystère.

Ce n’est donc pas un hasard si avec quelques longueurs d’avance François Hollande, en franc-tireur, a proposé au Modem une “clarification des convergences et des divergences”. L’alliance semble inévitable. Dans ce pas de deux, il reste juste à savoir qui conduit. Ce que résume à sa façon Jean-Christophe Cambadélis, lorsqu’il déclare “Les sympathisants socialistes envisagent que le Modem rejoigne la gauche et non le contraire. Le PS doit être l’aimant qui attire la limaille.”

Reste à savoir qui est l’aimant et qui est la limaille. Dans l’immédiat, c’est bien François Bayrou qui a la main.