8H00 du matin, un vendredi, récemment.
L’un et l’autre, allongés sur le lit, somnolent.
L’un a mal au ventre, l’autre a mal à la tête, les deux sont épuisés après tant de jours de fêtes, d’alcools bus, d’excès divers et variés.
Dehors, la terre tourne, la ville bouge.
Les passants évitent les vélos qui évitent les taxis qui évitent les scooters qui évitent les 4X4.
Un camion impatient klaxonne, exaspéré par la voiture garée en double file.
Cris, bruits, exaspération, violence…
Dans la chambre c’est le calme qui règne, la pénombre enveloppe la pièce.
Aujourd’hui, le soleil ne parviendra pas à franchir les lattes du store.
Là, personne ne bouge. Ils se reposent, enfin apaisés.
Tranquillement, ils écoutent France-info.
Lassé, l’un zappe et remonte la bande FM : France-inter, RFI, France-culture, BFM…
L’autre remarque :
- Voici une demi-heure qu’on écoute les infos et nous en sommes déjà à plus de 1500 morts, 3000 licenciés économiques, 2 mariages royaux, 4 attentats, une inondation, 2 rapports prospectifs, un coup d’Etat…
Et nous, allongés dans ton lit on s’en fiche. On est là, à ne rien faire, simplement préoccupés par l’organisation de notre prochain week-end.
C’est curieux : nous sommes informés, surinformés, sursurinformés et pourtant cette surabondance d’infos tue notre sens critique, nous avons tous perdu notre faculté à s’indigner.
Les informations nous pleuvent littéralement dessus mais plus rien ne nous fait réagir, nous sommes simplement passif, attendant le prochain flash d’information.
- Oui peut-être mais aujourd’hui, mon seul problème c’est mon mal de crâne et si je me redresse pour hurler ma révolte, c’est ma tête qui risque d’exploser.
On pourrait peut-être remettre la révolution à demain ?
- Nous avons tort de baisser la garde car c’est dans les détails que se niche le diable : nous devrions être vigilant et toujours nous méfier des effets papillon.
Par exemple, souviens-toi :
A cause d’un embouteillage, une voiture dû s’arrêter. A cause du passager qui se trouvait à bord, un homme s’approcha. A cause de sa haine à l’égard du passager, l’homme sortit un pistolet de sa poche et tira. A cause de la mort du passager un pays entra en guerre contre un autre pays. A cause des alliances internationales de ces deux pays le continent s’embrasa. A cause de l’importance du continent sur la scène mondiale, la terre entière bascula dans la guerre. Tout cela à cause au départ d’un simple embouteillage.
C’était le 28 Juin 1914 lors d’un embouteillage à Sarajevo, qui permit à Gavrilo Princip, nationaliste serbe, d’assassiner François-Ferdinand, héritier de l’Empire austro-hongrois.