Je reviens sur la communication de crise de la Société Générale déjà abordée dans un précédent billet au moment de l’affaire Kerviel car le magazine Communication de Crise & Sensible animé par Didier Heiderich propose une interview intéressante sur le sujet de Denis Marquet, un des membres de la cellule de crise et aujourd’hui DirCom du groupe.
Au cours de cet entretien, M.Marquet aborde les forces et les faiblesses des décisions prises par la cellule de crise :
- “Les points faibles portent sur une insuffisante prise en considération du média Internet et nous aurions dû couper court aux rumeurs qui s’amplifiaient et qui présentaient Jérôme Kerviel comme une sorte de Robin de Bois avec ses comités de soutien.”
- “j’ai découvert l’importance de ce que je considère comme le meilleur rempart, à savoir la réaction des salariés.”
Il est clair que les salariés ont été la cible privilégiée des actions de com’ de crise, avec notamment le “chat” en direct de Daniel Bouton avec 38 000 salariés connectés à l’intranet du groupe, le 29 janvier, alors que la crise médiatique atteignait des sommets [1000 articles de presse par jour]. Cette stratégie a indéniablement été payante car elle a permis de mobiliser les salariés derrière l’entreprise (Manifestation de 1000 personnes au Siège à la Défense) et qu’elle a eu des retombées indirectes positives sur l’opinion publique. En revanche, l’importance des média sociaux dans la crise a été sous-estimée par la cellule alors que l’on a vu des groupes de soutien à Jérôme Kerviel sur Facebook [Lire à propos de FB le billet de Camille ], des vidéos parodiques reprises ensuite par les média traditionnels et des débats sur de nombreuses plateformes sociales. La Société Générale aurait eu toute légitimité à faire entendre son discours sur Internet avec les outils qu’on connaît [Blog de crise, Twitter, Youtube...] mais aussi à donner plus d’importance à la veille d’opinion car c’est un outil particulièrement efficace pour comprendre les ressorts émotionnels d’une crise. Sur ce point, la direction fait désormais appel à l’Institut LH2, qui utilise une solution de veille développée par AMI Software, pour surveiller la blogosphère qu’elle considère aujourd’hui comme une “sphère d’influence non négligeable“.
Un an après la révélation du scandale financier, la Société Générale reste fragilisée pour la plupart des analystes et sociétés de gestion de portefeuille qui considèrent que l’action restera largement sous-valorisée tant que le dossier Kerviel ne sera pas clôt. En dehors du procès qui va faire ressurgir l’affaire dans l’espace public, une action en nom collectif - class action - a été déposé par un cabinet spécialisé à New York, invoquant une absence de contrôle interne et un défaut de communication sur l’exposition de la banque aux subprimes. Dans ce contexte houleux, la communication de crise s’avère une arme défensive centrale pour minimiser l’impact du risques juridiques, pour soutenir la valorisation boursière et prévenir les risques d’une OPA agressive sur le groupe.