Le Vietnam sera examiné le 8 mai 2009 au cours de la 5ème session du Conseil des droits de l'homme qui se tiendra au Palais des Nations de Genève du 4 au 15 mai prochains. Les trois pays rapporteurs pour le Vietnam sont le Burkina Faso, le Canada et le Japon. Le résumé des informations de la société civile, en date du 23 février 2009 ( ici ), préparé par le Haut commissariat aux droits de l'homme, se fonde sur des rapports établis par 12 ONG :
AI Amnesty International, London, United Kingdom
ATLP Association Tourner la PAGE, Maurepas, France
CSW Christian Solidarity Worldwide, Surrey, United Kingdom
ECLJ European Centre for Law and Justice, Strasbourg, France
FIDH and VCHR International Federation of Human Rights, Paris, France and Viet Nam Committee on Human Rights
GIEACPC Global Initiative to End All Corporal Punishment of Children
HRW Human Rights Watch, New York, United States
INDIG INDIG, Hawaii, United States
International PEN International PEN, London, United Kingdom
IRPP Institute on Religion and Public Policy, Washington D.C., USA
KKF Khmers Kampuchea-Krom Federation, NJ, USA
UNPO Unrepresented Nations and Peoples Organization, The Hague, the Netherlands
Ce résumé - que je vais résumer à mon tour - est accablant pour le Vietnam. En préambule il y est indiqué que, si la Constitution de 1992 garantit la protection des droits de l'homme, et notamment le droit à la liberté d'expression, de réunion et d'association, d'importantes dispositions de lois vietnamiennes violent explicitement "les traités sur les droits de l'homme que le Vietnam a ratifiés".
Le Vietnam ne se montre d'ailleurs pas du tout coopératif. Depuis 1998 il n'a autorisé aucune organisation, ni personne, à le visiter pour enquêter sur la liberté religieuse ou les droits de l'homme.
Les droits des femmes ne sont pas respectés : "les mauvais traitements comprennent la violence conjugale, les violations du droit à procréer, la prostitution, la traite des blanches - souvent avec la complicité du Parti et de la Police".
Il n'existe pas de statistiques sur les exécutions capitales et plus de 29 délits sont passibles de la peine de mort. Les conditions de détention sont "extrêmement dures" et il existe des preuves indéniables que la torture et des mauvais traitements sont infligés à des prisonniers politiques et religieux. Une ordonnance - n°44 sur les violations des règlements administratifs - permet même d'interner des citoyens dans des hôpitaux psychiatriques ou des camps de réhabilitation sans autre forme de procès.
L'article 120 du Code de procédure pénal permet, lui, le temps de l'instruction, de mettre en détention préventive pendant quatre mois, renouvelables quatre fois, les suspects d'infraction à la "sécurité nationale". L'article 30 du Code pénal permet d'ajouter à une peine de prison une peine d'assignation à résidence de 1 à 5 ans, une fois la peine de prison effectuée. Cette double peine est couramment infligée aux prisonniers politiques et religieux.
Si la loi protège les enfants, les châtiments corporels ne sont pas interdits dans les faits ni à la maison, ni à l'école. Il peut s'agir de coups donnés avec une badine, d'électrocutions, de membres brisés ou brûlés avec des cigarettes...
Quand procès il y a, les prévenus sont condamnés sans que les droits de la défense et le droit à un procès équitable ne soient respectés par les "tribunaux du peuple", qui ne répondent évidemment pas aux standards internationaux.
Les pratiques religieuses sont considérées par les autorités vietnamiennes comme de la "culture dépravée", comme des "superstitions" ou des "coutumes nuisibles". Les boudhistes, les catholiques et les protestants, sont l'objet de discrimination et de persécution en vertu de l'Ordonnance sur les croyances et organisations religieuses, en application depuis le 15 novembre 2004, et en vertu du Décret sur la religion, promulgué le 1er mars 2005.
La liberté de la presse est sévèrement limitée. "De nombreux écrivains, journalistes, sont actuellement emprisonnés au Vietnam, ont été incarcérés pour avoir exprimé leurs opinions ou contestation publiquement, clandestinement ou sur Internet".
Les manifestations pacifiques sont réprimées et les manifestants considérés comme des criminels, qu'il s'agisse de paysans, qui sont expropriés de leurs terres, qu'il s'agisse d'avocats, de syndicalistes, de chefs religieux, d'activistes politiques, qui sont généralement liés au Bloc 8406 [mouvement pro-démocratique né sur Internet le 8 avril 2006] ou qu'il s'agisse de catholiques, qui réclament la restitution de terres appartenant à l'Eglise, par exemple en septembre 2008.
Le Code du travail ne reconnaît pas la liberté d'association. Seule la Confédération générale du travail, inféodée au Parti communiste du Vietnam, est autorisée à représenter les travailleurs. Les tentatives de création de syndicats libres se sont traduites par des arrestations et des condamnations à de lourdes peines de prison.
Les minorités ne sont pas davantage respectées, en particulier la minorité khmère, dont les enfants ne sont pas autorisés à apprendre leur langue maternelle à l'école et à bénéficier de la même éducation que la majorité vietnamienne. Quant aux Montagnards chrétiens, on ignore combien sont encore en prison parmi les 250 condamnés - pour avoir défendu leurs propriétés agricoles et leur liberté religieuse - à la suite des grandes vagues de protestation de 2001 à 2004.
Après ce tableau éloquent il est surprenant que le résumé se termine par le paragraphe suivant :
"L'UNPO a constaté que, généralement parlant, en dépit de considérables violations des droits de l'homme infligés aux membres du Khmer Krom et des minorités de Montagnards, le gouvernement devrait être loué d'avoir incorporé des droits de l'homme capitaux, tels que la liberté de religion, dans sa constitution nationale. De plus, il devrait être loué d'avoir ratifié le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en dépit du fait que la mise en application de ces droits reste pauvre."
Je serais d'avis de décerner le prix de l'euphémisme à l'UNPO...
Francis Richard
PS
Le COSUNAM invite ( ici ), avant le 4 mai, à signer une pétition qui sera remise aux délégations du Japon, du Canada, du Burkina Faso et du Vietnam. En la signant, "vous aiderez celles et ceux qui oeuvrent à édifier une société libre et meilleure pour chaque citoyen de ce pays d'Asie si attachant".