Intellectual Property Watch revient sur la conférence organisée par le Goethe-Institut (23-24/04/09) à Bruxelles, sur l’avenir de la propriété intellectuelle.
Extraits:
"Selon l’universitaire hollandais Joost Smiers, auteur du livre Imagine! No Copyright, les lois modernes sur la propriété intellectuelle ont permis à un nombre restreint d’entreprises puissantes d’exercer sur les médias de masse un contrôle mettant en péril la démocratie.
M. Smiers soutient que le droit d’auteur a été inventé en premier lieu pour protéger les investissements faits par Hollywood, les grandes maisons de disques et les géants des médias, alors que la grande majorité des artistes n’en retire quasiment aucun bénéfice.
L’universitaire appelle à une double attaque contre ce qu’il nomme les « conglomérats de la culture », comme les empires de l’édition et de la radiodiffusion bâtis par Rupert Murdoch et le premier ministre italien Silvio Berlusconi, ou encore l’industrie du divertissement sur laquelle règne Walt Disney."
"« Nous devons tout faire en même temps : abolir le droit d’auteur et réduire en pièces les conglomérats de la culture, a-t-il précisé. En cette période de crise financière, ce sont tous les marchés qui doivent être réorganisés, pas uniquement les marchés financiers »."
"Mme Hieronymi a également laissé entendre que l’une des pierres angulaires de la législation européenne en matière de propriété intellectuelle, la directive de 2001 sur le droit d’auteur, n’était pas adaptée à l’ère d’Internet. « Il ne s’agit pas de tout reprendre à zéro, mais bien de trouver un nouveau cap législatif dans ce domaine », a-t-elle expliqué."
"David Baervoets, qui travaille au sein de la direction du marché unique de l’UE, a affirmé que la Commission étudiait la possibilité de réviser la directive de 2001 sur le droit d’auteur. Suite à un exercice formel de consultation publique sur le sujet, clos en novembre de l’année dernière, environ 400 réponses ont été reçues."
"Les points les plus contestés concernent les exceptions au droit d’auteur prévues par la loi. En effet, la loi stipule que les bibliothèques, par exemple, bénéficient d’une tolérance qui leur permet de copier des œuvres à des fins d’archivage. Il est également possible de déroger à des droits de propriété intellectuelle pour permettre à des personnes aveugles ou malvoyantes d’accéder à des œuvres en braille, en gros caractères ou en version audio."
"Le Bureau Européen des bibliothèques et des associations d’information et de documentation (EBLIDA) déplore le fait que, par les différents accords contractuels qu’ils cherchent à passer avec les bibliothèques, les éditeurs mettent souvent fin aux bénéfices de ces exceptions. L’exemple des ouvrages et revues scientifiques, dont la publication est entre les mains d’une poignée d’entreprises, illustre bien ce type de pratiques."
"Toby Bainton, représentant d’EBLIDA, affirme qu’une plus grande normalisation des licences appliquées aux publications est nécessaire. « Les institutions de l’UE doivent avoir le courage de dire que certaines exceptions devraient être obligatoires », a-t-il ajouté."
"Cependant, Anne Bergman, de la Fédération des éditeurs européens, considère que la « bibliothèque numérique idéale devrait respecter les droits de propriété intellectuelle ». Des discussions doivent avoir lieu pour trouver le moyen d’assurer la rémunération des auteurs une fois que les livres seront accessibles sous format électronique, a-t-elle ajouté."
"« Si, demain, tous les livres en vente en librairie deviennent accessibles gratuitement dans des bibliothèques [numériques], alors les librairies vont devoir fermer sur le champ, a-t-elle poursuivi. Le seul moyen pour les auteurs d’être payés serait alors de recourir à des aides de l’État, comme sous le régime soviétique. Est-ce cela que nous voulons ? »"
"Pour Danny O’Brien, d’Electronic Frontier Foundation, un groupe de défense des libertés civiles, la question de la rémunération future des artistes appelle une « réponse pragmatique », étant donné le nombre croissant de films, de morceaux de musique et d’autres biens culturels mis à disposition gratuitement sur Internet."
"M. O’Brien met en garde contre l’usage de méthodes draconiennes pour faire respecter les lois sur le droit d’auteur. « Si l’on s’obstine à penser que la seule voie à suivre est celle d’une application plus stricte des droits de propriété intellectuelle et du contrôle de chaque copie d’une œuvre, alors je redoute ce qui va se produire dans les dix années à venir », a-t-il confié."