Le chien du ciel
Je l’ai fui dévalant les nuits et les jours ;
je l’ai fui traversant les arches des ans ;
je l’ai fui le long des voies labyrinthiques
de mon esprit ; et dans la brume des larmes
je me suis caché de lui, sous des cascades de rires.
Gravissant des horizons d’espoir j’ai couru ; puis dégringolé
dans les ténèbres titanesques d’abimes de peurs,
loin de ces pas puissants qui suivaient,
toujours suivaient ; mais dans une chasse tranquille,
au rythme imperturbable,
une vitesse délibérée, instance majestueuse,
ils claquaient – et une voix battait
plus pressante que les pas –
« Toutes choses te trahissent
à toi qui m’as trahi. » (…)
« Vite »
dis-je à l’aube, « plus vite » au soir ;
sous tes jeunes fleurs célestes dissimule-moi
à ce monstrueux amant –
Ondule ton vague voile autour de moi,
qu’il ne voie pas !
J’ai tenté tous ses serviteurs jusqu’à découvrir
ma propre traîtrise dans leur constance,
dans cette obéissance à lui leur mépris de moi,
leur sincérité lâche, leur tromperie loyale.
À toutes choses rapides je suppliai d’accélérer,
agrippé aux crinières sifflantes des vents.
Pourtant, qu’ils balaient d’effleurements fugaces
les vastes savanes du bleu,
ou qu’implosés d’orages
ils secouent son chariot contre un ciel,
giclant d’éclairs fusant à leurs ruades :
la peur n’échappait où l’amour pourchassait.
Calmes dans cette chasse tranquille, au rythme imperturbable,
vitesse délibérée, instance majestueuse,
arrivaient les pas suiveurs et la voix dessus leur rythme :
« Rien ne t’abritera s’il ne m’abrite aussi. » (…)
J’ai connu toutes les translations légères
dans le visage obstiné des cieux ;
j’ai su comment les nuages se formaient
écumés de fous reniflements marins ;
tout ce qui naît ou meurt
montait retombait avec eux ; je les fis modeleurs
de mes humeurs, les plaintives comme les divines ;
avec eux jouis et fus affligé.
Lourd chutai dans le soir
lorsqu’elle allumait ses bougies scintillantes
au sanctuaire du jour mort.
J’ai ri dans les yeux du matin.
Triomphais, m’attristais selon le temps,
le ciel et moi pleurions ensemble,
ses larmes sucrées, salées par mes mortelles ;
contre la rouge pulsation de son cœur couchant
j’ai posé le mien à battre,
partageant une chaleur fusionnante ;
pourtant par tout cela mon mal humain ne fut apaisé.
En vain mes larmes mouillaient la joue grise du ciel.
car ah nous ne savions pas ce que l’autre disait,
les choses et moi ; avec des sons je parle –
leur son c’est se mouvoir, elles parlent par silences.
Nature, pauvre marraine, ne peut étancher ma soif ;
si elle veut me posséder, qu’elle
enlève son bleu châle céleste et me montre
les seins de sa tendresse :
jamais son lait n’a enchanté
ma bouche desséchée.
De proche en proche revient la chasse,
au rythme imperturbable,
vitesse délibérée, instance majestueuse ;
et devançant ces pas bruyants,
une voix qui accourt :
« Ha ! Rien ne te contente s’il ne me contente. »
Nu j’attends le coup exhaussé de ton amour !
Pièce après pièce tu taillas mon harnais
me forçant à genoux ;
je suis livré sans défenses.
Ai dormi, je crois, m’éveillai,
lent vis qu’on m’avait dépouillé endormi.
Dans la vive vigueur de mes jeunes forces,
j’ai ébranlé les colonnes des heures
et rabattu ma vie sur moi ; souillé
suis debout dans les débris des ans amoncelés –
ma jeunesse mutilée gît morte sous la masse.
Mes jours se sont craquelés, partis en fumée,
éclatés ou brisés comme reflets solaires sur la rivière.
Même le rêve manque maintenant
au rêveur, et le luth au luthiste ;
même les visions cousues d’entrelacs floraux
où je ballotais le monde en poignées de paillettes
cèdent ; les fils en sont trop faibles
pour cette terre écrasée de chagrins.
Ah ton amour serait-il
une herbe mauvaise, celle de l’amarante,
ne souffrant aucune floraison sauf la sienne ? (…)
Voici que de la longue poursuite
le bruit m’a rattrapé ;
cette voix m’entoure comme une mer déchaînée :
« Ta terre est donc si dévastée,
fracassée en éclat sur éclat ?
vois, toutes choses te fuient, à toi qui me fuies !
Futile chose étrange et pitoyable !
Comment quiconque t’éviterait l’amour ?
Ne voir que moi est faire grand cas d’un rien. » (dit-il),
« l’amour humain exige un mérite humain :
as-tu mérité ? - -
toi de toute la glaise durcie de l’homme la plus terne glaise
hélas tu ne sais pas
combien peu digne tu es de tout amour !
Qui trouveras-tu pour aimer, ignoble toi,
à part moi, et moi seul ?
Tout ce que je t’ai pris je ne l’ai pas pris
pour ton mal
mais pour que tu puisses le chercher dans mes bras.
Tout ce que ton erreur d’enfant
imagine perdu, je l’ai gardé dans cette maison pour toi :
relève-toi, prends ma main, viens ! »
Ce piétinement s’arrête-t-il ?
Serait-ce mon obscurité
l’ombre de sa main, tendue pour caresser ?
« Très-naïf, très-aveugle, très-faible,
je suis ce que tu cherches !
Tu as chassé l’amour de toi qui m’as chassé. »
Traduction inédite (de l’anglais) de Jean-René Lassalle
Dans la « suite de note », on peut lire un plus
large extrait de ce même poème et la version originale (cliquer sur "lire la suite... au bas de cette note)
Contribution et traduction de Jean René Lassalle
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Le chien du ciel (version longue)
Je l’ai fui dévalant les nuits et les jours ;
je l’ai fui traversant les arches des ans ;
je l’ai fui le long des voies labyrinthiques
de mon esprit ; et dans la brume des larmes
je me suis caché de lui, sous des cascades de rires.
Gravissant des horizons d’espoir j’ai couru ; puis dégringolé
dans les ténèbres titanesques d’abimes de peurs,
loin de ces pas puissants qui suivaient,
toujours suivaient ; mais dans une chasse tranquille,
au rythme imperturbable,
une vitesse délibérée, instance majestueuse,
ils claquaient – et une voix battait
plus pressante que les pas –
« Toutes choses te trahissent
à toi qui m’as trahi. »
J’ai plaidé, hors-la-loi,
devant des croisées en cœurs aux rideaux rouges,
treillées de charités enchevêtrées ;
(car même connaissant son amour poursuiveur
j’éprouvais une horreur douloureuse,
si je ne pouvais l’avoir lui, plutôt avoir ce rien)
et quand une croisée s’ouvrait grande
le tourbillon de son approche la refermait violemment :
la peur n’échappait où l’amour pourchassait.
Par delà les limites du monde j’ai fui,
frappai aux portails d’or des étoiles
criant asile à leurs grilles tintantes ;
entrechoquai mélodieuses dissonances
en carillons argent aux pâles portes de la lune.
« Vite » dis-je à l’aube, « plus vite » au soir ;
sous tes jeunes fleurs célestes dissimule-moi
à ce monstrueux amant –
Ondule ton vague voile autour de moi,
qu’il ne voie pas !
J’ai tenté tous ses serviteurs jusqu’à découvrir
ma propre traîtrise dans leur constance,
dans cette obéissance à lui leur mépris de moi,
leur sincérité lâche, leur tromperie loyale.
À toutes choses rapides je suppliai d’accélérer,
agrippé aux crinières sifflantes des vents.
Pourtant, qu’ils balaient d’effleurements fugaces
les vastes savanes du bleu,
ou qu’implosés d’orages
ils secouent son chariot contre un ciel,
giclant d’éclairs fusant à leurs ruades :
la peur n’échappait où l’amour pourchassait.
Calmes dans cette chasse tranquille, au rythme imperturbable,
vitesse délibérée, instance majestueuse,
arrivaient les pas suiveurs et la voix dessus leur rythme :
« Rien ne t’abritera s’il ne m’abrite aussi. »
Je ne cherchai plus ce pourquoi j’errai
dans les visages des hommes ou des femmes ;
mais muettement dans les yeux des enfants
il semble quelque chose, quelque chose qui réponde.
Eux au moins sont bien là, certainement pour moi !
Mélancoliquement je les abordais
mais quand leurs yeux neufs se teintaient
de réponses aurorales,
leur ange les tirait de moi par les cheveux.
« Venez alors, vous les autres enfants de la nature, partagez
avec moi (dis-je) votre compagnie délicate ;
laissez-moi vous saluer lèvre à lèvre
vous enlacer de caresses
batifolant
dans les tresses vagabondes de notre mère
banquetant
avec elle en son palais aux murs d’air
sous son dais azuré,
nous enivrant, à notre manière innocente,
d’un calice
pleurant ses rayons à la naissance du jour. »
Ainsi fut fait :
j’étais uni à leur compagnie délicate - -
déverrouillant les secrets de la nature.
J’ai connu toutes les translations légères
dans le visage obstiné des cieux ;
j’ai su comment les nuages se formaient
écumés de fous reniflements marins ;
tout ce qui naît ou meurt
montait retombait avec eux ; je les fis modeleurs
de mes humeurs, les plaintives comme les divines ;
avec eux jouissais et fus affligé.
Lourd chutais dans le soir
lorsqu’elle allumait ses bougies scintillantes
au sanctuaire du jour mort.
J’ai ri dans les yeux du matin.
Triomphais, m’attristais selon le temps,
le ciel et moi pleurions ensemble,
ses larmes sucrées, salées par mes mortelles ;
contre la rouge pulsation de son cœur couchant
j’ai posé le mien à battre,
partageant une chaleur fusionnante ;
pourtant par tout cela mon mal humain ne fut apaisé.
En vain mes larmes mouillaient la joue grise du ciel.
car ah nous ne savions pas ce que l’autre disait,
les choses et moi ; avec des sons je parle –
leur son c’est se mouvoir, elles parlent par silences.
Nature, pauvre marraine, ne peut étancher ma soif ;
si elle veut me posséder, qu’elle
enlève son bleu châle céleste et me montre
les seins de sa tendresse :
jamais son lait n’a enchanté
ma bouche desséchée.
De proche en proche revient la chasse,
au rythme imperturbable,
vitesse délibérée, instance majestueuse ;
et devançant ces pas bruyants,
une voix qui accourt :
« Ha ! Rien ne te contente s’il ne me contente. »
Nu j’attends le coup exhaussé de ton amour !
Pièce après pièce tu taillas mon harnais
me forçant à genoux ;
je suis livré sans défenses.
Ai dormi, je crois, m’éveillai,
lent vis qu’on m’avait dépouillé endormi.
Dans la vive vigueur de mes jeunes forces,
j’ai ébranlé les colonnes des heures
et rabattu ma vie sur moi ; souillé
suis debout dans les débris des ans amoncelés –
ma jeunesse mutilée gît morte sous la masse.
Mes jours se sont craquelés, partis en fumée,
éclatés ou brisés comme reflets solaires sur la rivière.
Même le rêve manque maintenant
au rêveur, et le luth au luthiste ;
même les visions cousues d’entrelacs floraux
où je ballotais le monde en poignées de paillettes
cèdent ; les fils en sont trop faibles
pour cette terre écrasée de chagrins.
Ah ton amour serait-il
une herbe mauvaise, celle de l’amarante,
ne souffrant aucune floraison sauf la sienne ?
Pourquoi
infini constructeur - -
dois-tu calciner le bois avant de dessiner de son charbon ?
Ma fraîcheur a gaspillé ses coulées dans la poussière ;
et mon cœur est une fontaine étouffée,
où stagnent les traits de larmes, rejetés
par les pensées glacées qui tremblent
sur les branches plaintives de mon esprit.
C’est ainsi ; et ensuite ?
la pulpe est amère, quel goût aura l’écorce ?
Je sens confusément ce que le temps trame en ses brumes ;
cependant encore une trompette retentit
derrière l’invisible rempart de l’éternité ;
ces brumes, éparpillées, dévoilent un espace
puis se reforment sur des tours entr’aperçues.
Ce n’est pas celui qui convoque
que j’ai d’abord vu, enveloppé
dans ses sombres manteaux pourpres, couronné de cyprès.
Je connais son nom, ce qu’annonce sa trompette.
Que ce soit un cœur ou une vie d’homme qui te serve
de moisson, tes champs doivent-ils
s’engraisser d’une mort pourrie ?
Voici que de la longue poursuite
le bruit m’a rattrapé ;
cette voix m’entoure comme une mer déchaînée :
« Ta terre est donc si dévastée,
fracassée en éclat sur éclat ?
vois, toutes choses te fuient, à toi qui me fuies !
Futile chose étrange et pitoyable !
Comment quiconque t’éviterait l’amour ?
Ne voir que moi est faire grand cas d’un rien. » (dit-il),
« l’amour humain exige un mérite humain :
as-tu mérité ? - -
toi de toute la glaise durcie de l’homme la plus terne glaise
hélas tu ne sais pas
combien peu digne tu es de tout amour !
Qui trouveras-tu pour aimer, ignoble toi,
à part moi, et moi seul ?
Tout ce que je t’ai pris je ne l’ai pas pris
pour ton mal
mais pour que tu puisses le chercher dans mes bras.
Tout ce que ton erreur d’enfant
imagine perdu, je l’ai gardé dans cette maison pour toi :
relève-toi, prends ma main, viens ! »
Ce piétinement s’arrête-t-il ?
Serait-ce mon obscurité
l’ombre de sa main, tendue pour caresser ?
« Très-naïf, très-aveugle, très-faible,
je suis ce que tu cherches !
Tu as chassé l’amour de toi qui m’as chassé. »
Traduit de l’anglais par Jean-René Lassalle
A propos de la version originale, ces quelques précisions du traducteur :
Le texte ci-dessous reproduit strictement le texte original
de l’édition des Collected Poems qui
reproduit celle de 1913. Il comporte des archaïsmes qui sont déjà désuets à
l’époque de Francis Thompson, mais qu’il utilise sans doute pour donner des
couleurs bibliques ou fantastiques ou prophétiques à son anglais. D’autre part
les formes anciennes à côté des modernes produisent des contrastes ou
stridences que j’ai aussi voulu rendre par l’alternance passé simple
(historique) / passé composé (moderne) tout en les intégrant au rythme-sens des
vers du poème.
Exemples :
wist : preterit de wit (to know)
drouth: vieille forme de drought , sècheresse
lustihead : (archaïsme) : vigueur
les terminaisons de participe en -èd sont typiques de la
poésie ancienne, souvent pour ajouter un pied à un vers, pour compléter le
rythme
les terminaisons de verbe en -est après un « tu »
sont des traces d’une ancienne désinence qui a disparu en anglais moderne.
The Hound of Heaven
I fled Him, down the
nights and down the days;
I fled Him, down the arches of the years;
I fled Him, down the labyrinthine ways
Of my own mind; and in the mist of tears
I hid from Him, and under running laughter.
Up vistaed hopes I sped; and shot, precipitated,
Adown Titanic glooms of chasmed fears,
From those strong Feet that followed,
Followed after. But with unhurrying chase,
And unperturbed pace,
Deliberate speed, majestic instancy,
They beat – and a Voice beat
More instant than the Feet –
“All things betray thee,
Who betrayest Me.”
I pleaded,
outlaw-wise,
By many a hearted casement, curtained red,
Trellised with intertwining charities;
(For, though I knew His love who followed,
Yet I was sore adread
Lest having Him, I must have naught beside)
But, if one little casement parted wide,
The gust of His approach would clash it to:
Fear wist not to evade, as Love wist to pursue.
Across the margent of the world I fled,
And troubled the gold gateways of the stars,
Smiting for shelter on their clangèd bars;
Fretted to dulcet jars
And silvern chatter the pale ports o’ the moon.
I said to Dawn: Be sudden – to Eve: Be soon;
With thy young skiey blossoms heap me over
From this tremendous Lover –
Float thy vague veil about me,
Lest He see!
I tempted all His servitors, but to find
My own betrayal in their constancy,
In faith to Him their fickleness to me,
Their traitorous trueness, and their loyal deceit.
To all swift things for swiftness did I sue;
Clung to the whistling mane of every wind.
But whether they swept, smoothly fleet,
The long savannahs of the blue;
Or whether, Thunder-driven,
They clanged his chariot ‘thwart a heaven,
Plashy with flying lightnings round the spurn o’ their feet: –
Fear wist not to evade as Love wist to pursue.
Still with unhurrying chase, and unperturbèd pace,
Deliberate speed, majestic instancy,
Came on the following Feet, and a Voice above their beat –
“Naught shelters thee, who wilt not shelter Me.”
I sought no
more that after which I strayed
In face of man or maid;
But still within the little children's eyes
Seems something, something that replies,
They at least are for me, surely for me!
I turned me to them very wistfully;
But just as their young eyes grew sudden fair
With dawning answers there,
Their angel plucked them from me by the hair.
“Come then, ye other children, Nature's -- share
With me” (said I) “your delicate fellowship;
Let me greet you lip to lip,
Let me twine with you caresses,
Wantoning
With our Lady-Mother's vagrant tresses,
Banqueting
With her in her wind-walled palace,
Underneath her azured daïs,
Quaffing, as your taintless way is,
From a chalice
Lucent-weeping out of the dayspring.”
So it was done:
I in their delicate fellowship was one --
Drew the bolt of Nature's secrecies.
I knew all the swift importings
On the wilful face of skies;
I knew how the clouds arise
Spumèd of the wild sea-snortings;
All that's born or dies
Rose and drooped with; made them shapers
Of mine own moods, or wailful or divine;
With them joyed and was bereaven.
I was heavy with the even,
When she lit her glimmering tapers
Round the day's dead sanctities.
I laughed in the morning's eyes.
I triumphed and I saddened with all weather,
Heaven and I wept together,
And its sweet tears were salt with mortal mine;
Against the red throb of its sunset-heart
I laid my own to beat,
And share commingling heat;
But not by that, by that, was eased my human smart.
In vain my tears were wet on Heaven's grey cheek.
For ah! we know not what each other says,
These things and I; in sound I speak --
Their sound is but their stir, they speak by silences.
Nature, poor stepdame, cannot slake my drouth;
Let her, if she would owe me,
Drop yon blue bosom-veil of sky, and show me
The breasts o' her tenderness:
Never did any milk of hers once bless
My thirsting mouth.
Nigh and nigh draws the chase,
With unperturbèd pace,
Deliberate speed, majestic instancy;
And past those noisèd Feet
A voice comes yet more fleet --
“Lo! naught contents thee, who content'st not Me.”
Naked I
wait Thy love's uplifted stroke!
My harness piece by piece Thou hast hewn from me,
And smitten me to my knee;
I am defenceless utterly.
I slept, methinks, and woke,
And, slowly gazing, find me stripped in sleep.
In the rash lustihead of my young powers,
I shook the pillaring hours
And pulled my life upon me; grimed with smears,
I stand amid the dust o' the mounded years --
My mangled youth lies dead beneath the heap.
My days have crackled and gone up in smoke,
Have puffed and burst as sun-starts on a stream.
Yea, faileth now even dream
The dreamer, and the lute the lutanist;
Even the linked fantasies, in whose blossomy twist
I swung the earth a trinket at my wrist,
Are yielding; cords of all too weak account
For earth with heavy griefs so overplussed.
Ah! is Thy love indeed
A weed, albeit an amaranthine weed,
Suffering no flowers except its own to mount?
Ah! must
Designer infinite! --
Ah! must Thou char the wood ere Thou canst limn with it?
My freshness spent its wavering shower i' the dust;
And now my heart is as a broken fount,
Wherein tear-drippings stagnate, spilt down ever
From the dank thoughts that shiver
Upon the sighful branches of my mind.
Such is; what is to be?
The pulp so bitter, how shall taste the rind?
I dimly guess what Time in mists confounds;
Yet ever and anon a trumpet sounds
From the hid battlements of Eternity;
Those shaken mists a space unsettle, then
Round the half-glimpsèd turrets slowly wash again.
But not ere him who summoneth
I first have seen, enwound
With glooming robes purpureal, cypress-crowned;
His name I know, and what his trumpet saith.
Whether man's heart or life it be which yields
Thee harvest, must Thy harvest-fields
Be dunged with rotten death?
Now of that
long pursuit
Comes on at hand the bruit;
That Voice is round me like a bursting sea:
“And is thy earth so marred,
Shattered in shard on shard?
Lo, all things fly thee, for thou fliest Me!
Strange, piteous, futile thing!
Wherefore should any set thee love apart?
Seeing none but I makes much of naught” (He said),
“And human love needs human meriting:
How hast thou merited --
Of all man's clotted clay the dingiest clot?
Alack, thou knowest not
How little worthy of any love thou art!
Whom wilt thou find to love ignoble thee,
Save Me, save only Me?
All which I took from thee I did but take,
Not for thy harms,
But just that thou might'st seek it in My arms.
All which thy child's mistake
Fancies as lost, I have stored for thee at home:
Rise, clasp My hand, and come!”
Halts by me that footfall:
Is my gloom, after all,
Shade of His hand, outstretched caressingly?
“Ah, fondest, blindest, weakest,
I am He Whom thou seekest!
Thou dravest love from thee, who dravest Me.”
Francis Thompson, « The Hound of Heaven » , dans : “Poems”, 1893.