Aujourd’hui la majorité des banques ont mis en place une approche par Taux de Cession Interne. L’approche diffère en fonction de la taille, de l’activité des établissements et du rôle joué par la fonction ALM (Asset Liability Management ou Gestion Actif Passif).
Cependant, elle a toujours pour objectif de mesurer la contribution de la sphère financière et de la sphère commerciale à la MNI (et donc au PNB).
Le TCI est au centre des échanges entre ces 2 sphères, il est le prix auquel les unités commerciales placent ou refinancent respectivement leurs ressources et leurs emplois auprès de l’ALM.
Le TCI est généralement construit pour un crédit à partir du taux d’adossement au « flux le flux » de l’opération, en prenant compte le coût de refinancement, majoré du coût des options contractuelles (cap, floor…) ou clientèles (option de remboursement anticipé…). Ainsi, la performance des opérations réalisées par les commerciaux n’est pas affectée par l’évolution du marché car le risque induit est transféré à l’ALM.
Les Directions Financières ont su répondre aux problématiques de valorisation des TCI et les processus qui en découlent sont aujourd’hui maîtrisés. En revanche, les restitutions qui en sont faites ne permettent pas toujours de piloter efficacement la performance de la Banque.
Pour ce faire, les Banques doivent transformer les TCI en outil de pilotage de l’acte commercial en offrant une restitution homogène à tous les niveaux (commercial, financier, décideur).
Les limites actuelles de l’utilisation des TCI
i) Dans la pratique les agences se plaignent souvent de taux trop élevés. Elles sont confrontées à la guerre des prix générée par une meilleure diffusion des offres du marché (meilleurtaux.com) et font souvent appel au système de dérogation pour conserver ou élargir leurs portefeuilles client. Les commerciaux ne voient donc pas dans le TCI un gage de compétitivité arguant que le TCI d’une opération unitaire ne permet pas de valoriser la rentabilité de la relation client dans son ensemble.
ii) La marge commerciale est un élément très important pour mettre en œuvre la stratégie de développement de la Banque. Pourtant les résultats sont souvent hétérogènes, du fait de la multiplicité des acteurs et de l’asynchronisme des calculs. Ainsi lors de la constitution de l’offre commerciale, le chargé de clientèle se base sur une grille donnant selon différents axes (type de taux, maturité, options…) le taux du produit. Cette grille ne permet pas de connaître la marge réelle dégagée par l’opération. Cette dernière est calculée a posteriori (stock) avec les caractéristiques exactes de l’opération. Ce décalage explique, en partie, les divergences dans les résultats présentés par la sphère commerciale versus la sphère financière.
Piloter l’acte commercial :
Idéalement les TCI doivent pouvoir être utilisés dès l’étape de la proposition commerciale pour projeter la rentabilité du client. En effet pour piloter efficacement l’activité commerciale, il faut prendre en compte l’ensemble des éléments qui se rattachent au portefeuille du client. Or, si le TCI permet aux commerciaux d’agir sur les éléments qu’ils maîtrisent (puisque les risques financiers sont portés par l’ALM), il ne permet pas de valoriser globalement le client ou son activité. De même les responsables d’agences doivent être en mesure de procéder aux mêmes analyses à leur niveau.
Garantir l’homogénéité :
La direction générale doit disposer d’une vision cohérente et unique des tableaux de bord. Cette cohérence ne peut provenir que d’une bonne articulation des calculs a priori / a posteriori. Il convient donc de mettre en place des processus et des outils qui ne répondent pas seulement au besoin de chaque fonction (ALM, Contrôle de gestion, développement) mais qui couvrent, globalement, l’ensemble des besoins.
Déclinaison organisationnelle et SI
Pour garantir une bonne utilisation et adhésion des équipes, les établissements doivent mener une profonde réflexion sur leurs processus de diffusion du TCI et faire évoluer leur SI et leur organisation pour garantir l’homogénéité des restitutions. L’objectif étant d’obtenir un système TCI homogène et partagé par l’ensemble des acteurs.
- Point de vue organisationnel :
Des efforts doivent être portés sur la mise en place de comités (comité des prix ou autre instance de gouvernance) qui permettraient de remonter l’ensemble des avantages / inconvénients liés à un produit et ce, sur tous les axes. En effet il est important de mettre en avant la difficulté ou facilité de commercialisation d’un produit : produit porteur, produit ne répondant pas aux attentes client, produit obsolète ; mais aussi les aspects financiers : produit peu ou très rentable…
Ces informations devront ensuite être partagées par tous permettant de définir une tarification plus juste. Les bonus / malus qui peuvent être mis en place suite à des évolutions de marché dans l’optique de rester dans les standards concurrentiels de la place doivent faire l’objet d’actions de communication précises pour faciliter leur adoption. L’objectif étant d’impliquer tous les acteurs dans la tarification et d’imposer le TCI, non comme une contrainte mais comme une garantie de la rentabilité à l’instar des indicateurs de risque de crédit.
Ces éléments permettront aux décideurs de réorienter la politique commerciale ou financière de l’établissement en s’appuyant sur des analyses conjoncturelles et structurelles tout en veillant au respect de la politique définie.
Bien entendu pour garantir l’homogénéité des restitutions il convient de définir des processus permettant de rapprocher les tableaux de bords non par lors de leurs diffusions mais lors de leur élaboration. Pour ce faire des passerelles entre les différentes fonctions doivent être mises en place, appuyées par des principes de gouvernance clairs.
- Point de vue SI :
Le TCI devrait pouvoir être calculé et conservé dans le SI dès la mise en place de l’opération afin d’être exploité dans les outils de pilotage de l’acte commercial. Cela permettrait également de garantir l’homogénéité des restitutions jusqu’au tableau de bord utilisé par la Direction Générale. Bien entendu, cela passe également par une intégration verticale de l’ensemble des référentiels impactés : dimension produit / dimension structure / dimension client. Cette cible est difficilement atteignable à court terme, néanmoins en fonction de leurs priorités et contraintes les banques peuvent d’ores et déjà s’orienter vers des systèmes intermédiaires. Par exemple, la mise en place d’un système d’échange entre la distribution et le système de calcul (ALM) permettrait de garantir la prise en compte des caractéristiques réelles dans le calcul du TCI. Même si le TCI n’est pas conservé, il pourra être recalculé à l’identique en utilisant les mêmes paramètres (données de marché, données contractuelles), connus à l’instant de la demande. Ainsi, l’articulation calculs a priori / a posteriori serait cohérente.
D’autres améliorations pourraient également être apportées à la mise en place d’une approche TCI. Par exemple, le commercial peut souhaiter disposer d’une vision globale lui permettant d’intégrer le profil de risque du client dans le pilotage de l’acte commercial.
Proposer des systèmes permettant de mesurer le rendement de l’activité en fonction du risque et d’y inclure les coûts opérationnels constituerait également un axe d’amélioration.
Ces travaux de mise en cohérence et de sophistication permettront de faire du TCI un véritable outil de pilotage de la rentabilité et non pas seulement une contrainte permettant une simple mesure.