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Michel Garroté – Mardi 28 avril 2009 – Comme c’est amusant. Parfois, les événements se télescopent. Ainsi, je publiais le vendredi 24 avril un article intitulé La liberté (virtuelle) d’expression, article aussitôt repris par une demi douzaine de sites et de blogues sans que je ne bouge le petit doigt. Lundi 27 avril, Ivan Rioufol publiait dans le Figaro La France touchée par la révolution néoconservatrice?, 2article très vite repris par divers blogues sans qu’Ivan Rioufol ne bouge le petit doigt. Et récemment, George Weigel a écris une analyse fort intéressante sur Benoît XVI et le Vatican. Analyse traduite et reprise sur la blogosphère francophone. Weigel, Rioufol et moi-même aurions-nous vu juste ?
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Il y a belle lurette que je ne lis plus et que je ne me charge plus des trolls. Et d’autres responsables se chargent de ces trolls, à ma place et beaucoup mieux que moi. Concrètement, d’autres responsables se chargent de balancer ces trolls à la corbeille. Je note toutefois - car j’ai exceptionnellement jeté un coup d’œil sur les urinoirs virtuels - que La liberté (virtuelle) d’expression a suscité 110 trolls en 48 heures sur drzz.info, 110 trolls que je n’ai évidemment pas lus, mais dont j’ai vérifié le nombre dans la rubrique « corbeille » de drzz.info sur over-blog.
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110 trolls en 48 heures : voilà où en est le travail des idées, une bien grande formule pour finalement pas grand chose, et ce en France, le pays qui prétend réinventer la liberté (dans une version inédite, celle de la culture pipi-caca). Je comprends mieux, maintenant, pourquoi la plupart des blogues ont recours à la modération, donc la « censure » légitime, des commentaires avant publication, et non pas après publication. La modération reste une « censure » légitime dans les deux cas de figure, à la seule différence près que dans le premier cas il n’y a pas de trolls ; et que dans le deuxième cas les trolls ont une (dérisoire) espérance de vie de quelques heures, à la seule satisfaction (émasculée) de quelques trolleurs malades, oisifs et complexés, trolleurs que nous n’invitons pas sur nos blogues, mais qui s’invitent eux-mêmes, tant ils sont mal élevés et mal polis… Voilà donc où en est le travail des idées chez mes compatriotes français et chez les francophones en général (aux dernières nouvelles, il semblerait qu’en Suisse francophone aussi, quelques cas de verve porcine se soient propagés). Dois-je ici préciser qu’en revanche, le vrai débat a bel et bien lieu sur les blogues hispanophones, germanophones et anglophones ?
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Et puisque j’ai à nouveau abordé - ci-dessus - les deux thèmes de la liberté et du néoconservatisme, j’aimerais maintenant entrer dans le vif du sujet en revenant sur l’analyse récente écrite par le catholique néoconservateur George Weigel, analyse sur Benoît XVI et sur le Vatican. George Weigel demeure, avec Norman Podhoretz, un des piliers du néoconservatisme judéochrétien. George Weigel est en outre un des meilleurs biographes de Jean-Paul II et de Benoît XVI. Je publie ci-après la 1e partie, en français, de l’analyse de George Weigel, dans une traduction effectuée par benoit-et-moi - en une version adaptée avec mes annotations personnelles (Michel Garroté), version adaptée qui figure notamment sur http://monde-info.blogspot.com. L’analyse de George Weigel a initialement été publiée par le Catholic Educator Resource Center sous le titre The Pope Versus the Vatican.
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(Début de la 1e partie de l’analyse de George Weigel) « Jean-Paul II fut enterré le 8 avril 2005. Durant les 9 jours qui séparent ses funérailles de l’ouverture du conclave chargé d’élire son successeur, critiques et ennemis du cardinal Ratzinger s’activèrent fiévreusement pour empêcher son élection. Le Sunday Times qui jouait les trolls, publiait des histoires opposant « Joseph Ratzinger-membre-des-jeunesses hitlériennes » et Karol Wojtila, « héroïque résistant contre le nazisme et le communisme ». Le quotidien La Reppublica, fleuron de la gauche italienne, tricotait des récits fantaisistes sur une coalition germano-américaine qui, en lançant un appel aux diocèses du Tiers Monde dépendant du soutien financier allemand, pourrait bloquer l’élection de Ratzinger. Ce n’était pas là le moindre de leurs arguments. Les activistes progressistes catholiques, intellectuels et prélats pour qui l’idée du rottweiler de Dieu comme pape était un cauchemar sans nom, soutenaient tacitement et, dans certains cas, encourageaient ces essais d’anticipation parfois risibles des médias (Note de Michel Garroté : le 12 mars dernier j’écrivais que les « maladresses » de l’évêque Sobrinho et du cardinal Re étaient pour le moins suspectes. Et j’écrivais qu’à ces « maladresses » hautement suspectes, venaient s’ajouter, tantôt les déconcertantes manigances, tantôt les déclarations - parfois - hallucinantes, du père Lombardi, du cardinal Renato Martino, du cardinal Walter Kasper, du cardinal Achille Silvestrini, du cardinal Tarcisio Bertone et de Mgr Franco).
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Ironie de l’histoire, en parallèle, Joseph Ratzinger déployait tous ses efforts pour entraver sa propre élection. Tout humble qu’il fût, il savait qu’il avait brillamment accompli sa tâche de Doyen du Collège des cardinaux, menant leurs délibérations après la mort de Jean-Paul et dirigeant la prière aux funérailles de Jean-Paul II. Cela faisait de lui le candidat idéal pour être le nouveau successeur de saint Pierre. Il n’en voulait à aucun prix ! Il avait prévu de soumettre sa démission au futur pape et de requérir son acceptation. Auparavant, à trois reprises il avait présenté sa démission, mais Jean-Paul II lui avait demandé de rester. À présent, il était décidé à retourner dans sa Bavière natale et d’habiter avec son frère, prêtre lui aussi et maître de chapelle distingué. Il allait avoir 78 ans deux jours avant le conclave. Il était temps de revenir chez lui et de reprendre le fil de sa vie de chercheur qu’il avait sacrifiée en devenant évêque de Munich et Freising en 1977.
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Comment un candidat, en tête pour l’élection au siège pontifical, s’y prend-il pour travailler contre lui-même, d’autant qu’il en a l’intention ferme et qu’il ne s’agit pas d’une vaine et fausse démonstration d’humilité et de réserve ? L’affaire Ratzinger contre Ratzinger se résumait très simplement : « Je ne suis pas un homme de gouvernement » avait-il déclaré dans la demi douzaine de langues qu’il parle couramment. Ne me faites pas cela. Ne vous faites pas cela. Ceux qui appuyaient sa candidature – comme George Pell de Sidney, Christophe Schönborn de Vienne et Angelo Scola de Venise, trois jeunes dirigeants parmi les plus remarquables de l’Église catholique – répondirent en substance : « Pourquoi ne laissez-vous pas Dieu dire ce qu’il a à dire ? Ne préjugez pas du travail de l’Esprit Saint ».
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Vu la tournure que prit la situation, le vote ne fut plus qu’une simple formalité : Ratzinger fut élu au 4e tour dans un des conclaves les plus courts de l’Histoire de l’Église. Mais bien des questions restaient en suspens tant chez ses opposants que chez ses partisans : accepterait-il la charge qu’il avait essayé d’éviter ? À leur conférence de presse après le conclave, les cardinaux allemands (parmi lesquels il y avait des opposants et des partisans) déclarèrent aux journalistes qu’il y eut un énorme soupir collectif de soulagement lorsque le cardinal Ratzinger accepta. Le matin après son élection, on vit clairement et sans équivoque que le nouvel élu, Benoît XVI, avait une conscience aiguë de ses propres limites. Célébrant la messe avec le collège des cardinaux dans la Chapelle Sixtine, il dit dans son homélie : « Ne me refusez pas votre conseil » (Note de Michel Garroté : un cardinal m’a confié que lors du conclave, le cardinal Ratzinger se prenait toujours davantage la tête entre les mains, au fur et à mesure que le vote tournait en sa faveur).
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Au cours des 4 années écoulées depuis que Benoît XVI est apparu à la loggia de Saint Pierre pour être présenté urbi et orbi, à la cité et au monde, le pape Benoît XVI a systématiquement fait mentir l’image caricaturale de « rottweiler de Dieu » que les media brossaient de lui depuis des lustres. Quelques mois après son élection, alors qu’il était en vacances à la villa d’été de Castel Gandolfo, il invita son vieil adversaire en théologie, le dissident suisse Hans Küng, pour une conversation amicale autour d’une bière. Les critiques affirmaient que jamais ce pape ne pourrait rivaliser avec Jean-Paul II Superstar dans le cœur des jeunes ; Benoît XVI les confondit en présidant deux JMJ réussies, à Cologne et à Sydney. Lors de la réunion à Washington en mai 2008 avec les victimes des prêtres pédophiles, il manifesta une sensibilité pastorale pleine de tact, tout comme après sa prière silencieuse sur les ruines des Tours jumelles de New York, lorsqu’il eut affaire aux familles des morts du 11 septembre 2001.
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Des journalistes qui manquent d’intelligence et de soi-disant vaticanistes déplorent encore sa causerie à Ratisbonne, en septembre 2006, sur la foi et la raison et y voient une gaffe diplomatique. Or la vérité est que Benoît XVI a envoyé une onde de choc si salutaire à travers les mondes de l’Islam que des modèles de dialogue interreligieux plus solides se font lentement jour. Grâce à l’insistance du pape, la liberté religieuse conçue comme un droit humain que la raison peut connaître, et la nécessaire séparation de l’autorité religieuse et de l’autorité politique dans un État juste – tous sujets naguère interdits – sont passés au premier plan du dialogue entre le Catholicisme et l’Islam (Note de Michel Garroté : je partage sur ce point l’analyse de Laurent Murawieck, de Metula News Agency, qui voit en Benoît XVI l’une des rares grandes figures de notre temps à avoir compris l’islam tel qu’il est).
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En avril 2008, son Allocution à l’Assemblée générale des Nations Unies, présentait un argument fort et irréfutable selon lequel l’exercice de la liberté doit être guidé par des vérités morales, et que ces vérités morales sont accessibles aux hommes et aux femmes de bonne volonté qui osent penser sérieusement. Les audiences hebdomadaires de Benoît XVI à Rome continuent à attirer des foules nombreuses, souvent plus importantes que celles qu’attirait Jean-Paul II. Le pape défie ainsi régulièrement les sceptiques qui estimaient que Ratzinger ne ferait pas bonne figure en public.
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Dans ses deux premières encycliques, Deus Caritas est et Spe Salvi, il montre d’une manière éclatante qu’il sait expliquer les fondements de la foi chrétienne en tenant compte du scepticisme post-moderne. Dans ces lettres, le gardien de l’orthodoxie, naguère redouté, répond à l’absence de foi ou à sa faiblesse dans un esprit de conversation et non point de condamnation. Son livre Jésus de Nazareth qui fut une meilleure vente internationale analyse avec sympathie l’entretien imaginaire d’un rabbin américain avec Jésus et rappelle à tous les Chrétiens la dette qu’ils ont envers leur aîné, le Judaïsme (Note de Michel Garroté : la plupart des gestes de rapprochement effectués par Benoît XVI durant ces quatre dernières années en direction du Judaïsme ont été soigneusement occultés par les media).
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Malgré ces réalisations impressionnantes, la 5e année de son pontificat commença sous des nuées d’orage. En janvier, ses efforts de réconciliation avec les ultra-traditionalistes, disciples de feu l’archevêque Marcel Lefebvre, déclencha un tollé mondial. L’un des 4 évêques lefebvristes dont l’excommunication avait été levée, un ci-devant anglican nommé Richard Williamson, était un négationniste de la Shoah. Sur Internet, tous les blogueurs et autres surfeurs avertis, des antipodes jusqu’au Zimbabwe, connaissaient cette sale histoire, mais le pape et ses conseillers n’étaient au courant de rien. Le fiasco lefebvriste et le chaos qu’il provoqua dans les relations entre Juifs et Chrétiens commençait à peine à s’apaiser que ce fut au tour de l’Autriche de s’embraser. La cause ? La nomination du nouvel évêque auxiliaire de Linz, lequel avait des idées curieuses sur les rapports de la Providence et de la météorologie. Selon lui, l’ouragan Katrina qui avait ravagé la Nouvelle Orléans était le châtiment de Dieu qui punissait ainsi la ville pour ses longues années de débauche. Finalement, l’évêque élu demanda au pape de revenir sur sa nomination, ce que Benoît XVI accepta (Note de Michel Garroté : sur Benoît XVI et Pie XII ; sur Benoît XVI et les catholiques traditionalistes ; et sur le catholicisme judéophile dans le sillage de Jacques Maritain, j’ai déjà pris position, entre autre dans Pie XII : ma petite idée sur cette affaire.; dans Evêque négationniste – Salir Benoît XVI ?; et dans Nous sommes catholiques. Cela dérange certains (version actualisée).).
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Certains se demandèrent si l’Autriche n’était pas repartie pour un nouveau tour de joséphisme, à savoir la résistance à l’autorité papale pour la nomination des évêques, au siècle des Lumières. Alors que ce séisme ecclésiastique grondait en Europe, la Curie romaine démontra son incapacité à traiter avec célérité et franchise une autre catastrophe: l’affaire du père Marcial Maciel, fondateur de l’ordre ecclésiastique de la Légion du Christ et du mouvement laïque Regnum Christi. On apprenait qu’il avait mené une existence dissolue et commis des malhonnêtetés financières. Et pourtant la Légion du Christ et le mouvement Regnum Christi avaient formé certains des jeunes prêtres et laïcs engagés les plus enthousiastes.
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Alors que ce train déraillait doucement vers l’abîme, le meilleur des vaticanistes, Sandro Magister de l’hebdomadaire L’Espresso, relatait que le secrétariat d’état du Vatican avait mal jugé le caractère et les qualifications de Joseph Li Shan, nouvel évêque de Pékin. Selon Magister, ce dernier avait trop sympathisé avec le régime communiste chinois et l’Association catholique patriotique que soutient le gouvernement (Note de Michel Garroté : je partage l’avis de George Weigel sur Sandro Magister, le meilleur des vaticanistes ; on trouve des traductions françaises des analyses de Sandro Magister notamment sur http://eucharistiemisericor.free.fr ).
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En février, Nancy Pelosi, porte-parole catholique de la Chambre des représentants aux États-Unis, et partisane de l’avortement rencontra le pape qui profita de cette occasion pour rappeler avec fermeté une des vérités morales que peut connaître la raison : dans toute société juste, la vie innocente a droit à la protection de la loi. Pelosi avait terriblement envie d’être photographiée en compagnie du pape, mais elle se le vit refuser– signe que le Vatican n’avait pas complètement perdu sa capacité de maîtriser son programme et le rôle du pape dans ce programme. Mais pour les supporters de Benoît XVI, la remontrance adressée à Pelosi ne fut qu’une brève éclaircie au milieu de sombres nuages. Benoît XVI avait-il eu raison en 2005 ? N’était-il vraiment pas un homme de gouvernement ? Et qu’est-ce que cela présageait pour l’avenir de son pontificat lequel, malgré son âge, pouvait fort bien s’étendre sur la prochaine décennie ? (Fin de la 1e partie de l’analyse de George Weigel ; 2e partie à suivre).
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Or donc, George Weigel nous apprend que le livre de Benoît XVI intitulé Jésus de Nazareth fut une meilleure vente internationale et que ce livre reste un rappel à tous les Chrétiens de la dette qu’ils ont envers leur aîné, le Judaïsme. Par ce temps un brin maussade, et alors que Benoît XVI prépare son pèlerinage en Israël (1), le rayon de soleil de George Weigel demeure plutôt salutaire. On ne saurait que trop l’en remercier.
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© Michel Garroté http://monde-info.blogspot.com
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(1) Le Ministère israélien des Affaires étrangères a créé un site Internet sur la visite de Benoît XVI en Israël : http://www.holyland-pilgrimage.org. A lire le nom du site, le terme « Terre sainte » ne semble pas traumatiser Israël. J’ajoute qu’une série spéciale de timbres doit être émise à l'occasion du pèlerinage de Benoît XVI en Terre sainte, ont indiqué lundi 27 avril les services postaux israéliens.
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