...Mitterrand avait cru trouver une échappatoire en jouant l'Europe : puisque le modèle français était condamné, il a voulu construire à un échelon européen une
nouvelle synthèse du libéralisme et de l'Etat fort. Faire une Europe française en quelque sorte. Dans les années 80, le projet européen a été le grand espoir de la société française. Mais il se
trouve que le projet a échoué : l'Europe telle qu'elle s'est développée n'est pas française, on peut même dire qu'elle est anti-française, tout simplement parce qu'elle reflète la réalité d'un
monde qui va spontanément à rebours de notre héritage historique.
Le désenchantement qui s'en est suivi vis-à-vis de l'Europe a été spectaculaire. Depuis personne n'a fait l'effort de reprendre le problème à la racine. Jospin, qui semblait l'avoir compris, n'a
pas osé. Ségolène Royal est pasée à côté...
Marcel Gauchet, interrogé par Libération aujourd'hui.
Message à tous les lecteurs-commentateurs qui m'ont glissé que "sortir de l'Europe j'en rêve, mais en secret", que les français "ne sont pas
mûrs"... Sortir de l'Europe n'est pas une fin en soi, mais je n'imagine pas qu'un programme de sortie de crise puisse passer la barre des critères de
Maastricht et du Traité de Lisbonne en général. Donc il faudra en sortir parce que les solutions à la crise - par exemple une taxe
de libre échange - exigeront d'en passer par là.
Marcel Gauchet, encore : "il ne faut pas sous-estimer la prise de conscience par les individus des contradictions et de l'impasse dans laquelle ils sont. Les gens ne sont pas stupides, ils
voient bien que quelque chose coince."
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S'abstenir en juin prochain, c'est envoyer un message très clair : nous
savons que l'Europe n'est pas une solution, c'est un problème, nous exigeons des solutions effectives, pas du bourrage de crâne et du pipeau.
Voter en juin c'est envoyer un message très clair : continuons sur la voie européenne à chercher des solutions - bidons.