Il ne manquait plus que ça ! Voici que tombe du ciel la grippe porcine, maligne, inquiétante, dangereuse et de portée mondiale. Dčs la premičre réunion consacrée ŕ cette menace, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a jugé que Ťla situation actuelle constitue une urgence de santé publique de portée internationaleť.
L’industrie des transports aériens a aussitôt frémi, se souvenant des difficultés nées, en 2003, du syndrome respiratoire aigu sévčre. Ce vilain SRAS, outre les peurs qu’il avait suscitées, avait lourdement pesé sur la bonne marche commerciale des grandes compagnies aériennes.
Tout porte ŕ croire qu’il en ira de męme avec la grippe porcine, ŕ la différence prčs que cette menace surgit ŕ un moment oů les transports aériens sont déjŕ malades. C’est, en clair, la scoumoune.
Déjŕ, sans autres précautions oratoires, Andorra Vassiliou, commissaire européen ŕ la Santé, a déconseillé tout voyage ŕ destination du Mexique ou des Etats-Unis, Ťŕ moins que ce ne soit trčs urgentť. On ne pouvait pas imaginer plus mauvaise nouvelle, qui plus est au pire moment, c’est-ŕ-dire au début de la saison touristique estivale. Et, faut-il le rappeler, en pleine basse conjoncture.
Les transports aériens continuent en effet de s’enfoncer dans la crise et, de toute évidence, le point bas n’est pas encore atteint. Un repčre parmi d’autre, ŕ titre d’exemple : en mars le trafic passagers de Roissy-CDG a reculé de 9,1% par rapport au męme mois de l’année derničre. Dčs lors, si le risque de pandémie devient réel (ŕ supposer qu’un doute subsiste), les avions vont se vider davantage, les vacanciers choisissant les gîtes ruraux du Cantal de préférence au Grand Canyon.
Les pertes attendues cette année, 4,7 milliards de dollars d’aprčs l’IATA, seront sans doute largement dépassées. Le coefficient moyen d’occupation, qui était de 80% environ ŕ la mi-2008, a déjŕ perdu 10 points, effaçant tout espoir de rentabilité sur la plupart des réseaux.
La situation de crise qui s’est installée en quelques jours seulement a au moins le mérite de confirmer que la veille médicale fonctionne bien, au niveau planétaire. L’IATA rappelle que l’épidémie du SRAS avait indiqué la nécessité de liens plus étroits avec l’OMS et tel est bien le cas aujourd’hui, ce qui est rassurant. Les aéroports sont aussi en premičre ligne, de męme que les polices, douanes et agences de voyages.
Nous sommes confrontés ŕ un phénomčne de civilisation, de modernité, dans la mesure oů les voies aériennes sont aussi empruntées par microbes et virus qui franchissent en avion des distances considérables, en quelques heures seulement.
Il n’en faut pas davantage pour souligner que les transports aériens jouent désormais un rôle essentiel, omniprésent, qui va bien au-delŕ des données économiques sans cesse évoquées. En acheminant 2,3 milliards de passagers et plus de 40 millions de tonnes de fret par an, les avions contribuent ŕ notre bien-ętre en męme temps qu’ils sont capables d’exacerber bien involontairement nos difficultés.
C’est un rôle que les compagnies aériennes n’ont évidemment pas recherché. Et quand surviennent simultanément deux difficultés de cette ampleur, récession mondiale et risque sanitaire, un sentiment d’impuissance et d’injustice les envahit. Pour ętre tout ŕ fait explicite, c’est la poisse, la guigne.
Pierre Sparaco - AeroMorning