Une merveille forestière
Au contact du Berry et du Bourbonnais, la forêt de Tronçais, étale ses quelques 10.000 hectares de chênes qui font de cette merveille verte en Bourbonnais, la plus grande chênaie d'Europe, une oasis de fraîcheur à l'ombre de ses chênes plus que vénérables. Il est fort agréable, dans ce monde de verdure, d'aller de " rond " en " rond ", à la recherche de la fontaine Viljot, de la chapelle de Saint-Mayeul, des forges de Tronçais, de la ligne des Gênois ou de la futaie Colbert, en appréciant, selon la course du soleil, les clartés changeantes, sous la feuillée des grands arbres dont certains portent des noms : chêne de la Résistance, chêne Stebling...
La forêt de Tronçais, après avoir été administrée par les Ducs de Bourbons, fut confisquée en 1527 avec les autres terres du Connétable. Mal surveillée, laissée à l'abandon aux XVIe et XVIIe siècles, elle subit une lente dégradation. L'abattage incontrôlé des arbres fit que les trois quarts de la forêt étaient ruinés. Pour répondre aux besoins actuels et futurs du pays en bois de marine, Colbert entreprit de protéger et réensemencer la forêt royale en chênes. Ces nouvelles séries aménagées ne devaient être exploitées qu'à l'âge de 200 ans. En 1788, l'ouverture des forges de Tronçais entraîna une nouvelle destruction de la forêt et son retour à l'état de taillis sous futaie sur les deux tiers de sa surface en vue de la production de charbon nécessaire à la fabrication de la fonte. En 1832, des mesures conservatrices furent prises et la forêt fut de nouveau aménagée en futaies pleines, exploitables à l'age de 160 ans. Cet âge fut porté à 180, puis à 225 ans en 1928.
La forêt de Tronçais est découpée en séries, elles-même divisées en parcelles. Elle est composée au 7/10è de chênes, puis de hêtres et de pins sylvestres, ces derniers étant surtout présents à l'ouest et au centre de la forêt. La production de bois d'oeuvre de grande qualité demeure l'activité principale. Pour atteindre un tel épanouissement, les chênes les plus prometteurs doivent, durant toute leur croissance, être entourés par d'autres arbres peu à peu dégagés par des coupes d'amélioration successives.
Il n'y a pas si longtemps, on pouvait dire que cette forêt naviguait sur toutes les mers du globe. Colbert, à la demande de Vauban qui désirait réserver les plus beaux chênes à la marine royale, en aménagea rationnellement l'exploitation. Aujourd'hui encore, on trouve quelques parcelles de cette époque : les " futaies Colbert ". Plus tard, les chênes de Tronçais servirent pour les charpentes du Louvre.
De nos jours, le chêne de Tronçais est particulièrement apprécié en tonnellerie pour la maturation des vins de Bordeaux et son exceptionnelle qualité a permis aux tonneliers charentais de fabriquer des fûts destinés au vieillissement des plus grands cognacs. Les chênes de qualité moindre sont transformés en bois de charpente ou utilisés pour le bois de chauffe.
Certains chênes, vieux de près de trois siècles, atteignent jusqu'à deux mètres de circonférence et peuvent culminer, tel le chêne de la Résistance, a plus de quarante mètres de hauteur. Ils portent, pour certains, le nom d'une personnalité : chêne Charles-Louis Philippe... Chêne Emille Guillaumin.
En cette forêt de Tronçais, l'eau est partout présente avec ses étangs bleus aux allures de Sologne sur les bords desquels il est agréable de se promener : Tronçais, Saloup, Saint-Bonnet, Pirot ou Morat qui, avec leur force motrice, ont permis l'installation de forges au XVIIIè siècle.
Une industrie métallurgique puissante y a donc vu le jour. La forêt a ainsi joué un rôle décisif dans l'économie régionale et donné naissance à la grande industrie montluçonnaise.
Si elle est un privilège pour les hommes, la forêt de Tronçais l'est aussi pour les animaux. Cerfs, sangliers, martres et putois y côtoient quelques rares chats sauvages que le promeneur surpris peut encore rencontrer dans les allées ou prés des étangs à la nuit tombante.
Entretenue, protégée, la forêt est un formidable lieu de promenade, de découverte et d'approche de la nature et de la faune. Une grande partie est d'ailleurs classée '' zone de silence '', entre les ronds du Gardien et de la Grande Borne, à proximité de la fontaine Viljot, où l'on ne pénètre qu'à pied, à cheval ou à vélo.
➥ Légende de la fontaine Viljot
Au coeur de la forêt, proche de la zone de silence, la fontaine Viljot rappelle l'existence d'une villa gallo-romaine. La légende prétend qu'une véritable cité se trouvait à l'emplacement de la fontaine. Elle disparut, engloutie dans la tourbière. La nuit de Noël, en se penchant sur l'eau, on entendrait le sourd carillon des cloches de l'église disparue.
Une autre légende veut que les jeunes filles qui désirent se marier, lancent une épingle dans la fontaine. Si l'aiguille se plante au fond, la jeune fille " a piqué un coeur ". Plus sûrement, dans son eau limpide, on apercevra les pièces d'argent jetées par les jeunes filles désireuses de trouver un mari ou par tout autre visiteur ayant fait un voeu.
➥ Galerie photos '' Forêt de Tronçais ''
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