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André Charbonnier

Publié le 26 avril 2009 par Gérard Charbonnel @gcharbonnel

Hommage à mon frère André

Il y douze ans, nous quittait André. Dans cet hommage rendu à l'époque pour accompagner son dernier voyage, c'est toute une partie du trait de caractère auvergnat qui ressort : bonté, humilité, discrétion, sensibilité, altruisme... des valeurs humaines particulièrement précieuses

'' Te souviens-tu, André, de ce pub de Bristol où nous dégustions ensemble une de ces fameuses Guinness que tu appréciais tant, assis tous les deux, face au soleil couchant du grand large ? Tu aimais ces moments de calme et de convivialité.

Ce soir-là, tu pensais précisément à toutes celles et ceux qui étaient chers à ton coeur. Tous ici, nous savons combien tu nous aimais. Tu me parlais de Papy, de Mamie, de ta Maman trop tôt disparue... de tes frères Michel, Pierre, Henri... de ta petite soeur Marie-Paule. Dans tes pensées du moment, tu n'avais pas omis tes copains de l'A.R.C.H... et en particulier Lucien, l'ami de toujours... cet autre frère pour toi, en qui tu avais une entière confiance et pour lequel tu vouais une véritable admiration... une sainte amitié.

Aujourd'hui, André, te voici parvenu au soir de ta vie et ce splendide coucher de soleil sur l'océan que nous admirions jadis... jamais pour toi ne s'éteindra !

André Charbonnier

Je sais bien que ton existence ne fut pas toujours des plus sereines. Il y eut cette Maman qui s'en est allée quand tu étais enfant et plus tard, ce père expatrié en captivité jusqu'aux confins de la Pologne et dont la présence t'aura manquée durant cinq longues années. Plus tard encore... bien plus tard, il y eut l'expérience de l'Algérie, cette guerre qui ne dit pas son nom et dont tu nous parlais parfois. Tu gardais en mémoire et avec pudeur, le visage de tous tes compagnons d'armes. D'ailleurs, pour tes services rendus à la Patrie, n'as-tu pas eu l'honneur d'être décoré de la médaille des anciens combattants et des anciens d'Algérie ? Je sais que tu en gardes encore le souvenir car ce jour-là, c'est Emile, ton beau-frère, officier supérieur de son état, qui avait eu l'honneur de te décorer.

Mais la grande période de ta vie commence au début des années soixante-dix, lorsque tu pars pour Aurillac... travailler à l'A.R.C.H. Tu avais coutume de revenir à Saint-Flour tous les quinze jours, passer le week-end avec nous. Tu accordais une grande importance à la famille et tes " camarades " de l'A.R.C.H., comme tu aimais les appeler, faisaient partie de ta famille. Nous les connaissions tous et chacun représentait une part de ta vie. Lucien, ton ami, ton confident, faisait partie des notre et je sais que tu y tenais beaucoup. Combien de fois nous as-tu parlé de lui. Mais tu n'oubliais jamais de nous donner des nouvelles de Marie-Claude, de Bernadette, de Mr S... et plus récemment encore de Mr S... et de Mr V..., dont tu appréciais la gentillesse et l'attention qu'ils te portaient. Aujourd'hui, je suis sûr que tu penses très fort à eux. L'A.R.C.H. était un second foyer, bien plus encore... un pan entier de ton existence et je sais la reconnaissance que tu lui portes pour tout ce qu'elle t'a donné.

Que dire de plus à ton adresse, mon cher André ?

Je me souviens du grand intérêt que tu portais pour le cinéma. Tu connaissais tous les détails de la vie de John Wayne, ton acteur fétiche. Dans certains domaines, tu étais un véritable puits de connaissances. Combien de fois nous as-tu parlé de la seconde guerre mondiale et de tes souvenirs d'enfance durant la période d'occupation. Tu en aurais étonné plus d'un mais tu savais rester discret et ne pas étaler ta culture... parfois si éclectique. Tu aimais fréquenter les rayons de la bibliothèque d'Aurillac ou de Saint-Flour, visiter une salle de musée... écouter un disque de la môme Piaf.

Je suis certain que là où tu sièges désormais, à la droite de ton père, les muses de la connaissance t'accompagnent.

André Charbonnier

Je pourrais dire ta profonde sensibilité, lorsqu'aux sortirs de la messe du dimanche, tu ne manquais jamais de nous offrir une surprise, quand Henri et moi, étions enfants. Je voudrais aussi louer ton immense fierté lorsque tu évoquais chacun de tes neveux et de tes nièces et je sais que tu aurais aimé connaître Clémence, Quentin et Maëva. Je t'entends encore me raconter la visite de David, d'Emmanuel et de Benjamin, venus tous trois à la clinique, au son d'une guitare sèche, te chanter quelques airs et t'apporter un peu de chaleur. Je sais combien tu appréciais la présence rassurante d'Anne et d'Emilie, lors des récents week-ends passés à Villefranche.

En fait, je crois qu'en nous quittant, tu auras permis que nous tous, séparés par les aléas et les contraintes de la vie, puissions nous retrouver et recréer ensemble une famille plus unie.

Je pense également à Mamie et à Henri, qui depuis le départ de Papy, ont eu pour toi un oeil protecteur. Enfin, je t'entends encore me décrire ces été savoyards, chez Arlette et Jacques, en compagnie de Michel et de Jérôme que tu aimais tant... ces vacances estivales que tu attendais d'une année sur l'autre et qui comptaient tellement à tes yeux.

Tu n'auras pas eu le temps de remercier toutes celles et ceux qui se sont montrés attentionnés à ton égard et qui t'ont prodigué leur amour. C'est la raison pour laquelle je me permets de le faire pour toi... et je crois que tu aurais apprécié.

Cher André, mon frère, je ne suis pas triste et je veux rester digne... respectueux de ta personne et de ce que tu nous auras légué et montré de vertueux... au sens du sublime. Le moment est venu de te dire " Au revoir " et je ne voudrais surtout pas te laisser sans ces quelques mots issus des " Mémoires d'Hadrien " de Marguerite Yourcenar :

" Petite âme, âme tendre et flottante, compagne de mon corps qui fut ton hôte, tu vas descendre dans ces lieux pâles, durs et nus, où tu devras renoncer aux jeux d'autrefois. Un instant encore, regardons ensemble les rives familières, les objets que sans doute nous ne reverrons plus... Tâchons d'entrer dans la mort les yeux ouverts ".

G.C. - Montluçon, le 6 mars 1997 - Cathédrale de Saint-Flour, le 7 mars 1997


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