Extraits:
BibliObs. - Publie.net a passé un accord avec des bibliothèques: est-ce une manière de démocratiser la lecture numérique?
F. Bon. -Je n'ai jamais pensé à ce mot «démocratiser». C'est déjà le cas, de toute façon: on compte 32.000 lecteurs abonnés dans une ville comme Grenoble, 8.000 à la Roche-sur-Yon, ça donne l'échelle. Je crois que c'est le rôle des bibliothèques qui changent: on tape le numéro de sa carte de lecteur, et, de chez soi, on a accès à des ressources comme Publie.net - à nous d'inciter à cette curiosité. Mais il y a ici un vrai basculement, à la fois économique et politique: économique, parce que ces bassins très larges de lecteurs font confiance à la prescription et aux conseils de leur établissement, et donc verseront leur quote-part, très modeste à leur échelle, mais pas à l'échelle de l'auteur. Politique, parce que cela permettra – je pense aux étudiants qui se connectent via leur université – l'accès à des contenus culturels qui, il y a peu d'années encore, leur parvenaient par les revues, notamment.
BibliObs. - Le livre numérique est-il un moyen de capter un nouveau public, et les jeunes générations amatrices de technologie et de multimédia?
F. Bon. -Je n'aime pas ce mot «capter». On propose, et prend qui veut. Oui, définitivement, nos enfants (j'ai 55 ans, les miens sont grands) se débrouillent bien mieux que nous avec les machines. Mais quand il s'agit de faire lire Mallarmé ou Antonin Artaud, ce n'est pas le goût de la technologie qui y aidera: le travail que nous avons à faire pour transmettre la littérature, éduquer à la poésie, soutenir les formes à risque, n'a changé en rien.