Quel est le contexte ? Comme il l'avait annoncé lors de la dernière campagne électorale, Alain Claeys souhaite mettre en place un "busway". Une des caractéristiques, présentée comme incontournable, de ce "bus à haut niveau de services" est de circuler en "site propre", c'est à dire sur un parcours qui lui est exclusivement réservé.
Aussi le choix des axes utilisés par ce busway est lourd de conséquences sur le reste de la circulation. Aujourd'hui, le débat est ouvert, et semble animé, pour savoir quel itinéraire est le plus judicieux. L'objectif étant de créer une ligne sur un axe est/ouest et passant par le centre ville. Le sujet est compliqué et je ne suis pas un spécialiste des transports urbains. M'enfin comme chacun donne son point de vue, je participe au débat du moment.
Concernant la liaison Poitiers Ouest < - - - - - > Poitiers Centre.
La réalisation prochaine d'une nouvelle passerelle change bien évidement la donne. Puisque le moment est venu de choisir ce que l'on souhaite voir circuler sur cette passerelle, je profite de l'occasion pour dire que je trouverais très dommage d'exclure toute circulation automobile par principe.
Voila comment les choses pourraient se faire si l'usage de la passerelle n'était pas exclusivement réservée à sa majesté le busway.
Dans le sens ouest--->centre ville : permettre aux voitures de rejoindre le parking Toumai (avec impossibilité d'aller plus loin) afin de favoriser un accès simple et rapide à ce parking qui jouxte le centre ville et inciter ainsi les automobilistes à s'arrêter là plutôt que d'avancer jusqu'au bld Solférino pour "monter" en centre ville en voiture.
Dans le sens centre ville--->Poitiers ouest : Permettre aux voitures d'utiliser la passerelle pour sortir rapidement du centre ville. Aujourd'hui, les automobilistes sont obligés de passer par des voies qui ne sont pas adaptées à la circulation qu'elles subissent, sans parler des encombrements de la gare et surtout de la porte de Paris.
La rue Maillochon et la rue de la Cueille Mirebalaise subissent un trafic sans rapport avec leur configuration. Les habitants concernés s'en plaignent. Cette solution permettrait de réduire le volume des flux de voitures contraintes aujourd'hui de passer par là. On pourrait ainsi envisager de mettre la rue Maillochon en sens unique (de l'avenue de Nantes vers le pont Guynemer).
Concernant la traversé du centre ville.
Alors là, si le principe d'une circulation du busway en "site propre" est retenu, il va falloir m'expliquer comment va s'organiser le reste de la circulation en centre ville. A titre d'illustration, j'ai tracé sur la carte 2 le trajet que réalise une voiture qui arrive par la pénétrante et qui veut rejoindre la parking des cordeliers. Ce véhicule va utiliser les axes qui structurent la circulation dans Poitiers (Rue de l'université, rue Boncenne, bd Solférino, rue Victor Hugo, place Leclerc..). Est ce que le passage du busway doit amener à fermer certains de ces axes essentiels aux déplacement ? Si oui lesquels ? Et où passent les voitures dans ce cas ?
Je sais déjà que beaucoup d'entre vous me diront "pas de voiture en ville, et puis voila". Merci de ne pas oublier qu'en ville il y a es commerçants (livraisons) , ceux qui ont besoin de leur véhicule pour travailler (les artisans, les livraisons de repas, les médecins et infirmières, les commerciaux, etc...). Et puis figurez vous qu'il y a aussi des habitants en ville (18 000 je crois). Il va de soi que beaucoup d'entre eux ont besoin, quotidiennement ou à l'occasion, d'utiliser une voiture.
Concernant la liaison Poitiers Centre < - - - - - > Poitiers Est.
Le cœur du sujet est peut être là. Deux possibilités sont envisagées, utiliser la pénétrante ou faire passer le busway par la rue Jean Jaurès et la rue du Faubourg du Pont Neuf.
Utiliser la pénétrante :
Avantages : une solution simple à mettre en œuvre, évidente diront peu être certains, puisque les voies réservées aux transports en commun sont déjà là.
Inconvénients : le groupe des verts vous répondra que « Il ne sert à rien de faire passer les bus là où personne n’habite ». Et surtout, dans ce cas, on peut considérer que la solution busway présente trop peu d'intérêt en comparaison de la situation actuelle, le projet perd dans ce cas, sa pertinence.
Utiliser les rues Jean Jaurès et Faubourg du pont Neuf :
Avantages :
C'est vrai que ça aurait de l'allure la rue du Faubourg du Pont Neuf sans voiture. Contrairement à ce que certains commerçants semblent penser, je crois que ça rendrait cette rue beaucoup plus attractive.
Cette solution est sans doute la meilleure si l'objectif est de proposer aux poitevins un mode de transport suffisamment différent de ce qui existe aujourd'hui, pour les inciter à changer leurs habitudes, et créer ainsi une rupture significative dans les comportements.
Inconvénients :
Où vont passer les 22.000 voitures qui utilisent cet axe chaque jour ?
La question ne peut pas être balayée d'un revers de manche.
Il n'existe aujourd'hui à Poitiers, en tout et pour tout, que quatre entrées vers le centre ville qui ne soient pas des ruelles :
- le boulevard Solférino, lorsqu'on vient de Poitiers Ouest en passant par la gare.
- les voies André Malraux/rue du jardin des plantes (pénétrante).
- la rue Léopold Thézard (ex rue du Grl Chêne)
- et donc, la rue Jean Jaurès.
En fermant la rue Jean Jaurès, on crée un axe de boulevard quasiment infranchissable de plus de 2.5 km en pleine ville.
De la rue Léopold Thézard, au Jardin des plantes, il y a bien deux possibilités pour pénétrer en centre ville (en vert sur la carte 3) mais il s'agit de ruelles qui ne sont absolument pas configurées pour accueillir la circulation des voitures, et qui sont touristiques pour certaines d'entre elles (quartier de la cathédrale, voir photo).
Autre question que je me pose : que deviennent les rues perpendiculaires à la rue Jean Jaurès (en orange sur la carte 3) ? Comment accédera-t-on aux rues Arsène Orillard, Pascal Lecoq etc .. ?
De l'autre coté du Pont Neuf, la problématique est la même. Que devient le boulevard Coligny qui mène aux Dunes, et les autres rues perpendiculaires ? Où vont passer les voitures ?
Parce qu'en faisant faire des tours et des détours aux automobilistes, on en décourage peut être certains de prendre leurs voitures, mais on contraint ceux qui n'ont pas d'autre choix, à faire des trajets beaucoup plus longs, à circuler beaucoup plus longtemps ce qui densifie le trafic automobile. On obtient alors un résultat à l'opposé de l'objectif visé.
Le busway est certainement un bel outil pour la circulation péri urbaine, mais semble peu adapté (de par son exigence de circuler en site propre, et de par son encombrement) à la topographie du centre ville de Poitiers.
De plus, je partage le sentiment de Philippe Chadeyron :
Existe-t-il ou non un problème de transport en commun à Poitiers intra-muros ? Les bus sont-ils pleins à craquer, les attentes sont-elles interminables aux arrêts ? Des quartiers sont-ils délaissés par les transports en commun et si oui, en quoi un tram ou un busway résoudra-t-il cette éventuelle insuffisance ? La réponse est non, évidemment ! Mais avant de dépenser des centaines de millions d'€ dans une ville hyper-endettée où les impôts locaux sont déjà très élevés, il me semble que la question mérite d'être posée avec cette simplicité là !
Alors pourquoi ne pas essayer les navettes électriques ?
Comme je l'écrivais dans ce billet à mon retour de Bourges, j'ai beaucoup apprécié là-bas de pouvoir disposer de navette électrique gratuite. Ce mode de transport, adapté à des centres villes alambiqués comme ceux des villes anciennes, telle que Poitiers ou Bourges, je l'ai utilisé pour la première fois il y a 4 ou 5 ans à Bayonne. Je l'ai ensuite porté au projet de politique municipal construit avec Philippe Mahou (et Didier Longueville pour le thème des transports), et je reste convaincu que c'est une très bonne solution pour Poitiers, surtout quand je vois la quantité de gros bus, (avec 4 ou 5 personnes dedans), qui ont bien du mal à circuler sereinement dans un centre ville exiguë qui n'est pas adapté à leur encombrement.
Le principe ? Vous laissez votre voiture dans les nombreux petits parkings qui se trouvent à proximité immédiate du centre ville, la fréquence de passage (toute les 6 mn à Bayonne) fait que vous n'avez ni à attendre bien longtemps, ni à vous soucier des horaires de passage avant de prendre place dans un mini bus (une dizaine de place assises, autant debout) qui sillonne le cœur historique de la ville, c'est gratuit, silencieux, convivial...que du bonheur.
Quoi qu'il en soit, je souhaite bien du courage à nos élus et à nos "têtes pensantes" (j'en profite pour vous annoncer que nous recevons James Renaud au mardinoustoo du 5 mai), parce qu'ils vont devoir faire des choix compliqués.